Le déconfinement (DC) est une phase où le confinement est remplacé par des mesures de contrôle de l’épidémie mieux supportable et moins coûteuse. Dans cette phase, on va cohabiter avec le virus après une période de pic, c’est dire son importance.

Par Rafik Boujdaria, Professeur en Médecine

Au préalable, et avant de décréter le DC, il faut réunir trois conditions :
1/ Indices épidémiologiques à la baisse consolidée (R0, flow sortant)
2/ Augmentation du nombre tests/jour (rapide. PPP)
3/ Ciblage précis des effets sociaux de l’épidémie (urgence++).

Un DC n’est jamais figé, on doit rester sur une stratégie évolutive (teste, observe et décide), rien n’est définitif, tout est dépendant des données épidémiologiques. Le plus important est la communication pour assurer un maximum d’adhésion à un nouveau mode de vie avec des libertés conditionnées qui peut nous emmener au mois d’octobre (immunisation totale ou la vaccination).

Ce qu’il ne faut pas faire pendant le DC : reprendre une vie normale, baisser la garde et oublier le danger d’une deuxième vague.

Une stratégie DC doit réunir les éléments suivants :
1/Maintenir les mesures barrières, la distanciation sociale, et le port de masque sera obligatoire.
2/Monitorage épidémiologique précis par délégation, avec une plateforme numérique dédiée au suivi citoyen.
3/Perfectionnement de l’isolement des personnes testés positifs et ceux qui sont susceptibles de faire une forme grave (centres intermédiaires de soins).

4/Confinement adapté pour personnes âgées et aux plus démunis.

5/ Protection des populations à risque : prisons, migrants subsahariens, ceux qui vivent en institutions.

6/Restauration de la capacité hospitalière pour les malades non Covid-19.

7/ Elargir les dispositions d’accès de soins de proximité, dispensaires et hôpitaux niveau2, 10h par jour et délocalisation de certaines consultations de spécialités avec des rendez-vous rétablis.

8/ Préserver le personnel soignant : équipements de protections individuelles.

9/ Politique stricte de contrôle sanitaire aux frontières.

10/ Adapter le temps de travail en deux postes intermittents et en deux plages successives pour avoir quatre équipes, et compenser par le télé travail.

11/Assurer un transport public et une mobilité sans risques, par une fréquence élevée de passage et une fréquentation basse, une distanciation dans les voitures de métro et dans les bus avec port de masques obligatoire.

12/ Mettre un dispositif de soutien aux endeuillés du Covid19.

13/Réguler l’accès aux marchés municipaux, aux grandes surfaces et aux lieux de prière.

14/Soutenir la recherche médicale nationale (vaccin et sérothérapie) et assurer une production pharmaceutique Covid19 stratégique.

15/ Assurer une communication et une information qui touchent toutes les franges de la population.

Un bon DC est celui qui empêche la survenue d’une deuxième vague, qui endigue le retour à une situation épidémiologique de gravité croissante et évite le remplissage des services de réanimations de nouveau. Pour le DC si la question “quand?” est la plus naturelle, la réponse à la question “comment?” est la plus importante pour éviter un retour à la case départ.

Il faut œuvrer avec tous les acteurs de la société Tunisienne pour une adhésion individuelle et collective. La sécurité est aussi la reprise de la chaîne d’approvisionnement alimentaire et pharmaceutique, la relance d’une partie de l’activité productive et la gestion de la crise
sociale qui est la deuxième urgence.

Un DC doit évoluer en phases intermittentes de deux semaines sur un mode stop & go et doit être progressif, s’adapter à notre condition pour s’assurer de l’adhésion et du contrôle de la situation.

Pr Rafik Boujdaria