Le président de l’Association tunisienne de défense des droits de l’enfant, Moez Cherif, a critiqué l’absence de responsables de l’Etat à la conférence de presse organisée mercredi 30 décembre 2020, au Centre national de l’informatique pour l’enfant (CNIPE) pour présenter le rapport annuel sur la situation de l’enfance en 2019, élaboré par l’Observatoire d’information, de formation, de documentation et des études pour la protection des droits de l’enfant.

Cherif estime qu'”il est inconcevable que les responsables ne soient pas présents à un tel événement”. La ministre de la Femme, de la Famille, de l’Enfance et des Séniors n’a pas assisté à la conférence et a été représentée par son chef de cabinet, tout comme la direction générale de l’enfance et les responsables des secteurs de la santé, des affaires sociales et des structures intervenantes, a-t-il dit.

Il a dans ce sens déploré “la détérioration de la situation des enfants en Tunisie ainsi que la marginalisation dont ils sont victimes”, notant un retour à un taux élevé d’analphabétisme chez les enfants, une hausse de l’abandon scolaire et une détérioration des services destinés à cette catégorie.

Le rapport de 2019, un simple exposé de données statistiques

Cherif critique également le rapport de 2019 sur la situation de l’enfance en Tunisie, réduit, selon lui, à un simple exposé de données statistiques sans soulever les vrais problèmes liés à l’enfance, dont, les services sanitaires, psychologiques, éducatifs et sociaux ainsi que la situation socio-économique des enfants et le problème de la pauvreté infantile évoqué dans le rapport de 2020 élaboré par l’Unicef sur la situation des enfants en Tunisie, qui a atteint 21.2%.

Selon les participants, le rapport n’a pas abordé des questions de grande importance comme les enfants bloqués dans les zones de conflits et les enfants tunisiens à l’étranger ainsi que les questions de l’environnement, de l’eau et de l’information en rapport avec l’enfance.

Importance d’avoir de données quantitatives et qualitatives 

Selon Cherif, il n’est pas possible d’élaborer des politiques publiques capables de promouvoir la situation de l’enfance en Tunisie en l’absence de données et d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs qui prennent en compte la réalité de l’enfance dans ses différentes dimensions, aspects et phénomènes”.

Discrimination…

De son côté, l’expert auprès du Forum canadien des confédérations sur l’intégration du genre social, Imed Zouari, a déclaré que le secteur de l’enfance en Tunisie souffre de plusieurs lacunes et de discrimination non seulement de genre mais entre des enfants du même sexe dans leur milieu et région et en fonction de leur âge et du niveau éducatif de leur famille.

Il appelle les autorités chargées d’élaborer les politiques publiques à tenir compte de ces problèmes afin de lutter contre les phénomènes de la violence, de l’immigration clandestine et des tentatives de suicide.

“Bien que les politiques publiques œuvrent à réduire ces disparités, elles s’apparentent plutôt à des solutions partielles qui abordent les phénomènes sans les traiter en profondeur”, a-t-il dit.

Il a ajouté que malgré les acquis réalisés au profit des enfants en Tunisie, le secteur de l’enfance continue de souffrir de plusieurs phénomènes négatifs, appelant à développer une base de données pour une lecture dynamique et en profondeur des différentes mutations en rapport avec l’enfance.

Seulement 0,4% des écoliers vaccinés…

Le rapport de 2019 sur la situation de l’enfance en Tunisie fait état d’un pourcentage élevé au niveau des vaccins de rappel dans les écoles et les lycées, soulignant toutefois que ces vaccins n’ont pas été administrés à 0,4% d’écoliers et à 4% de lycéens.

Il en ressort également de ce rapport, que 2% des enfants n’ont pas reçu de rappel de vaccin contre la rougeole, la rubéole et la troisième dose de vaccin contre la poliomyélite. 10% d’entre eux n’ont pas été vaccinés contre l’hépatite B, selon le rapport.

“Les politiques publiques ne prennent pas en compte les personnes en dehors de la couverture sanitaire, notamment les enfants ayant abandonné l’école et dont le nombre a atteint en 2019, 101 mille 863 enfants”, a ajouté Zouari.

Jardins d’enfants inégalités des chances

Avec la prolifération de jardins d’enfants privés, l’inégalité des chances entre les enfants dans la phase préscolaire se fait de plus en plus sentir en raison de la disparité de la situation matérielle des parents, selon la même source.

Le rapport a, également, évoqué la fréquence de la violence dans les écoles et lycées, le taux élevé de tentatives de suicide (315 chez les filles contre 85 pour les garçons) ainsi que la mendicité et le travail des enfants.

Selon le document, 1 313 enfants ont été victimes du phénomène de la traite des êtres humains en 2019.