Jean-Yves Le Drian, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, est en visite depuis mercredi 8 janvier 2020 en Tunisie. Reçu dans la matinée de jeudi 9 courant par Kaïs Saïed, le président de la République, il lui a transmis l’invitation du président Macron pour une visite officielle en France.

Lors d’un point de presse au Palais de Carthage, Le Drian a rappelé les relations historiques entre la Tunisie et la France et a réaffirmé la volonté de son pays de les renforcer encore plus.  « Nous comptons doubler les investissements français en Tunisie ; cet objectif est ambitieux et se réalisera au prix d’actions partagées au service d’ambitions partagées. Notre partenariat se traduit par des projets structurants au bénéfice de la jeunesse qu’il nous appartient de concrétiser ensemble ».

Le chef de la diplomatie française a cité, à ce propos, l’Université franco-tunisienne pour l’Afrique et la Méditerranée (UFTAM) qui a ouvert ses portes en octobre 2019 et dont l’objectif est d’offrir aux étudiants tunisien et de l’Afrique subsaharienne un panel de formations d’excellence co-construites par de très grandes universités publiques françaises et tunisiennes. Le sommet des deux rives qui se tient cette année permettra aux sociétés civiles du pourtour méditerranéen de se mobiliser autour de leurs projets et en particulier autour de la jeunesse, affirme Le Drian.

Mais plus que la coopération tuniso-française, laquelle doit être remise à l’ordre du jour et des préoccupations des deux pays, c’est la crise libyenne qui a amené Le Drian en Tunisie après une rencontre importante entre ministre européens à Bruxelles suivie d’une autre avec le ministre égyptien des Affaires étrangères, Sameh Chokri.

Il est aujourd’hui plus qu’évident que la décision du président turc d’intervenir militairement en Libye risque de créer en Tunisie, le voisin le plus proche, une crise semblable à celle de la Syrie. Notre président en est-il conscient ?

« Ma réunion avec le président Saïed a permis de passer en revue les enjeux régionaux et en particulier la Libye. Stabiliser la Libye dans le respect du droit international est une priorité que nous partageons avec la Tunisie», a déclaré Le Drian qui a évoqué avec le chef de l’Etat tunisien les risques d’escalade en Libye et ses conséquences sur l’ensemble de la région du Maghreb et du Sahel.

L’accord conclu par le gouvernement de Tripoli avec la Turquie s’écarte dangereusement du droit international et aggrave la situation, prévient-il. « La sortie de crise implique un dialogue inter-libyen et un processus politique associant plus étroitement les acteurs régionaux, notamment les voisins de la Libye, dont la Tunisie ».

Les grands enjeux multilatéraux en 2020 et en premier le rôle que pourrait jouer la Tunisie en tant que membre non permanent au Conseil de sécurité ainsi que l’organisation du Sommet de la Francophonie cette année ont été discutés lors de la rencontre Le Drian/Saïed, tout comme la volonté de la France de soutenir la Tunisie dans le domaine de la coopération décentralisée.

La visite de Le Drian en Tunisie, bien que dotée de tous les apparats diplomatiques, devrait donner à réfléchir à notre cher président qui pense que la gestion d’un pays se limite aux déplacements à Sidi Bouzid et Kasserine et qu’il est coupé du reste du monde.

Depuis l’accession de Kaïs Saïed à la magistrature suprême et limogeage du ministre des Affaires étrangères, Khemais Jhinnaoui, la Tunisie est complètement absente de la carte géopolitique maghrébine, africaine, méditerranéenne et mondiale.

Le président élu croit que notre pays est une salle de classe et qu’il suffit d’y donner des leçons pour régler tous les problèmes aussi bien nationaux qu’internationaux.

A quand le réveil ?

A.B.A