Paysage audiovisuel tunisien : Le téléjournal a-t-il changé?

Le journal télévisé d’Al Watanya 1 est trop long et certaines de ses rubriques
gagneraient à être retravaillées pour épouser les standards professionnels.


Il est 20h3, ce mardi du mois d’avril 2011. Toutes les chaînes de télévision
satellitaire, qui programment un journal à 20 heures, sont passées à autre
chose. Sauf Al Watanya 1 dont le journal dure jusqu’à 21 heures. «Un format un
peu bizarre», note un universitaire spécialisé en journalisme, qui ajoute que
«le journalisme est un métier dans lequel les professionnels sont jugés sur leur
capacité à faire court et à choisir parmi le flot des informations celles qui
doivent être servies au consommateur».

Il y aurait trop de «fioritures» et de «remplissage». Certes, la période est
«cruciale» et «il y a beaucoup d’événements à couvrir et il faut donner la
parole à tous», mais l’exagération est bel et bien installée: «il y a des
reportages qui méritent d’être écourtés et des interventions sur le plateau ou
au téléphone qui peuvent être retravaillées pour qu’on aille à l’essentiel. Les
téléspectateurs ne peuvent “supporter“ encore cette manière de faire».

Pourquoi, par ailleurs, avoir opté pour deux présentateurs alors que la plupart
des chaînes sinon toutes ont choisi de faire présenter le journal par deux
journalistes? «Est-ce pour singer Al Jazeera? Celle-ci a, toutefois, choisi de
faire présenter ses principaux journaux par un binôme logique: un homme et une
femme, alors que ce n’est pas toujours le cas sur Al Watanya 1.

«Il suffit, en outre, de zapper pour se rendre compte que dans tous les journaux
diffusés sur toutes les chaînes du monde entier, les informations sont
présentées dans un seul studio et non dans deux ou trois. Pourquoi la caméra se
déplace-t-elle dans la salle de rédaction pour présenter les rubriques
«économie» et «sport»? Les responsables du téléjournal veulent-ils réinventer le
journalisme? Le fait qu’ils adoptent des pratiques singulières montre qu’ils ont
tort. De plus, les modèles ne sont jamais respectés. Ainsi, les rubriques
«économie» et «sport» sont tantôt présentées à partir du studio, tantôt à partir
de la salle de rédaction».

«S’il est indéniable que les journalistes sont plus libres -et cela se ressent
bien-, les reportages et les nouvelles ne sont que rarement attrayants. Il n’y a
pas encore la notion de ce que les Anglo-saxons appellent une «story» (une
nouvelle que l’on raconte comme une histoire). A l’instar des modèles d’écriture
comme le Wall Street Journal Formula qui personnalisent l’information et créent
une mise en scène de l’information».

Cela serait trop facile!

Pour notre interlocuteur, cette situation devra nécessiter une double action: au
niveau de la définition d’un format et de la formation des journalistes.

Il ne faut pas, cependant, accabler les journalistes de tous les maux. Cela
serait trop facile! Par exemple, la mise en place d’un format nécessite des
préalables comme une large veille pour suivre les évolutions qui se dessinent
dans les paysages audiovisuels mondiaux. Ou comme le suivi quasi quotidien des
audiences et des attentes et goûts des publics de la radio et de la télévision.

Or, ces préalables n’existent pas. En résumé, les professionnels n’étaient pas
dotés des moyens pour assurer les progrès nécessaires. Sans oublier les
pratiques qui consistaient à manifester que peu d’égard pour les professionnels
et qui se manifeste par divers moyens.

Pour ce qui est de la formation, force est de constater que, et malgré
l’existence d’une formation de base et continue en journalisme, celle-ci est
appelée à se développer. Les priorités sont à revoir et les programmes de
formations à affiner.

Le training devra accompagner le métier de journaliste d’une manière constante
tant les évolutions sont aujourd’hui rapides. Et personne ne peut échapper à
cette nécessaire évolution, quels que soient son grade et sa fonction.

Bien plus, la formation doit être assurée dans l’optique d’un «encadrement» des
jeunes journalistes, à leur entrée dans la profession, par leurs pairs bien plus
expérimentés. Comme cela se fait dans de nombreuses professions.

«Pourtant, il y a une vingtaine d’années –peut être moins- l’encadrement faisait
partie intégrante de la profession journalistique. Et beaucoup citent encore
dans les rédactions le nom de certains ténors qui ont contribué à former des
générations de journalistes».