Le “plombier polonais” immigré à Londres rentre au pays

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à Londres le 10 novembre 2011. (Photo : Ki Price)

[23/11/2011 10:53:45] LONDRES (AFP) Marcin Grodski, parti plein d’espoir pour travailler au Royaume-Uni en 2002, comme un million de ses compatriotes en dix ans, se prépare à rentrer en Pologne non sans amertume, dans le creux de la vague économique.

Il a 30 ans quand il débarque à Londres, deux ans avant l’adhésion de la Pologne et de sept autres pays de l’ex-bloc de l’Est à l’Union européenne, qui s’est traduite par une plus grande liberté de mouvement et par le départ de nombreux travailleurs de l’est vers l’ouest de l’Europe.

En 2005, le débat sur le traité constitutionnel européen fait rage en France et les opposants au “oui” s’emparent d’une supposée invasion de “plombiers polonais” pour dénoncer le “dumping” social qui menacerait l’Union. L’expression fait flores, et est même reprise non sans humour par l’office du Tourisme polonais pour vanter les charmes de ses citoyens…

Comme beaucoup de ses compatriotes, Marcin Grodski commence tout en bas de l’échelle au Royaume-Uni. Il se fait homme-sandwich sur les artères commerçantes de Londres pour draguer le chaland vers les grandes enseignes d’Oxford Street, et apprend l’anglais à ses heures perdues.

Il espère alors “avoir une vie décente”, faire des études et envoyer de l’argent à sa famille restée à Lomza, dans l’est de la Pologne.

Les débuts sont prometteurs: Marcin se lance dans la construction, “un choix naturel pour un Polonais”, dit-il, et se hisse au niveau de contremaître.

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à Londres le 10 novembre 2011 (Photo : Ki Price)

Optimiste, il crée alors sa propre entreprise de construction. “Tout s’est bien passé pendant les six à huit premiers mois et brutalement tout s’est effondré”, témoigne-t-il.

C’est la crise financière de 2008. Un de ses clients fait faillite et lui laisse une ardoise de 20.000 livres (23.500 euros). Marcin doit s’acharner pour se refaire une santé financière.

Il réussit à vivre assez confortablement pour envoyer de l’argent en Pologne, aidant à financer l’éducation d’une jeune soeur, mais aujourd’hui, il ne pense qu’au retour.

“Je ne laisse rien derrière moi “

“Ca a été l’expérience de ma vie, c’est un beau pays, mais après neuf ans, je n’ai pas de quoi m’acheter un logement à Londres, et je pense que je ne peux pas rester plus longtemps”, explique-t-il.

“C’est triste à dire, mais la qualité de vie est bien meilleure en Pologne. Si vous avez un bon travail, vous pouvez vivre dignement. Ici, vous pouvez tout juste prétendre occuper une chambre dans un appartement en colocation.”

En Pologne, la construction connaît un plein boom, fait-il valoir. “Tous les Polonais que je connais, moi compris, ont travaillé dur dans le but de construire leur maison au pays” dit-il. “On a construit des routes et des équipements publics pour accompagner le mouvement. La Pologne toute entière est un vaste chantier”, mais lui n’a pas sa maison.

S’il espère décrocher un travail dans une grande entreprise à son retour, en faisant valoir son expérience britannique, il craint d’être sous-qualifié.

“Les trois quarts des gens que je connais sont ingénieurs. Moi, je suis sous-qualifié, et je pense reprendre des études pendant un an ou deux”, avoue-t-il.

Son projet de retour s’est accéléré avec la rupture avec sa fiancée polonaise, quelques mois avant le mariage. “Je ne laisse rien derrière moi”, constate-t-il.

Marcin est loin d’être le seul à rentrer. Selon Carlos Vargas-Silva de l’Observatoire des migrations à l’université d’Oxford, le nombre de migrants polonais a considérablement décru ces trois dernières années. Quelque 530.000 Polonais vivent aujourd’hui en Grande-Bretagne, estime-t-il.

Marcin connaît au moins quatre de ses compatriotes qui projettent comme lui de rentrer au pays. “Mon idée, c’est de mettre sur pied une entreprise pour créer des jobs bien payés pour des gens comme moi, à leur retour du Royaume-Uni. Parce qu’au final, on va tous rentrer”.