Foire européenne de Strasbourg : «L’ignorance génère la peur», selon Nawel Rafik-Elmrini

nawel-rafik-elmirini-strasbourg.jpgNawel Rafik-Elmrini est la présidente du Conseil de surveillance et conseillère communautaire adjointe au maire de Strasbourg. Dans son allocution d’ouverture de la Foire européenne de Strasbourg (du 2 au 12 septembre 2016), elle est revenue sur le «vivre ensemble», devenu la pierre angulaire des discours politiques en France. Découvrir l’autre, sa culture, son histoire, cela permet de briser le mur de la peur, de l’intolérance et de l’extrémisme.

Entretien

Webmanagercenter : En quoi la participation d’un pays comme la Tunisie à la Foire européenne de Strasbourg pourrait-il aider des pays comme le nôtre à se repositionner en Europe?

Nawel Rafik-Elmrini : Le rôle de l’organisation de ce type de manifestation de foire européenne grand public, principalement pour les pays invités que nous choisissons, en l’occurrence cette année la Tunisie, c’est de faire connaître une culture, la civilisation à tous les Strasbourgeois et à tous les visiteurs.

Vous savez que dans le “vivre ensemble“, dans la cohésion sociale, ce qui compte est la connaissance de l’autre. L’ignorance génère la peur, la peur génère la violence. Pour nous, il est fondamental de donner une place aux pays amis, aux pays avec lesquels nous sommes partenaires pour que tout un chacun (Strasbourgeois, visiteurs, résidents…) puisse découvrir la richesse culturelle, l’histoire, les valeurs de ce pays pour que le mur de la peur tombe.

C’est essentiel, politiquement, pour notre région, et je suis ravie que ce soit aujourd’hui la Tunisie parce que c’est un pays qui a été touché par des actes de violence sans précédent tout comme la France; et sa présence à la Foire européenne livre un message simple: “nous sommes unis dans la lutte contre le terrorisme et la violence et nous sommes unis pour véhiculer un message de valeurs de paix, de tolérance et de dialogue“.

L’image de l’islam en France a-t-elle été ternie par des prêcheurs extrémistes qui œuvrent à endoctriner des jeunes fragiles et en perte de repères identitaires?

Le message de Manuel Valls, Premier ministre, à l’ouverture de la Foire, a été très clair à propos de la nécessité d’une meilleure connaissance de l’islam par les croyants eux-mêmes. C’est la méconnaissance du dogme religieux utilisé par ceux que je décrirais, personnellement, comme des monstres, pour formater une jeunesse, des fois en perte de repère, en perte de sens usant de fausses interprétations, de fausses informations de la religion pour les embrigader et les envoyer vers la mort.

Il y a tout un travail au niveau de l’Etat français mais aussi des collectivités territoriales et Strasbourg, en particulier, sur le repérage des personnes fragiles dès que l’on relève des signaux très faibles de radicalisation pour gérer les choses en amont. Ce qui nécessite une présence efficiente des acteurs sociaux du monde de l’éducation sur le terrain dans tous les quartiers pour pouvoir accompagner et parfois désamorcer les mécanismes de persuasion et d’endoctrinement.

C’est un travail très long parce que cela a extrêmement touché une partie de la jeune génération. Il est vrai que souvent et sans tomber dans la stigmatisation, il y a une partie de la communauté d’origine étrangère qui pense, à tort, ne pas avoir été intégrée dans la communauté de valeurs telle qu’elle existe aujourd’hui en France.

Et vous pensez que ce n’est pas le cas dans la réalité?

C’est une interprétation erronée sur laquelle nous travaillons pour leur dire qu’ils sont Français à part entière profitant des mêmes droits mais bien évidemment soumis aux mêmes devoirs.