Banane : nouveau numéro un sur un marché hautement concurrentiel

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ésil, le 2 mars 2014 (Photo : Yasuyoshi Chiba)

[10/03/2014 15:05:00] Paris (AFP) Le groupe américain Chiquita Brands International et son concurrent irlandais Fyffes, connu pour la marque Sol, ont annoncé lundi leur fusion, qui donnera naissance au numéro un mondial sur le marché hautement concurrentiel de la banane.

La nouvelle entreprise, qui gardera l’ensemble de ses marques issues des deux sociétés, vendra plus de 160 millions de cartons de 18,5 kilos de bananes dans le monde tous les ans, dans un marché représentant 1,2 milliard de cartons.

“Sur le marché international, c’est une grande nouvelle. C’est un énorme opérateur qui se créé en réponse à la baisse de la valeur ajoutée dans la filière”, juge Denis Loeillet, responsable de l’observatoire des marchés au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), interrogé par l’AFP.

Dans l’Union européenne (UE), premier consommateur mondial de bananes, Fyffes est déjà “le numéro un avec une part de marché d’environ 16% et Chiquita est le numéro deux avec environ 12% donc ensemble ils auront juste en dessous de 30%”, estime auprès de l’AFP Patrick Higgins, analyste chez Goodbody, qui juge aussi qu’il s’agit d’une réponse à la volatité des marges et des bénéfices qu’a subi le secteur ces dernières années.

“Ils vont quand même détenir les clés du marché européen”, s’est inquiété de son côté Philippe Ruelle, directeur général de l’Union des Groupements des Producteurs de Banane de Guadeloupe et Martinique, dans un entretien à l’AFP.

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é à Londres, le 23 février 2014 (Photo : Carl Court)

Le marché européen est organisé autour de trois origines, la “banane dollar”, c’est-à-dire produite dans les pays latino-américains, celles en provenance des pays ACP (Afrique Caraïbes Pacifique) et la production communautaire. En 2012, la banane dollar représentait 68,3% de la consommation, la banane ACP 19,1% et la production communautaire 12,6%, selon la Commission européenne.

Or “depuis 2010 la banane dollar a réalisé des gains de compétitivité très importants grâce à la baisse des droits de douane et à l’évolution du taux de change euro/dollar donc si (Chiquita et Fyffes) mettent en place une organisation qui augmente à la fois leur capacité en production et d’écoulement sur le marché, ça va mettre une pression assez importante sur le marché européen”, juge M. Ruelle.

-‘Guerre des bananes’-

Un accord conclu en décembre 2009 a mis fin à une “guerre des bananes” qui durait depuis des dizaines d’années en planifiant la diminution progressive des droits de douanes sur les bananes issues des pays producteurs d’Amérique latine.

Ces taxes sont ainsi passées de 176 euros par tonne à l’époque à 132 euros actuellement et devraient tomber à 114 euros en 2019, tandis que le pays ACP n’ont ni droits de douanes ni quota. En contrepartie, les pays latino-américains concernés s’étaient engagés à mettre un terme à leurs actions contre l’UE au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Mais l’UE a conclu des accords bilatéraux avec la Colombie et le Pérou prévoyant une chute des droits de douanes jusqu’à 75 euros, ce qui, selon Philippe Ruelle, devrait finir par s’appliquer à tous.

Selon lui, la grande question est maintenant: “quelle sera la résistance du marché français ?”

Le marché français est pour l’instant “le marché oublié de ces deux grands opérateurs”, explique M. Loeillet, qui signale que Chiquita l’a quitté il y a quelques années et que Fyffes n’y a jamais mis les pieds. En France, la banane dollar ne représente que 15% du marché, le pays étant principalement approvisionné par les Antilles (40%) et l’Afrique (45%).

“Tous les ans on se pose la même question: pourquoi Fyffes ne prend pas pied sur le marché français, qui est un des seuls marchés européens où il n’est pas présent?”, signale M. Loeillet.

“On va résister avec nos propres valeurs, prévient M. Ruelle. On est les seuls à pouvoir défendre une banane socialement et environnementalement responsable donc on va continuer à le faire. Après, comment la distribution française acceptera de défendre ces produits-là ?”