Au moment où tous les événements culturels et les manifestations artistiques sont annulés par cause de force majeure, à savoir celle du Covid-19, plusieurs artistes, chacun à sa manière, vivent le confinement autrement. Tenus à l’écart des planches des scènes, et des salles bondées de public, ils se sont créés de nouveaux espaces et formes d’expression et se sont tissés de nouveaux liens avec leur public et ont conquis d’autres sur les réseaux sociaux.

Quand la toile transcende les frontières

En effet, bien que cette épidémie mondiale ait enfoncée davantage le secteur de la culture dans la crise, comme l’a confirmé l’Unesco dans ses dernières publications, des artistes ont choisi de vivre autrement leur confinement et d’atténuer les effets de la distanciation sociale sur les Tunisiens.

C’est le cas par exemple du violoniste et compositeur Kamel Cherif, qui, depuis l’annonce du confinement, a choisi de diffuser sur sa page facebook des partitions d’une ballade musicale aux consonances multiples et où chacun y puise selon ses goûts mélodiques.

Sur sa page, il organise quotidiennement à partir de 18h00 des séances vidéo en direct auxquelles répondent présents ses milliers de fans de tous les coins du monde enregistrant plus de 2000 vues. L’artiste qui compile, mixe et arrange les notes orientales de son violon avec des phrasées de Rock, Reggae, Pop, Jazz, Blues, RnB, Soul, emballe ses fans et les emporte dans un voyage musical enivrant.

Pourquoi ce choix ? Pour lui, comme il l‘a toujours affirmé, l’art se vit. Et il n’y a pas mieux que cette période de confinement pour qu’un artiste soit à la disposition de ses fans afin de départager des moments d’évasion musicale hors normes et transcendant toutes les frontières au moment où elles ont été fermées partout.

L’art au service de la bonne cause

D’autres artistes ont choisi une autre voie d’évasion créative. C’est le cas de la chanteuse, compositrice et Docteur en musicologie Aida Niati qui a opté pour un plaidoyer artistique au profit de la bonne cause.

Dans une vidéo, elle a posté une chanson créée spécialement en hommage aux chemises blanches. D’ailleurs dans la chanson qu’elle a composé ce sont des représentants de cette ” armée ” au premier front qui forment la chorale dans le vidéo-clip.

La chanson ” Dima el Koddem ” (toujours en avant), rend non seulement l’hommage qu’il se doit au corps sanitaire avec toutes ses composantes, mais offre aussi une lueur d’espoir aux Tunisiens.

Connu pour ses performances dans le monde entier, le chorégraphe Rochdi Belgasmi s’est exprimé lui aussi à sa manière. Avec les mesures prises contre le coronavirus, ” je me suis trouvé comme tout le monde bloqué et confiné chez moi. C’a fait maintenant un mois que je n’ai pas vu d’êtres humains et la solitude a commencé à avoir un poids non négligeable sur moi “, assure-t-il.

Alors que le confinement s’impose comme arme principale pour tenter de limiter la propagation de l’épidémie du Covid-19, ” il va falloir remettre en question mes habitudes, mon petit confort matériel et réinventer des manières de s’échapper sans sortir de chez soi ” s’explique-t-il.

” Tous mes spectacles de danse en Tunisie et à l’étranger, pour les mois de mars, avril et mai 2020, sont annulés, plus possible de voyager pour danser devant mon public, de donner des cours et d’assurer des ateliers de danse, plus possible pour moi de vivre comme avant “. Mais, cela ne l’empêche pas de réaliser des spectacles et donner des cours de danse en ligne depuis sa maison (salon, balcon et toit) pour détendre et ambiancer les nuits de confinement et apporter un peu de réconfort.

C’est pour cela qu’il a décidé de créer de nouveaux liens sociaux a? travers des écrans interposés comme a? l’époque ou? on se retrouvait pour de vrai pour rencontrer d’autres personnes en ligne chaque lundi, mercredi et vendredi et proposer un cours de danse tunisienne pour un public virtuel par le biais de sa page officielle sur Facebook.

L’idée, a-t-il révélé, s’est imposée comme une nécessité? ou une évidence, née d’un besoin de danser et surtout de rencontrer son public, même virtuellement.

Mais il n’y a pas que la Toile et les réseaux sociaux. Loin du virtuel d’autres créateurs se sont mis à l’œuvre autrement. Confinés ils gardent eux aussi le fil. Pour ne citer que l’exemple de l’initiative de l’acteur Hichem Rostom qui a eu un accueil favorable.

Son initiative, ” Wakfet Errjal Ltounes ” (Tous pour la Tunisie), est guidée par un grand nombre d’artistes, des hommes d’art de la scène et même des sportifs pour la collecte d’aides sociales en faveur des catégories nécessiteuses et ce dans un élan de solidarité avant l’avènement du mois de Ramadan. Alors que toutes les usines de production sont à l’arrêt partout dans le monde et en Tunisie, l’art par contre ne s’arrêta jamais. Il s’adapte, se transforme, trouve de nouveaux supports et canaux de diffusion. Aucune crise, aucun virus n’est parvenu à enrayer le rêve de la création qui n’a pour limites que la flamme qui habite les artistes et qui ne s’éteint qu’avec le souffle.