Les représentants des organismes professionnels de la filière laitière menacent de limiter leur production à celle du lait non subventionné, et ce du 9 au 15 juillet 2018, mais aussi d’arrêter totalement l’activité de la filière pendant trois jours, à partir du lundi 16 juillet, si le gouvernement refuse d’approuver l’augmentation du prix du lait revendiquée par les professionnels de la filière (producteurs, collecteurs, industriels…).

Réunis au siège de l’UTICA pour faire le point sur la situation de la filière, mardi 3 juillet, ils ont conjointement signé un communiqué dans lequel ils expriment leur étonnement face à ce qu’ils ont qualifié de “désengagement du gouvernement”à honorer les accords conclus lors des séances de travail tenues le 17 avril et le 21 juin 2018 concernant ladite augmentation.

Ils ont aussi fait porter au gouvernement la responsabilité de la détérioration de la situation de la filière et de l’incapacité de ses différents intervenants à poursuivre leur activité en raison de l’accumulation des pertes.

Selon eux, le gouvernement assume la responsabilité des pratiques de monopole et de vente conditionnée ayant marqué le marché ces derniers temps, malgré la poursuite d’un rythme d’approvisionnement normal de la part des industriels.

Les organismes professionnels de la filière laitière expriment, par ailleurs, leur compréhension des inquiétudes des consommateurs quant à cette augmentation, laquelle permettra, toujours selon eux, de préserver l’équilibre de la filière, évitera le recours à l’importation du lait, en devises et à des prix plus élevés et contribuera à maintenir la paix sociale et les emplois.

Le président de la Chambre nationale syndicale des industries du lait, Boubaker Mehri, a précisé que l’augmentation revendiquée est de l’ordre de 180 millimes par litre, répartis à raison de 134 millimes pour l’agriculteur, 46 millimes pour l’industriel et 30 millimes pour le centre de collecte.

Pour lui, cette augmentation permettra de préserver une filière qui emploie 120.000 agriculteurs et bénéficie à 400.000 familles.

De son côté, le président de la Chambre nationale syndicale des centres de collecte, Hamdi Aifi, a rappelé que la filière laitière a été créée depuis 30 ans et qu’elle assure l’autosuffisance en ce produit, depuis plus de 18 ans, bien que les prix du lait sur le marché tunisien soient l’un des plus bas à l’échelle mondiale.

Toujours selon lui, l’agriculteur qui vend actuellement le litre à 766 millimes, supporte un coût variant entre 900 et 1000 millimes par litre. Idem pour le centre de collecte qui encaisse 70 millimes par litre contre un coût de 110 à 120 millimes. Les industriels  supportent eux aussi des pertes de change de l’ordre de 70 millimes/litre, en raison du glissement du dinar.

Rappelant que les prix du lait n’ont subi aucune augmentation depuis janvier 2015, Aifi a estimé que l’augmentation revendiquée par les professionnels de la filière coûtera entre 5 et 6 dinars par mois aux ménages tunisiens mais leur évitera des augmentations beaucoup plus élevées en cas de recours à l’importation.

Les professionnels de la filière laitière présents ont justifié leur revendication par la hausse vertigineuse des coûts de production, en raison de la sécheresse, de la hausse des coûts de la collecte et de la transformation, de la main-d’œuvre, ainsi que de l’emballage et de la distribution.

Ils déplorent en outre les effets de la chute du dinar, de l’augmentation du taux directeur de la Banque centrale, de la hausse des taxes douanières de 15% en moyenne, mais aussi de la prolifération de l’abattage anarchique des bovins et du recours de plus en plus fréquent à la contrebande du cheptel qui est vendu en Algérie (plus de 20.000 vaches laitières, soit près de 9% du cheptel productif).

Ils estiment que la situation actuelle est de nature à pousser les producteurs à renoncer à l’élevage des vaches laitières, menaçant ainsi la survie de toute une filière.

Compte tenu de tous ces facteurs et bien d’autres, les professionnels de la filière lait lancent un appel aux autorités pour réviser à la hausse les prix du lait à tous les niveaux de la filière, à prendre des décisions concrètes en vue de fournir les aliments pour bétail et les subventionner en faveur de tous les éleveurs, à aller dans le sens de la vérité des prix et la garantie de la rentabilité économique de tous les intervenants et à l’instauration d’une bonne gouvernance du secteur.