Crise du lait : les producteurs maintiennent la pression sur le gouvernement

[20/05/2009 18:49:46] PARIS (AFP)

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à Parisle 20 mai 2009 (Photo : Pierre Verdy)

Les producteurs de lait ont maintenu la pression mercredi, principalement en Bretagne, Pays de Loire, Alsace et à Paris, pour protester contre l’effondrement des cours, bloquant les collectes ou menant des opérations dans les hypermarchés, accusés de dégager des marges substantielles.

A Paris, une centaine de producteurs ont manifesté à l’appel des Jeunes Agriculteurs (JA) devant le siège de Sodiaal, premier groupe coopératif laitier français puis, dans l’après-midi, devant celui de Danone, pour protester contre la baisse des prix, a constaté un journaliste de l’AFP.

La collecte de lait était totalement arrêtée dans plusieurs départements bretons et des Pays de Loire, a résumé en soirée Laurent Bousses, animateur de la section lait de la FRSEA de l’Ouest.

Et le blocage de camions qui collectent le lait dans les fermes devrait se poursuivre “de façon plus sporadique” pendant le week-end, avant de reprendre lundi, a-t-il expliqué à l’AFP.

En Maine-et-Loire, les producteurs de lait continuaient notamment de bloquer la laiterie Tessier (groupe Bongrain) à Cornillé-les-Caves, à l’est d’Angers, depuis lundi. La direction a obtenu en référé une demande d’évacuation.

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ésident de la FNSEA Jean-Michel Lemetayer, le 20 mai 2009 à Paris (Photo : Stephane de Sakutin)

D’autres laiteries étaient bloquées ou en cours de déblocage mercredi soir en Mayenne, en Sarthe, dans le Morbihan ou encore à Seine-Maritime.

Une trentaine de producteurs ont manifesté devant la préfecture de Bourges déversant des bidons de lait sur la voie publique.

Ces actions viennent en complément d’autres opérations engagées, parfois depuis plusieurs jours, dans plusieurs départements.

En Ille-et-Vilaine notamment, six plateformes de centrales d’achat ont été bloquées par des producteurs, ainsi qu’une autre à Lisieux (Calvados).

En Côtes d’Armor, les producteurs, qui ont fait dans la nuit le tour des laiteries (tags, dégonflage de pneus, citernes vidées) ont mené toute la journée “une action de sensibilisation” dans des hypermarchés, invitant notamment les clients à un pique-nique dans les rayons produits laitiers.

Des hypermarchés en Loire-Atlantique, dans le Finistère et dans le Morbihan, mais aussi dans le Bas-Rhin ont également été les cibles d’opérations de producteurs.

A Geispolsheim, près de Strasbourg, une vingtaine de producteurs sont entrés dans un Leclerc où ils ont rempli des chariots de produits laitiers et de fruits et légumes produits hors d’Alsace, qu’ils ont finalement laissés aux abords des caisses avant de quitter les lieux, a constaté un photographe de l’AFP.

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Evolution mensuelle et annuelle du prix du lait en France

Selon les agriculteurs, le prix du lait payé aux producteurs est de 30% inférieur à celui d’avril 2008. A Paris, ils ont réclamé un prix de 305 euros les mille litres, alors qu’il tourne actuellement autour de 210 euros.

L’European Milk Board (EMB, syndicat européen du lait) a menacé mercredi de faire “la grève européenne du lait”, alors que des actions de protestation contre la baisse des prix se sont poursuivies en France.

“Le problème du prix du lait est européen”, a souligné l’EMB dans un communiqué conjoint avec l’Organisation des producteurs de lait (OPL), un syndicat minoritaire de producteurs laitiers en France.

Selon la FNSEA, premier syndicat agricole français, le prix du lait aux producteurs en avril est de 30% inférieur à celui d’avril 2008.

“Il ne peut y avoir de sortie de crise s’il n’y a pas de cadrage national” du prix du lait, a déclaré à la presse Jean-Michel Lemétayer, président de la FNSEA à l’issue d’une rencontre avec le ministre de l’Agriculture Michel Barnier et le secrétaire d’Etat à la consommation Luc Chatel.

Il a ainsi qualifié d”‘énorme bêtise” la décision en 2008 de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de remettre en question le cadre juridique des négociations de l’interprofession laitière.

Ces dernières années, le prix du lait faisait l’objet d’un “cadrage national”, avec une recommandation de l’interprofession, le Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (Cniel) à laquelle ses différentes composantes -industriels, coopératives et producteurs- se pliaient.

Mais cette pratique a dû cesser après une injonction en mai 2008 de la DGCCRF pour distorsion de concurrence.

Désormais, les négociations sur les prix se font au niveau régional, entre chaque producteur et chaque société ou coopérative, mais les producteurs se plaignent du fait que les industriels, qui se basent sur les cours internationaux, leur imposent des prix bas.

Les conflits se sont multipliés entre les deux parties, d’autant qu’avec le système actuel les producteurs livrent le lait sans connaître à l’avance le prix auquel ils seront rétribués.La Fédération nationale de l?industrie laitière (FNIL) s’est prononcée mercredi en faveur d’un “cadrage national”.

“Nous souhaitons une sécurité juridique des règles du jeu. On ne veut pas s’embarquer dans un système qui nous mette à nouveau en difficulté avec l’Autorité de la concurrence”, a cependant souligné à l’AFP Jehan Moreau, directeur de la Fnil.