La morosité économique, les hausses répétitives du taux directeur de la BCT, les difficultés de financement et le risque de pénurie planant sur le secteur automobile, sont autant de défis qui pèsent sur le secteur du leasing pour l’année 2023, d’après une analyse, publiée le 16 février 2023, par l’intermédiaire en Bourse, MAC SA.

Cette analyse souligne que l’année 2023 serait l’année de tous les défis pour le secteur, en commençant par la conjoncture économique qui reste lourde d’incertitudes.

L’investissement physique (Investissement en matériel spécifique) n’a toujours pas retrouvé son rythme normal. Actuellement, le plus gros de la production se fait sur le matériel roulant qui représente 75% à 80% de l’activité. Même sur ce type de matériel, le risque de pénurie que connaît le secteur automobile est toujours présent, ce qui pourrait impacter l’activité en 2023, faute d’actifs à financer et pousserait les leaseurs à financer du matériel d’occasion.

La poursuite de l’inflation conduisant la BCT à relever son taux directeur (trois fois en 2022 le portant à 8% actuellement) risque aussi, d’altérer la marge des leaseurs même si le taux d’intérêt excessif (TIE) vient d’être porté à 16,09%.

Du côté de la clientèle, la question qui taraude les professionnels est jusqu’à quelle limite pourraient-ils supporter des hausses successives ?

Maintenir donc un niveau de spread rentable sans pour autant alourdir la charge financière des clients sous contrainte du respect du TIE, est le plus grand défi à relever en 2023. De surcroît, la mobilisation, la structure et le coût des ressources est aussi, un sujet qui ne manque pas d’importance pour le secteur.

“Privées du financement direct auprès de la BCT comme c’est le cas pour les banques, les sociétés de leasing sont toujours à la recherche d’un équilibre entre les différentes voies de financement à savoir le crédit bancaire, l’émission des emprunts obligataires et les lignes de financement étrangères”, selon cette note.

Ces dernières, qui représentaient il n’y a pas longtemps une bonne alternative, sont devenues relativement coûteuses, exposant certaines compagnies à des risques de taux, le taux de couverture du risque de change restant élevé, sans oublier la notation du risque pays et le non aboutissement des négociations avec le FMI. Certaines compagnies pourront faire appel à la ligne de refinancement de 120 millions de dollars mise en place récemment par la Banque Mondiale, au titre du projet d’appui au redressement économique des PME.

En bourse, les valeurs de leasing restent pénalisées par leur faible liquidité malgré des niveaux de valorisation fort intéressants comparés au secteur bancaire.

Indicateurs clés du secteur

L’analyse revient aussi sur les indicateurs clés du secteur durant les dernières années. Il en ressort qu’après trois années de baisse, le secteur du leasing a repris en 2021, affichant une hausse de la production de 18,9%, une reprise s’est confirmée en 2022 avec une progression des mises en force de 15,8%.

Le secteur a pu profiter du redressement de certaines activités économiques à l’instar du Tourisme à travers la location de voitures et les services en général après un exercice 2020 fortement pénalisé par la crise sanitaire et les mesures locales et internationales de restrictions dans le déplacement des personnes et des marchandises.

Le secteur demeure toutefois encore loin des niveaux de production de 2017 et 2018. D’après les professionnels du secteur, la baisse des investissements a bien rejailli sur le niveau d’activité du leasing. En chiffres, le ratio FBCF (formation brute de capital fixe) en % du PIB devrait s’établir à 15,4% au terme de l’année 2022 contre 16% en 2021, 15,8% en 2020 et plus que 19% au terme des années 2017-2018-2019. La part du matériel spécifique dans les mises en force, indicateur qui reflète l’évolution des investissements physiques, a été remarquablement réduite comparaison faite avec les années antérieures.

Actuellement, le plus gros de l’activité se fait sur le matériel roulant. En termes de production, Tunisie leasing reste le leader avec une part de marché de 18% suivie par la CIL avec 17%, 16,6% pour l’ATL, 15,9% pour Hannibal Lease et 12,5% pour Attijari Leasing soit une part globale de 80% pour ces cinq sociétés cotées.

L’effet saillant en 2022 c’est la reprise remarquable de la société BTK leasing. Avec une hausse de 39,9% des mises en force, sa part de marché est passée à 7,3% montant ainsi à la sixième place après avoir été la dernière du classement. Hannibal Lease et ATL ont connu également en 2022, une forte reprise de l’activité avec des croissances respectives de 27,2% et 23%.

Concernant les taux appliqués, le taux de sortie moyen du secteur s’est établi en 2022 à 14,79%, un niveau très proche de celui de 2021 et 2020.

Cette quasi-stabilité s’explique premièrement par une variation insignifiante du taux d’intérêt excessif (TIE). En fait, l’effet des trois hausses opérées en 2022 devait être ressenti dans les prochains exercices. Deuxièmement, les sociétés de leasing ont privilégié la rentabilité des financements au détriment d’acquisition de part de marché limitant la concurrence sur les taux. Ainsi, toutes les sociétés ont appliqué des taux qui assurent un niveau de spread respectable.

En termes d’encours, malgré la reprise de l’activité, le secteur n’est toujours pas revenu à son niveau record de 2018. En 2022, l’encours du secteur s’est établi à 3541 MD en légère hausse de 1,4% alors que les mises en force ont évolué de 15,8%. Cette tendance est expliquée par un retour à la normale du rythme de l’amortissement des encours après deux années marquées par le report des échéances conformément aux circulaires BCT 2020-06, 2020-19 et 2020-21. En effet, la nouvelle production de 2022 (1898,2 MD) de Mises en force n’a pas été assez suffisante pour alimenter les encours.

Amélioration de la qualité du portefeuille

La hausse de l’activité conjuguée à l’amélioration des spreads de taux ont permis de faire augmenter le produit net du secteur de 14,3% en 2022 (Hors BTK Leasing). Toutes les sociétés ont vu leur PNL s’accroitre et la meilleure performance a été réalisée par Best Lease (+18,6%) suivie par ATL (+16,3%) et Hannibal Lease (+15,4%).

Le résultat brut d’exploitation du secteur (Hors BTK Leasing) a connu une croissance de 22,3%, favorisée par la hausse à deux chiffres du PNL et de l’évolution timide des charges d’exploitation (+3,3%). Il est à préciser que les charges d’exploitation relatives à l’année 2021 intégraient la contribution des sociétés de leasing au budget de l’Etat. En 2022, les charges d’exploitation n’incluent plus cette contribution. Nonobstant cette contribution, la hausse des charges d’exploitation aurait été plus importante.

Selon les indicateurs d’activité au 31 décembre 2022, la qualité d’actifs des sociétés de leasing a connu une nette amélioration en 2022 avec un repli de 10% des engagements classés à 376,6 MD. Cette baisse est expliquée en partie par la radiation et des abandons de créances classées conformément à la circulaire BCT 2022-01 relative à la prévention et résolution des créances non performantes.

Le secteur du leasing reste un fort contributeur au financement des PME tunisiennes. Le secteur dénombre 8 opérateurs contribuant dans le financement de l’investissement national à hauteur de 8% en moyenne.