Comme par enchantement, depuis l’acte de rupture du 25 juillet 2021, les bonnes nouvelles se succèdent sur certaines entreprises publiques qui traînaient un déficit global de 7 milliards de dinars.

Par Abou SARRA

En effet, en l’espace de moins de deux mois, on a appris que la Régie nationale des tabacs et allumettes (RNTA), menacée depuis des années de privatisation, a non seulement renoué avec les bénéfices, mais également serait disposée à renflouer les caisses de l’Etat.

On a également appris que la société « Les ciments de Bizerte » vient à son tour de reprendre le chemin des bénéfices. Les états financiers intermédiaires de la société arrêtés au 30 juin 2021 font ressortir un résultat net semestriel bénéficiaire de 1,3 million de dinars (MDT) contre une perte nette de 6,9 MDT au cours de la même période de 2020.

Toujours dans cet ordre d’idées, des décisions auraient été prises pour accélérer la restructuration de l’iconique Société tunisienne de sidérurgie «El Fouledh».

Une réunion régionale (Bizerte) s’est tenue, le 17 septembre 2021, à cette fin, ayant groupé des représentants de l’administration (gouverneur), la direction d’El Fouledh (PDG), les syndicats et l’inspection du travail.

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Enjeu de restituer le rôle régulateur d’El Fouledh

Ces décisions, d’une extrême d’urgence, ont pour but de restituer à El Fouledh son rôle régulateur dans l’approvisionnement du marché national.

Elles interviennent à un moment où, par l’effet d’une « entente maléfique » entre le cartel des fabricants privés de fers de construction et de contrebandiers sans foi ni loi, le prix du fer a augmenté à deux reprises cette année : une première fois au mois de janvier (14%) et une deuxième au mois de mars (9,5%). Une troisième augmentation de 12% était programmée pour le mois d’août 2021 mais elle fut annulée par la présidence de la République en raison des surcoûts qu’elle aurait pu générer sur tous les projets engagés dans le domaine de la construction.

Est-il besoin de rappeler que ces spéculateurs ont mis à profit, ces dernières années, le recul de la production de fer de construction par la société El Fouledh, pour augmenter de 25% en moyenne par an le prix de ce matériau de construction, entraînant une hausse vertigineuse du coût de construction publique et privée.

Leur technique est toujours la même : ils créent des pénuries artificielles avant de mettre la pression sur l’administration pour augmenter les prix.

Face à l’ampleur de ces pratiques antiéconomiques des spéculateurs, et sou l’effet des décisions de l’après-25 juillet 2021, il a décidé de reprendre les choses en main et de réguler ce marché stratégique en accélérant la restructuration d’El Fouledh.

Volonté politique pour accélérer la restructuration d’El Fouledh

Les révélations faites lors de la réunion tenue à cet effet (le 17 septembre 2021) illustrent de manière éloquente la volonté politique d’aller dans cette direction, de réhabiliter cette entreprise publique et d’abandonner la recherche d’un partenaire stratégique pour sa relance.

Dans cet esprit, le nouveau gouverneur de Bizerte, Samir Abdellaoui (nommé par Kaïs Saïed), a souligné la dimension stratégique nationale de la société El Fouledh qui recèle, selon lui, des niches porteuses (production de l’oxygène médical et d’autres produits) pouvant dynamiser l’activité socioéconomique dans la région.

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Pour sa part, Mounir Makhlouf, PDG d’El Fouledh, a fait une révélation tonitruante. D’après lui, le coût de l’investissement de la restructuration de la société, soit environ 295 MDT, équivaut le coût d’importation en devises de fer de construction. Cet investissement va aider l’entreprise publique à produire 300 000 tonnes de fer, soit le total des besoins du pays en ce matériau de construction.

Pour sa part, la partie syndicale a tenu à rappeler que le plan de restructuration d’El Fouledh a été approuvé par l’administration et la centrale syndicale, seulement faute de volonté politique, ce plan n’a pas pu voir le jour.

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Moralité de l’histoire : toutes les parties semblent déterminées à restructurer El Fouledh, à maintenir son statut d’entreprise publique et à valoriser son potentiel.

Pour mémoire, le plan de restructuration de cette société comporte les composantes suivantes : l’assainissement financier, social et foncier ; la restructuration interne de l’entreprise ; l’augmentation de la production ; le lancement de nouveaux produits dont l’oxygène à usage médical et l’approvisionnement des privés en fer de construction.

Et pour ne rien oublier, le retard qu’a pris ces dernières années, la mise en œuvre du plan de restructuration d’El Fouledh qui comporte 6 filiales et s’étend sur 80 000 hectares a généré un recul de la production de 40%, une baisse des ventes de 60% et une diminution du chiffre d’affaires de 29%.

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