Loi Macron : ce qui va coincer entre sénateurs et députés

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à Paris, le 12 mai 2015 (Photo : Thomas Samson)

[15/05/2015 14:11:25] Paris (AFP) Travail du dimanche, allongement des stages, simplification du compte pénibilité, transmission des entreprises: les modifications apportées par les sénateurs au projet de loi Macron sur la croissance annoncent de sérieux points de friction avec les députés, pour la suite de son parcours parlementaire.

Une commission mixte paritaire (CMP) composée de 7 sénateurs et 7 députés va tenter le 3 juin d’aboutir à un texte commun. En cas d’échec, l’Assemblée nationale aura le dernier mot.

– TRAVAIL DU DIMANCHE –

Le Sénat a validé le dispositif voté par l’Assemblée nationale élargissant le travail du dimanche. Mais il est allé plus loin en votant un amendement autorisant les magasins de biens culturels à déroger à la règle du repos dominical “en attribuant le repos hebdomadaire par roulement”, ce qui revient à les autoriser à ouvrir 52 dimanches par an. Le gouvernement ne s’y est pas opposé.

Il a aussi exonéré les entreprises de moins de 11 salariés de la plupart des contreparties au travail dominical.

Ce sont les dispositions sur le travail du dimanche qui cristallisent le plus l’opposition des syndicats, qui ont manifesté à plusieurs reprises contre “une généralisation du travail du dimanche”.

– STAGES –

Le Sénat a voté un amendement qui allonge la durée des stages à 12 mois pendant une année de césure, alors que la loi du 10 juillet 2014, dont certains décrets d’application ne sont pas encore sortis, limitait la durée des stages à six mois.

Une mesure dénoncée par la CGT et la CFDT, ainsi que par le syndicat étudiant Unef.

– PÉNIBILITÉ –

Les sénateurs s’en sont pris à la mesure emblématique de la réforme des retraites de 2014 en supprimant la fiche individuelle retraçant l’exposition de chaque salarié aux facteurs de pénibilité, mais aussi en limitant à trois (au lieu de dix) ces facteurs: travail de nuit, en horaires alternants et en milieu hyperbare.

Le compte pénibilité, très décrié par le patronat, fait l’objet de deux missions qui doivent faire des propositions pour simplifier sa mise en ?uvre d’ici au mois de juin.

– DÉLAI DE CARENCE DES FONCTIONNAIRES –

Le Sénat a restauré, via un amendement UMP, les trois jours de carence en cas d’arrêt maladie dans la fonction publique, revenant ainsi sur l’abrogation par le gouvernement actuel dans la loi de finances 2014 de ce dispositif instauré par le gouvernement Fillon en 2011.

“Un énième retour en arrière du Sénat” qui “n’a pas lieu d’être” selon Jean-Marc Canon, secrétaire général de la CGT-fonction publique (1er syndicat), qui trouverait “hallucinant que le gouvernement laisse passer le retour d’une décision qu’il a abrogée”.

– SEUILS SOCIAUX –

Les sénateurs ont fait passer l’actuel seuil de 10 salariés (qui déclenche l’élection de délégués du personnel dans les entreprises) à 20 et celui de 50 salariés, à partir duquel sont notamment obligatoires un comité d’entreprise (CE) et un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), à 100 salariés.

Ils prévoient aussi de fusionner au sein d’une instance unique le CE et le CHSCT.

Le Sénat s’est ainsi immiscé dans le projet de loi sur le dialogue social, débattu à partir de fin mai à l’Assemblée. Ce texte ne prévoit pas de réviser les seuils mais élargit la possibilité de recourir à la délégation unique du personnel (DUP, qui permet de regrouper les instances) à toutes les entreprises de moins de 300 salariés.

– ACCORDS DE MAINTIEN DE L’EMPLOI –

Le Sénat a assoupli le régime des accords de maintien de l’emploi, actuellement réservés aux entreprises en difficulté, ouvrant la voie à des accords de développement de l’emploi dits “offensifs”. Ces accords, qui relèvent d’un régime dérogatoire au droit commun de la négociation collective, permettront aux entreprises de développer la flexibilité interne (dérogation aux 35h, baisse de salaires).

– TRANSMISSION DES ENTREPRISES –

Les sénateurs ont modifié le dispositif Hamon en prévoyant de limiter l’information des salariés aux seuls cas de cessation d’activité sans repreneur.

Ce dispositif, qui établit l’obligation d’informer, deux mois avant, les salariés d’entreprises de moins de 250 personnes de tout projet de cession, était critiqué par le patronat, mais le gouvernement ne comptait pas revenir dessus.