Tunisie : Comment le clan Ben Ali-Trabelsi a retardé le développement du transport collectif

Qu’il s’agisse du réseau ferroviaire ou du métro, le transport collectif a
souffert, sous le règne du clan

Ben Ali-Trabelsi
, d’une réelle négligence notamment pour les régions de
l’intérieur en ne favorisant pas leur désenclavement. Au contraire, le transport
privé a été encouragé. Pour permettre au clan de se remplir les poches.

L’information a été placée à la Une du quotidien La Presse du jeudi 7 avril
2011. Elle annonce un voyage inaugural par train entre Tunis et Le Kef qui a été
assuré le lundi 5 avril après … 19 ans d’interruption.

Une information qui met au devant de l’actualité la question du transport
collectif en Tunisie. Tant ce dernier a été délaissé, aux dires de spécialistes
de la planification, par rapport au transport individuel pour permettre «aux
proches de Ben Ali de se remplir les proches».

Pour notre interlocuteur, un doctorant qui travaille sur le sujet depuis deux
ans, «la Tunisie a raté avec cette “politique“ des chances réelles de
désenclaver les régions de l’intérieur». Répétant cette phrase de l’explorateur
britannique Henry Morton Stanley, qui s’adressait ainsi au roi belge Léopold II,
qui a colonisé, à la fin du XIXème siècle, le Congo: “Sans le chemin de fer, le
Congo ne vaut pas un penny”.

Le retard des régions de l’intérieur, d’où est partie la révolution du 14
janvier 2011, est aussi dû à la faiblesse de l’infrastructure des transports
collectifs. En témoigne le fait que le réseau ferroviaire suit pour l’essentiel
une ligne qui part de Tunis à Gabès.

«Certes, ajoute notre interlocuteur, le train va jusqu’à Gafsa, à Métlaoui, à
Jendouba, à Tataouine,… Mais dans quelles conditions: les rames ne sont pas
confortables et les trains ne sont pas rapides».

Beaucoup de villes de l’intérieur ne sont pas couvertes par le train. Ainsi, une
ville qui occupe une position centrale comme Kairouan n’est pas reliée au réseau
ferroviaire; le train n’a pas retrouvé le chemin de la ville depuis les
inondations de l’automne 1969.

«Rien n’a été fait depuis pour le relier la capitale des Aghlabites au réseau
ferroviaire qui est à 60 kilomètres de là à Enfida ville. La volonté politique
n’y était pas. Il a fallu une année et demi pourtant pour venir à bout de
l’élargissement de l’autoroute Tunis-Hammamet, certes nécessaire, mais qui a
servi à faciliter les déplacements du président déchu, Ben Ali», commente notre
interlocuteur.

A propos d’autoroutes, le tracé suit également, et pour l’essentiel, la côte. De
Bizerte à Sfax.

Des membres du clan mettent la main sur des concessionnaires automobiles

En agissant de la sorte, le régime Ben Ali a favorisé la côte par rapport aux
régions de l’intérieur. En excluant du développement beaucoup d’entre elles.
«Les investissements s’en détournent ainsi que les touristes étrangers».

«Le développement du métro a, par ailleurs, été retardé. Ainsi des projets n’ont
pas été engagés alors qu’ils pouvaient assurer un décollage de l’activité
économique. Comme celui du métro dans la ville de Sfax ou encore celui de
Tunis-M’hamdia».

Au contraire, le transport privé a été encouragé. S’il est certain que tout
Tunisien a droit d’acquérir un véhicule particulier, il est aussi à faire
remarquer que la politique de la voiture populaire, qui n’en est plus une, a été
initiée, en 1995, en vue de favoriser l’enrichissement du clan Ben Ali-Trabelsi.

Petit à petit, des membres du clan mettent, en effet, la main sur des
concessionnaires automobiles: Ford pour Belhassan Trabelsi et Volkswagen, Kia et
Porsche –excusez du peu!- pour Sakhr Materi, éliminant, en un tour de main, un
des opérateurs: les industries mécaniques maghrébines (IMM), une entreprise
installée à Kairouan, et la

STIA
(Société tunisienne d’industries automobiles) qui faisaient du montage
de véhicules.

Le clan Ben Ali a mis en place, pour ce faire, des moyens de financement
associant les banques, les sociétés de leasing et les caisses sociales
participant à un endettement des ménages.