Les taux bas, douloureux pour les entreprises adeptes des retraites complémentaires

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éennes (Photo : Daniel Roland)

[13/05/2015 14:11:28] Francfort (AFP) Les taux bas sont devenus synonymes de gouffre financier pour de nombreuses entreprises européennes, obligées de mettre de côté des milliards d’euros afin de pouvoir tenir les engagements de retraite pris envers leurs salariés.

La politique monétaire très généreuse de la Banque centrale européenne (BCE), avec des taux d’intérêt à un niveau plancher et un programme de rachat massif de dette, a alimenté la baisse des taux sur les marchés obligataires. Cela ne fait pas les affaires des entreprises, souvent grandes, qui proposent à leurs employés d’épargner une partie de leur salaire pour recevoir plus tard une retraite complémentaire. Elles peinent à faire fructifier sur les marchés l’argent qui leur a été confié.

C’est particulièrement vrai en Allemagne, où ce mécanisme est bien ancré. Quelque 17,8 millions de salariés y avaient recours fin 2013, soit 60% environ des personnes pouvant y prétendre, selon des chiffres du ministère du Travail et des Affaires sociales.

Faute de rendements suffisants, les entreprises allemandes se voient contraintes de mettre la main à la poche pour équilibrer leurs comptes.

La compagnie aérienne Lufthansa a ainsi passé 2,5 milliards de provisions supplémentaires sur l’année 2014, alors que le contexte actuel l’empêche de réaliser les rendements de 6 à 7% garantis à ses salariés. Cela a contribué à amputer son bénéfice, divisé par près de six sur un an, à 55 millions d’euros.

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érêt à un niveau plancher et un programme de rachat massif de dette, a alimenté la baisse des taux sur les marchés obligataires (Photo : Daniel Roland)

L’énergéticien EON a lui mis en réserve 2,2 milliards d’euros de plus l’an dernier, et Daimler, le fabricant des voitures Mercedes-Benz, 2,9 milliards d’euros.

Selon une étude de la société de conseil Towers Watson, les engagements comptables pour les retraites d’entreprise des 30 poids lourds de l’indice boursier Dax ont bondi de 25% l’an dernier à 372 milliards d’euros. “Les taux d’intérêt historiquement bas dans la zone euro montrent leurs effets”, en déduit-elle.

La problématique est similaire au Royaume-Uni, où le déficit des retraites complémentaires proposées par les entreprises de l’indice Footsie s’est creusé de 26 milliards de livres en 2014 (36 milliards d’euros), pour atteindre 80 milliards de livres, d’après une étude de la société de conseil JLT EB.

– Dilemme –

D’où un casse-tête pour les entreprises, prises entre la volonté de protéger leurs fonds propres et le désir de fidéliser leur personnel, de plus en plus demandeur de retraites complémentaires alors que, évolution démographique oblige, les perspectives des systèmes publics s’assombrissent.

Pour être attractives, “les entreprises doivent développer une offre de retraite d’entreprise intéressante pour leurs salariés tout en en gérant les coûts et les risques”, souligne Thomas Jasper, directeur des questions de retraite chez Towers Watson.

Pour sortir de l’impasse, Lufthansa tente de négocier avec ses salariés une révision de son système de retraite d’entreprise afin de s’affranchir de promesses chiffrées de rendements.

“Les risques et les coûts du système actuel (…) menacent la viabilité de Lufthansa”, a récemment plaidé Bettina Volkens, directrice du personnel, alors que les négociations sur cette question avec les syndicats achoppent.

Le géant aérien a été confronté à une dizaine de grèves de ses pilotes depuis le printemps 2014. Outre la modification de la retraite d’entreprise, la direction veut revoir à la baisse le système très avantageux de départ en retraite anticipée de cette catégorie de personnel, aux revenus élevés en fin de carrière.

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ées de rendements. (Photo : Christof Stache)

Malgré le défi que constitue actuellement la retraite complémentaire d’entreprise pour certaines sociétés, le gouvernement allemand étudie la possibilité de faciliter encore le recours à ce dispositif pour le rendre notamment plus accessible aux petites et moyennes structures.

Avec moins de 800 euros mensuels de retraite moyenne versée par l’Etat, les salariés du secteur privé sont vivement encouragés à compléter par tous les moyens.