Thaïlande : moral en berne des milieux économiques après les législatives

 
 
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Soldats contrôlant les listes électorales le 23 décembre 2007 dans la province de Yala (Photo : Muhammad Sabri)

[24/12/2007 08:21:17] BANGKOK (AFP) La délicate formation d’un gouvernement de coalition qui semble se profiler en Thaïlande après les élections législatives de dimanche n’est pas de nature à rassurer les milieux économiques déjà ébranlés par le putsch militaire de septembre 2006 qui a porté un coup à la croissance.

“Il reste encore beaucoup d’incertitudes politiques après le scrutin”, a déploré Pornsilp Patcharintanakul, numéro deux du Conseil du commerce thaïlandais.

“La prochaine coalition gouvernementale ne sera pas en mesure d’apaiser les incertitudes politiques car ses bases sont chancelantes. Je pense que le nouveau gouvernement ne tiendra pas plus d’un an”, estime l’expert qui a récemment prédit une croissance maximale de 4,5% en 2008, chiffre honorable mais parmi les plus faibles d’Asie du Sud-Est.

L’ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra a été renversé en septembre 2006 par l’armée qui l’a accusé d’avoir pratiqué la corruption et menacé la monarchie. M. Thaksin s’est exilé, sa formation a été dissoute mais ses partisans, regroupés au sein du Parti du pouvoir du peuple (PPP), sont arrivés en tête dimanche aux premières législatives depuis le putsch. Le PPP, qui a raté de peu la majorité absolue (il lui manque neuf sièges), affirme être en mesure de diriger un gouvernement de coalition.

“La stabilité d’une nouvelle coalition gouvernementale est discutable. On ignore de quelle manière le prochain gouvernement peut unifier un pays divisé et mettre en place des politiques économiques”, abonde Adisak Rohitasune, vice-président de la Fédération des industries thaïlandaises, qui regroupe les principaux acteurs économiques. Après le putsch, beaucoup misaient sur un retour à la stabilité, favorable à l’environnement économique. Mais quinze mois après le coup de force, les attentes sont déçues.

En cause, la gestion de l’économie par les militaires en rupture totale avec l’ultra-libéralisme, dont M. Thaksin s’était fait le champion en Asie du Sud-Est.

Les milieux d’affaires ont notamment été déboussolés par des mesures gouvernementales pour contrôler les capitaux entrants (la Bourse de Bangkok avait chuté de près de 15% le 19 décembre 2006) et restreindre la participation des étrangers au capital de certaines entreprises.

Par ailleurs, depuis le putsch, la consommation et les investissements sont en baisse.

“Il est difficile pour les investisseurs de reprendre confiance après les élections car les (luttes) politiques vont rester vives”, s’inquiète Supavud Saichua, analyste économique chez Phatra Securities.

Autre inconnue: la réaction de l’armée qui a subi un cuisant désaveu alors qu’elle avait tout fait pour affaiblir le camp de M. Thaksin visé par une série d’enquêtes en Thaïlande. Le PPP a promis d’oeuvrer au retour en Thaïlande de M. Thaksin qui a racheté l’été dernier le club de football anglais de Manchester City.

L’ancien Premier ministre, très impopulaire parmi les élites de Bangkok, garde le soutien des régions du Nord et du Nord-Est, notamment parmi les paysans.

Le général Sonthi Boonyaratglin, auteur du putsch de 2006, s’est toutefois voulu rassurant, vendredi, en minimisant les risques de désordres. “Si le Parti du pouvoir du peuple remporte les élections et dirige une coalition, tout se terminera pacifiquement. Je suis convaincu que les choses changeront sans le moindre chaos”, a-t-il assuré.

 24/12/2007 08:21:17 – © 2007 AFP