Tunisie : L’entrepreneuriat au féminin

Par : Tallel

L’entrepreneuriat se conjugue au féminin, particulièrement en milieu rural. Et pour la femme rurale, c’est le palier suprême de l’émancipation civile et citoyenne.

Quel merveilleux acte citoyen de la part de l’ATUGE (Association tunisienne des Grandes écoles) de consacrer son dernier mardi-débat à la cause de la femme entrepreneure. A cette rencontre se sont ralliées Semia Ounissi, secrétaire d’Etat, ainsi que de nombreuses représentantes d’institutions financières (BAD) et d’ONG.

L’idée générale qui a prévalu est que l’entrepreneuriat est le stade suprême de la liberté de la femme. Pour parachever l’égalité en droits, il lui reste à conquérir la liberté d’initiative.

Retour sur expérience

Conjugué au féminin, l’entrepreneuriat reste un parcours du combattant dans nos régions, et par-delà dans l’ensemble des pays en développement, d’ici ou d’ailleurs, soutiennent les spécialistes de la question. Ce parcours peut être détourné de manière déconcertante.

Ainsi, on rapporte que la Banque mondiale (BM) avait financé un programme d’entrepreneuriat rural au Yémen. Des chèvres avaient été distribuées à des jeunes filles pour les encourage à développer une activité pastorale qui aurait joué un rôle intégrateur pour des petits métiers, notamment autour de la fabrication de fromage. Au final, ce programme, au lieu d’augmenter le revenu des jeunes filles concernées, est parvenu à augmenter la nuptialité, dans la région. Les familles se sont emparées du butin, et avec les chèvres, elles disposaient de quoi organiser les festins de noces. Les chèvres ont terminé leur course en broches, et les jeunettes la bague au doigt.

Ce même effet du droit d’ascendant familial fait qu’en Tunisie, par exemple, ce sont les pères ou les maris qui font main basse sur l’actif de production constitué par les femmes. Le mari s’imposera comme gérant de la société s’il faut en créer une. De même qu’il se sent autorisé à occuper le poste de responsabilité, frustrant ainsi la femme du fruit légitime de son travail. Et la SE d’affirmer que l’entrepreneuriat féminin ne bute pas contre des obstacles techniques mais bien d’ordre culturel et politique. Le gouvernement Chahed aurait monté un dispositif gouvernemental dédié à la question. Plusieurs départements ministériels participent à ce collectif, pour faire jouer les horizontalités et pouvoir traiter de toutes les difficultés qui se présentent avec une certaine réactivité.

Les femmes sont douées pour le business, en milieu rural

Les programmes d’économie solidaire, dans les régions, révèlent un talent remarquable pour le business chez les femmes. Ces programmes sont généralement liés au microcrédit. Mais les spécialistes de la question soutiennent que les projets promus par les femmes peuvent réaliser d’immenses potentialités de croissance. Il est nécessaire, par conséquent, d’offrir des plans de financement plus ambitieux.

Rappelons que la loi de finances 2017 prévoit une dotation de 250 millions de dinars destiné à la promotion de l’entrepreneuriat. Les choses pourraient aller vite, à ces conditions.

Encourager les mini-consortiums

Beaucoup de participantes ont suggéré des formes de regroupement, soit en coopératives, soit en clusters. Enfin, il s’agit de faire résauter les femmes entrepreneures. Organisées en mini-consortiums, elles augmenteraient leur pouvoir de négociation vis-à-vis de tous les tiers, c’est-à-dire les stake holders. Si le fonds budgétaire se donnait pour objectif de les pousser à instituer par elles-mêmes des circuits de distribution de forme éthique, de grandes perspectives de développement se dessineraient. Et, on détiendrait une recette supplémentaire pour aider à l’inclusion et à diffuser la dynamique économique dans les régions.