Tunisie : Y a-t-il un pilote dans l’avion?

Il est à se demander si les acteurs de la vie publique qui se connaissent tous
ne réussissent pas à s’entendre sur déjà la représentativité des structures
devant préparer le pays à la transition démocratique. Au lieu d’avancer,
certains semblent se plaire à contester tout et à refuser le dialogue.

«Les Arabes ont-ils convenu de ne jamais s’entendre sur quoi que ce soit?».
Cette expression, largement connue, souvent mise en avant pour expliquer les
raisons de la mésentente entre les Arabes, notamment concernant les questions
vitales comme leur alliance contre Israël, peut-elle s’appliquer, aujourd’hui, à
l’endroit des Tunisiens? Qui s’évertuent, depuis le 14 janvier, à présenter aux
yeux du monde le spectacle d’un pays divisée.

S’il est certain que les révolutions sont ainsi faites et que, au moins pour une
période transitoire, les peuples qui ont connu un unanimisme imposé, se libèrent
de tous les jougs et vont, pour ainsi dire, dans tous les sens défendant la
chose et son contraire, il faut savoir raison garder notamment sur ce qu’on
pourrait appeler les fondamentaux.

Il va sans dire que le premier des fondamentaux réside dans la préservation de
l’appareil économique. Or, de ce côté des choses, les prévisions sont des plus
pessimistes. Certains secteurs comme le tourisme vivent à l’heure de l’agonie.
Une partie du tissu industriel n’est pas dans une situation meilleure. Idem pour
le commerce qui souffre de «la dictature des marchands ambulants»…

Les sirènes d’alarme qui retentissent ne semblent pas du reste intéresser
certains et la majorité dite silencieuse semble observer sans réagir. Peut-elle
réellement d’ailleurs faire autrement? Que peut-elle faire contre les grèves
–certes de moins en moins nombreuses- et les sit-in qui bloquent une partie de
l’activité économique, comme lorsque les 14 et 15 mars 2011 les employés de la
Transtu ont arrêté le travail?

Autre chapitre et non des moindres, celui de la réforme de quelques textes
fondamentaux comme le Code électoral et le Code de la presse au sujet desquels
un aboutissement n’est pas sûr. La gabegie s’est installée, le jeudi 17 mars à
l’occasion de la tenue de la première réunion du Conseil de l’Instance
supérieure pour la réalisation des objectifs de la Révolution, de la Réforme
politique et de la Transition démocratique. Au cours de laquelle les dissensions
se sont fait jour au sujet de la représentativité de ses membres. Des membres de
cette instance ont quitté la réunion et suspendu leur participation.

Contester tout

L’essentiel est passé, à ce propos, bien à côté: le projet de réforme du Code
électoral n’a pas pu être examiné. Et la question lancinante n’a cessé depuis
d’être posée: respectera-t-on la date du 31 mars 2011, comme «dernier» délai
fixé par le président de la République par intérim, dans son adresse à la nation
le 3 mars 2011, pour l’aboutissement de ce texte?

Idem pour le Code de la presse dont la réforme a été présentée par un
représentant du Conseil de l’Instance supérieure pour la réalisation des
objectifs de la Révolution, de la Réforme politique et de la Transition
démocratique, sans que le Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT)
soit consulté.

Et il est à se demander si les acteurs de la vie publique qui se connaissent
tous ne réussissent pas à s’entendre sur déjà la représentativité des structures
devant préparer le pays à la transition démocratique. Au lieu d’avancer,
certains semblent se plaire à contester tout. Le gouvernement refuse, pour sa
part, de prévoir en agissant après coup pour corriger des erreurs.

Jusqu’à quand? Les Tunisiens qui regardent ce spectacle navrant s’interrogent en
ne voyant pas le bout du tunnel. En espérant un sursaut pour l’intérêt de tous.
Et craignent que cette situation ne leur fasse perdre les acquis de la
révolution.