Rien ne va plus entre Eurotunnel et Eurostar

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ée du tunnel sous la manche exploité par la société Eurotunnel à Coquelles dans le nord de la France, le 13 juillet 2006 (Photo : Denis Charlet)

[26/12/2009 14:46:45] PARIS (AFP) Une semaine après les pannes qui ont paralysé le trafic dans le tunnel sous la Manche, la guerre est déclarée entre la compagnie ferroviaire Eurostar et Eurotunnel, l’exploitant de l’ouvrage, qui s’accusent mutuellement de négligence et de désinformation.

Dans la nuit du 18 au 19 décembre, cinq Eurostar ont été bloqués dans le tunnel en raison d’une panne liée aux intempéries. Plus de 2.000 personnes, coincées sans eau, ni nourriture, ni information, ont mis jusqu’à 16 heures pour faire le voyage, suscitant une vive polémique et un rappel à l’ordre du président Nicolas Sarkozy.

Le trafic transmanche a été paralysé pendant trois jours et il ne reprend que lentement.

Depuis, la querelle s’envenime entre Eurostar et Eurotunnel. Les deux sociétés n’ont pas le même avis sur les causes de la panne et, surtout, la première reproche à la seconde ne n’avoir pas réagi “comme il convenait” alors que des milliers de passagers se morfondaient en pleine nuit par plusieurs dizaines de mètres de fond.

La première salve a été tirée immédiatement par Eurostar qui a fait valoir qu’Eurotunnel était responsable de ce qui se passe dans le tunnel.

Et de souligner qu’Eurostar n’était pas le seul à avoir eu des problèmes cette nuit-là: une navette d’Eurotunnel transportant des voitures serait tombée en panne, de même qu’un train de marchandises de la Deutsche Bahn… “Faux”, rétorque l’exploitant, qui parle de “désinformation”.

La riposte est venue le jour de Noël. Eurotunnel a notamment accusé le transporteur de ne pas avoir respecté toutes les procédures de secours et de ne pas avoir relayé les informations aux passagers.

“Nous avons le sentiment qu’ils auraient plutôt dû nous remercier” de l’aide apportée quand les trains étaient bloqués, explique un porte-parole d’Eurotunnel.

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à Bruxelles, le 22 décembre 2009 après 3 jours de suspension de service (Photo : Christophe Legasse)

“Eurotunnel devrait laisser les experts rendre leurs conclusions”, a rétorqué en pleine nuit la direction d’Eurostar, dans un communiqué.

Lesdits experts, le vice-président de Transport for London (TfL), Christopher Garnett, et l’ingénieur français Claude Gressier ont étés chargés lundi d’une “enquête indépendante” par Eurostar. Leur mission a été entérinée par la Commission intergouvernementale au tunnel sous la Manche (CIG) et les gouvernements français et britannique.

Mais ils sont contestés: “Cette commission indépendante est composée d’un ancien de la SNCF, maison mère d’Eurostar, et d’un type qui s’est fait virer d’Eurotunnel”, souligne un familier du dossier.

Claude Gressier a travaillé à la SNCF de 1994 à 1998. Quant à M. Garnett, “il n’est pas parti en bons termes avec Eurotunnel”, confirme sobrement l’exploitant de l’ouvrage.

Les experts ont plusieurs différends à traiter. Pour Eurostar, c?est au gérant de l’infrastructure d?assurer la communication lorsque un train est coincé dans le tunnel. “La communication à l’intérieur des trains, en aucun cas, ne dépend de nous”, répond Eurotunnel, qui affirme avoir été “bien entendu” en contact permanent avec les personnels des trains.

Eurostar rappelle également que l’évacuation des passagers est du ressort d’Eurotunnel. Ce dernier ne dit pas le contraire, mais reproche à Eurostar des manquements à la procédure: les passagers ont quitté les trains avec leurs bagages et leurs cadeaux de Noël, ce qui a compliqué –et fortement retardé– la manoeuvre.

Les relations étaient déjà tendues entre eux: Eurotunnel a publiquement regretté la suppression de trains pour cause de crise, appelant de ses voeux l’arrivée de compagnies concurrentes pour mieux rentabiliser son ouvrage.

Et le gestionnaire du tunnel se veut “concurrent de la SNCF” en se développant dans le fret.