Dossier 17 décembre 2010 – 17 décembre 2013 : Développement régional, une priorité passée aux oubliettes

Les espoirs d’un développement régional harmonieux se sont-ils, définitivement, évaporés?

economie-tunisienne-01-2013.jpgLe développement régional était dans tous les esprits. Un livre blanc lui a été dédié. Le cri du cœur de la révolution est venu de l’ensemble des régions de l’intérieur qui criaient quasiment famine. Le littoral les a marginalisés. Le bassin minier, pourvoyeur de phosphates, se voyait figé. Le nord-ouest et ses richesses agricoles et forestières était relégué. Le sud et le centre-ouest étaient lessivés.

Le gouvernement BCE a pris le problème à bras le corps. Un Livre blanc a été dédié au développement régional qui trouvait donc une certaine centralité dans les priorités du pays. Et pourtant, avec une rapidité fulgurante, le sujet est passé à la trappe. Le découpage des régions avec la logique de convergence, comme le voudrait l’esprit d’aménagement du territoire, s’est évanoui. Plus personne n’en parle. Et, le sujet semble occulté par la place que l’on donne aux grands projets. Il est vrai que les grands chantiers peuvent induire une certaine dynamique de croissance. Mais ils ne sauraient réparer les disparités régionales. En la matière l’on n’évoque plus que des projets ponctuels, un cluster par-ci, un technoparc par-là. Il faut se rappeler que la question du déséquilibre régional prend la dimension d’une injustice sociale. Et même si on parvient, momentanément, à l’occulter, elle finira par nous rattraper.

Le renoncement à la planification

C’est le gouverneur de la BCT qui s’égosille à le rappeler. Le pays vit sans feuille de route. Pour la première fois de son existence, la Tunisie a abandonné la planification. Du coup, le gouvernement n’est plus tenu d’une liste impérative te contraignante de priorités. En l’absence d’un référent d’objectifs de long terme, il lui est aisé de naviguer le nez sur l’évènement et de se contenter de proposer une “short list“ de grands chantiers, impressionnants par leur taille mais non inclusifs par leurs retombées.

Faute d’un programme précis d’intégration, les régions continueront à subir leur dispersion économique. Et, leur marginalisation par rapport à une dynamique de croissance, d’ensemble. Ainsi en est-il avec le Technoparc de la ville de Gafsa. Le site de Gafsa va doubler avec les 100 hectares du Technopole, et des industries innovantes pourraient affluer. A l’évidence il y aura un frémissement de croissance dans la région. Mais va-t-on résoudre la question du développement de la région, pour autant? Peu sûr!

Le découpage régional avec pour optique un aménagement inclusif du territoire est une question qui ne saurait être dépassée. On a vu la Pologne se pencher sur la question avec empressement réduisant ses régions de 42 à 16. D’ailleurs, la Pologne a inspiré Abderrazak Zouari, ministre du Développement régional dans le gouvernement de BCE et auteur du Livre blanc.

Au cœur des négociations avec l’Union européenne

Ne nous leurrons pas. Le pays manque de moyens. L’investissement public s’essouffle, étouffé qu’il est par une Caisse de compensation qui n’en finit pas d’enfler. Et l’investissement privé n’arrive pas à le suppléer. Une manne extérieure est nécessaire pour impulser le développement régional. On l’a compris, mais où la trouver? La suggestion du livre blanc était de solliciter l’UE pour le statut de membre sans l’adhésion. De la sorte on pouvait piocher dans les fonds structurels inépuisables de l’UE dédiés au développement régional.

D’ailleurs, l’UE est bien avisée de la question. La preuve? Elle a créé la Banque européenne pour la reconstruction et le développement. Et la banque, en s’installant chez nous en juin 2013, a initié des projets dans les régions. La piste est donc toute tracée. Et à défaut de développement volontariste, les régions ont, chacune à sa manière, versé dans la débrouille. Les frontalières n’ont pas hésité à basculer dans le commerce parallèle et la contrebande, pensant y trouver une panacée à leur problème de développement. Elles ne savent pas qu’elles ont attrapé in virus qui finira par ruiner l’économie nationale et emportant par la même tous leurs espoirs d’inclusion.