La Tunisie a participé au G8… et après?!

g8-270511-1.jpgDopé par l’exploit des jeunes révolutionnaires tunisiens d’avoir enclenché, au moindre coût, un processus démocratique dans un monde arabe dirigé par des dictatures sans foi ni loi, le gouvernement provisoire, qui fait face après la révolution à des revendications sociales multidimensionnelles du peuple des refoulés et des exclus, cinquante ans durant, a estimé juste d’exploiter cet avantage et de quémander du groupe des huit pays les plus industrialisé du monde (G8), un appui conséquent à la transition démocratique du pays… Mais les résultats ne semblent pas être à la hauteur des espoirs escomptés.

C’est du moins si on croit le chef de la délégation tunisienne, Béji Caïd Essebsi, Premier ministre du gouvernement provisoire, qui a déclaré à l’issue de cette première participation aux réunions du G8, que la Tunisie «n’a pas été totalement satisfaite mais rassurée».

Pour justifier le bien-fondé de cette participation, le Premier ministre a rappelé que la Tunisie a toujours compté, d’abord, sur ses propres moyens, et ensuite, sur l’appui de ses partenaires étrangers pour se développer.

Concrètement, la Tunisie ne disposera probablement pas de la totalité du soutien financier des 25 milliards de dollars dont elle aura besoin, durant les cinq prochaines années. Pis, sa part dans l’enveloppe globale proposée par le G8 (40 milliards de dollars), une sorte de micro-plan Marchal dédié au cofinancement des transitions démocratiques arabes, risque d’être réduite pour peu que d’autres pays candidats comme le Yémen, la Syrie et la Libye basculent dans la démocratie.

Moralité: c’était une grande illusion et naïveté politique que d’avoir placé tant d’espoirs dans une institution transnationale informelle comme le G8.

Heureusement, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Mustapha Nabli, en bon pédagogue aguerri aux manœuvres des institutions internationales, a eu le mérite de rappeler, le soir même à la chaîne «Elwatania», que le G8 n’est pas une institution de décisions mais de recommandations et que la Tunisie n’est pas allée à Deauville (ville française où a eu lieu la réunion du G8) pour négocier une enveloppe d’aide financière mais pour arracher un appui international à même de la rassurer quant à la poursuite de son processus démocratique.

Quant aux véritables négociations sur l’enveloppe à accorder à la Tunisie, elles seront entamées, selon M. Nabli, au mois de juillet prochain, volet par volet et selon les priorités du pays (emploi, création d’entreprises, développement régional).

Néanmoins, le gouverneur de la BCT a tiré deux conclusions positives de cette première participation de la Tunisie au G8. Premièrement, les 8 pays ont accepté d’apporter un appui multidimensionnel à la jeune démocratie tunisienne. Deuxièmement, l’annonce de ce soutien international constitue un effet d’annonce fort positif pour encourager les investisseurs étrangers à s’implanter en Tunisie.

Au-delà des résultats mitigés de cette participation au G8, le gouvernement tunisien doit apprendre à garder la tête froide, face aux problèmes, fussent-ils parfois insurmontables. Car, pour l’Histoire, la Tunisie a été confrontée à des situations similaires, par le passé et prise de panique, elle a opté pour des solutions de facilité qui nous ont coûté très cher après.

A titre indicatif, en 1986, la Tunisie, qui était au bord de la banqueroute par l’effet d’une politique macroéconomique improvisée du défunt Premier ministre, Mohamed M’zali, s’était jetée, pour s’en sortir, dans les bras d’institutions ultralibérales (Banque mondiale, Fonds monétaire international…), le Plan d’ajustement structurel (PAS).

Vingt-cinq après cette option prise à la hâte, et ses corollaires (privatisation des entreprises publiques, institution de la flexibilité de l’emploi et de la sous-traitance…), on en connaît, désormais, les résultats négatifs, et surtout, le surcoût des correctifs engagés pour y remédier: suppression de la sous-traitance, réhabilitation de l’investissement public, retour des revendications sociales…

C’est pourquoi le satisfecit que vient de nous accorder le G8 ne doit pas fouetter notre ego et être pris comme une opportunité pour s’aligner sur les politiques ultralibérales de cette institution.

N’oublions pas que les rencontres de ce Groupe sont constamment contestées par les mouvements altermondialistes, lesquels ont toujours remis en cause sa légitimité et sa tendance à vouloir «diriger le monde» au mépris des autres pays.

Nous l’aurons dit.