Zone euro : l’action de la BCE ouvre un nouveau chapitre dans la crise

photo_1347017977294-1-1.jpg
ésident de la BCE Mario Draghi, le 6 septembre 2012 à Francfort, en Allemagne (Photo : Johannes Eisele)

[07/09/2012 11:48:42] BRUXELLES (AFP) L’annonce par la Banque centrale européenne d’un nouveau plan de rachat d’obligations d’Etat a réjoui les analystes, qui lui décernent un satisfecit vendredi, mais aucun ne considère que la crise de l’euro est terminée pour autant, car plusieurs interrogations demeurent.

Les instruments sont-ils en place pour que le programme fonctionne?

Le programme d’achats d’obligations d’Etat par la BCE sur le marché secondaire s’accompagnera obligatoirement d’une action du fonds de secours de la zone euro, le FESF/MES, sur le marché primaire, en échange d’un programme strict d’ajustement budgétaire imposé aux Etats bénéficiaires.

Or l’existence même du MES, le fonds permanent qui doit succéder au FESF dans les prochains mois, est suspendue à la décision de la Cour constitutionnelle allemande, attendue le 12 septembre. Le MES ne peut en effet voir le jour s’il est privé de son premier contributeur, l’Allemagne.

Les analystes ne sont toutefois pas alarmistes, soulignant que le MES est un mécanisme très proche du FESF, auquel la Cour constitutionnelle allemande avait donné son feu vert.

Les Etats de la zone euro vont-ils jouer le jeu?

Le succès des actions de la BCE “dépendra de manière cruciale de la volonté des pays en difficulté de demander ou non de l’aide”, souligne Howard Archer, d’IHS Global Insight.

photo_1347018383210-1-1.jpg
ège de la BCE, à Francfort, le 6 septembre 2012 (Photo : Johannes Eisele)

Tous les yeux sont désormais tournés vers l’Espagne, dont la demande d’aide est attendue dans les prochaines semaines, vraisemblablement d’ici au sommet européen des 18 et 19 octobre.

Mais elle pourrait être réticente à accepter un plan qui signifiera pour elle une importante perte de souveraineté sur ses finances publiques. Certains parlent même d’une véritable mise sous tutelle économique.

L’Espagne veut connaître les conditions avant de demander un plan de sauvetage, a affirmé vendredi le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel García Margallo, en marge d’une réunion avec ses homologues européens à Chypre.

De la réussite d’un éventuel programme pour l’Espagne pourrait dépendre l’avenir de l’Italie: si tout va bien, elle pourrait éviter d’avoir à son tour à demander un programme d’aide.

Quand au Portugal et à l’Irlande, tous les deux sous programme d’aide, ils pourront bénéficier de la nouvelle politique de la BCE après leur retour sur les marchés, à condition de ne pas dévier du programme qui leur est imposé.

L’annonce de la BCE n’intervient-elle pas trop tard?

A long terme, c’est la santé économique de la zone euro qui déterminera la confiance des investisseurs. Or, les programmes d’ajustements déjà en place ont contribué à précipiter les pays de l’union monétaire dans la récession.

L’agence européenne de statistiques Eurostat a confirmé jeudi que le PIB de la zone euro avait reculé de 0,2% au deuxième trimestre, et la tendance devrait se poursuivre au moins jusqu’à la fin de l’année. C’est pourquoi beaucoup d’analystes estiment que la BCE aurait dû également annoncer jeudi une baisse de ses taux d’intérêts pour relancer la croissance.

Y a-t-il d’autres aléas?

La crise que traversent l’Espagne et l’Italie “est loin d’être le seul problème des dirigeants européens”, soulignent les analystes de Barclays, qui rappellent que “la situation de la Grèce reste critique” et que “les énormes différences d’opinion entre les électorats des différents pays sont très importants, étant donnée la nécessité de prendre des décisions politiques difficiles et de parvenir à des compromis dans les prochains mois et les prochaines années”. Des élections législatives auront lieu mercredi aux Pays-Bas, en attendant notamment qu’Italiens et Allemands retournent aux urnes en 2013 pour choisir leurs dirigeants, ce qui pourrait changer la donne politique en zone euro.

photo_1347018227087-1-1.jpg
ésident de la Bundesbank, le 18 novembre 2011 (Photo : Daniel Roland)

Jens Weidmann aurait-il raison ?

Le gouverneur de la banque centrale allemande a récemment assimilé le rachat illimité d’obligations d’Etat par la BCE au “financement des Etats par la planche à billets”, qui risque de faire l’effet d’une “drogue” pouvant rendre les Etats “accro”.

La BCE, soulignent les experts, n’a pas vraiment les moyens d’obliger les pays pour lesquels elle interviendra à respecter leurs promesses en matière d’ajustements structurels. “Le risque demeure que des gouvernements de grands pays rétropédalent par rapport aux réformes”, souligne Marco Valli, d’UniCredit.

Mais pour lui “c’est indéniablement une bonne nouvelle que ce soit désormais le seul risque que doivent anticiper les marchés”.