Thales : deux premières mises en examen dans un dossier de corruption

 
 
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Le siège du groupe d’électronique de défense Thales (Photo : Pascal Pavani)

[13/12/2006 20:16:58] PARIS (AFP) Deux premières mises en examen, à l’encontre de l’ex-numéro 2 de la Délégation générale pour l’armement (DGA) et d’un homme d’affaires, ont été prononcées mercredi dans le volet français d’une enquête judiciaire pour corruption visant le groupe français d’électronique et de défense Thales.

Laurent Collet-Billon, ancien adjoint au délégué général pour l’armement, a été mis en examen pour “favoritisme” par la juge financière Xavière Simeoni qui instruit le dossier avec le juge Renaud van Ruymbeke.

Un homme d’affaires, Gérard Bertinetti, a été mis en examen pour “trafic d’influence” par la magistrate.

Il s’agit des premières personnes poursuivies dans ce dossier judiciaire tentaculaire pour lequel deux informations judiciaires ont été ouvertes le 8 décembre 2005 par le parquet de Paris, à la suite des dénonciations de corruption de Michel Josserand, ancien PDG d’une filiale du groupe, Thales Engineering and Consulting (THEC).

Les deux hommes sont mis en cause dans le cadre d’un marché public, signé en 2002 entre Thales et la DGA, rattachée au ministère de la Défense.

Ce marché, baptisé “Secoia”, concernait la construction d’une usine de destruction d’armes chimiques de la première Guerre mondiale sur le camp militaire de Mailly (Aube).

M. Josserand a accusé Gérard Bertinetti, sur procès-verbal, d’avoir mis sur pied une “véritable entreprise de corruption”.

“Vis-à-vis de la DGA, le groupe Thales recourt aux services de la société de consultant de Bertinetti pour assurer le lobbying et c’est aussi un +service provider+, (intermédiaire pour gagner des affaires et verser des commissions). Bertinetti avait des liens maçonniques avec le numéro 2 de la DGA”, a-t-il expliqué à la justice.

En perquisitionnant le domicile de l’homme d’affaires en décembre 2005, les juges ont saisi le contrat Thales-Bertinetti dans lequel ce dernier devait percevoir une commission de 1,35% du marché, emporté par Thales pour 120 millions d’euros.

M. Collet-Billon est soupçonné d’avoir fourni à Thales des informations confidentielles sur les propositions financières de ses concurrents, EADS et la société des poudres et explosifs (SNPE), dans le cadre de l’appel d’offres lancé par la DGA pour la construction de cette usine.

“Mon client a formellement contesté ces accusations”, a déclaré à l’AFP son avocat, Me Eric Dezeuze.

Les juges, qui avaient également perquisitionné en décembre les locaux de la DGA et de Thales, ont mis la main sur deux offres successives formulées par Thales, la seconde, inférieure de 20 millions d’euros à la première, lui ayant permis d’emporter le contrat.

Le Délégué général pour l’armement, François Lureau, avait expliqué au Monde que “le marché Secoia avait été attribué à Thales au terme d’une procédure avec mise en compétition, validée par la commission spécialisée des marchés concernés”. “Les membres de l’équipe Secoia ont contribué collégialement au choix du titulaire”, avait-il ajouté.

Lors de ses auditions, M. Josserand avait assuré, mais sans en apporter la preuve, que le projet de cette usine avait également pour vocation de traiter des munitions livrées par Thales au gouvernement irakien de Saddam Hussein, en violation de l’embargo sur les armes.

Plus généralement, il avait dénoncé un système de corruption organisé chez Thales qui, selon lui, représenterait en commission illégale 1 à 2% du chiffre d’affaires.

Thales a apporté “un démenti formel” à ces accusations et porté plainte en diffamation contre Michel Josserand et le Monde.

 13/12/2006 20:16:58 – © 2006 AFP