Tunisie : Le grenier de Rome devenu grenier

Je suis en voiture, des paysages à couper le souffle, de la verdure, des montagnes, des prairies. Le grenier de Rome, c’est comme ça que cette tranche de terre s’appelait dans l’antiquité. Terre d’une grande richesse, qui pourrait facilement réaliser l’indépendance agricole du pays. Terre devenue grenier, tout court.

Grenier : (définition dans le dictionnaire), local hors-sol destiné au stockage du grain. Mais le terme s’utilise dans le langage courant pour décrire ces espaces de nos maisons, où on met tout et n’importe quoi. Des objets sans grande valeur souvent, pas utiles pour le moment, mais qu’on ne veut pas jeter. C’est un peu ça, ce qu’on propose aux touristes, qui payent déjà une poignée d’euros, leur séjour chez nous. Ça leur coûterait moins cher que de rester chez eux peut-être.

La médina, tout et n’importe quoi. Rares sont les produits de valeur, ou réellement exotiques. Que des gadgets, importés d’Asie le plus souvent, et qui faisaient la fortune des Trabelsi. Nos habits traditionnels, ou une copie plutôt, en nylon. La honte. La honte pour un maître artisan qui fabrique des «jebba», avec un tel savoir-faire, une telle passion, de façon si minutieuse, comme l’a fait toute sa famille, depuis des générations.

Au lieu d’aller dépenser des sommes faramineuses pour relancer un tourisme tellement mal pensé, on aurait pu repenser nos choix stratégiques, tellement inefficients. Notre tourisme n’a même pas les moyens de sa réussite. Quelqu’un est content d’avoir été dans un hôtel quelconque chez nous, à Hammamet ou à Sousse ? Vous avez vu le visage fermé des serveurs ? La vanité des femmes de ménage, la qualité de la nourriture, et j’en passe.

Ne faut-il pas revoir les choix stratégiques de notre économie ? L’agriculture ne devrait-elle pas être au centre ? Le tourisme, ne faut-il pas le repenser ?

L’échec de cette version –ou vision- du tourisme est tellement évident qu’il n’y a pas besoin d’argumenter encore plus.

Et qui doute encore de l’importance de l’agriculture pour les années qui viennent ? Qui n’est pas au courant des problèmes futurs de l’eau, de la suprématie des firmes qui vendent les OGM (Organismes génétiquement modifiés), du choix des bioénergies…et qui va littéralement mettre le feu aux prix des denrées alimentaires ?

Est-il besoin de réfléchir encore à la revalorisation de l’agriculture dans notre pays ? A ramener tous ces jeunes vers leurs terres, au lieu d’aller tous se ruer vers des études théoriques le plus souvent, et sans débouchées encore plus souvent… ? Etre agriculteur aussi suppose de faire des études, être agriculteur est un métier extrêmement intéressant, et digne…

Mais la dignité des métiers chez nous, c’est un autre sujet, et non des moindres. A suivre…