Les querelles actuelles sur la situation de la BFT (Banque franco-tunisienne) relèvent de l’inconscience et de l’amateurisme. Dans les pays qui se respectent, on n’étale pas de la sorte un dossier bancaire ou financier sans y apporter les solutions. Je rappelle que les audits bancaires et les stress test sur la résistance des banques menés suite à la crise financière internationale de 2007/2008 n’ont pas fait l’objet de publication dans un pays comme la Grande-Bretagne.

Par ailleurs, l’examen par la justice du dossier de la BFT est insuffisant en tant que solution.

En effet, les risques qui planent aujourd’hui sur la place financière et sur la réputation financière du pays sont énormes:

– d’abord, le risque de voir les déposants dans cette banque -heureusement qu’ils ne sont pas nombreux retirer leurs dépôts- ce qui peut mettre le secteur devant un risque systémique ;

– le risque de voir le CIRDI (Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements) tenir compte des déclarations et des informations livrées ici et là surtout quand elles viennent des autorités du pays dans la sentence d’arbitrage qu’il va prononcer ;

– les risques de voir les institutions financières internationales et les agences de notation dégrader encore une fois le rating du pays et noircir davantage leur appréciation du secteur bancaire tunisien ;

– et puis, les pertes enregistrées par cette banque tant qu’elle reste dans cette situation et qui s’élèvent à 100.000 dinars par jour, une situation qui perdure depuis 2011 sans que les autorités monétaires ne prennent les décisions adéquates pour stopper l’hémorragie.

Pour tout cela, je considère que la façon avec laquelle est traité ce dossier relève de l’amateurisme voire de l’inconscience. Pourtant, ce pays a eu à traiter des situations pareilles et a pu s’en sortir. On se rappelle tous de la situation lamentable dans laquelle était la Banque du Sud et comment elle est devenue, en mois de 15 ans, un des fleurons du système bancaire tunisien (Attijari bank). Cela a été également le cas de l’UIB qui a été sauvée alors qu’elle allait droit vers la faillite.

Des exemples qui montrent qu’il n’y a que le travail, la compétence et le courage qui paient, et ce loin de toute exploitation politique ou politicienne.

D’ailleurs, je suis convaincu que s’il n’y avait pas eu l’affaire en justice avec Bouden, les autorités financières auraient traité la question de la BFT et engagé une opération de privatisation de cette banque, seule voie possible pour éviter à l’Etat d’être en conflit avec un investisseur privé de surcroît un grand procédurier. Le processus de privatisation de cette banque a été arrêté au nom d’une logique révolutionnaire qui a mené le pays là où il est actuellement.

Slah Kanoun