Pour la deuxième année consécutive, la Tunisie finit la course dans la moitié la moins performante de la compétition, à la même place. Arrivée 87ème sur un total de 141 pays, dans le classement global de la compétitivité, la Tunisie ne tient pas son rang, pas plus qu’elle n’est à sa place, hélas !

Mercredi 9 courant à l’IACE, partenaire attitré du Forum de Davos, a eu lieu la présentation du rapport mondial de la compétitivité globale pour l’année 2019. Autant l’annoncer tout de go : on y fait pâle figure. Evanouie, toute cette ambition d’émergence qui nous a si longtemps bercé. Le pays fait du surplace car il est 87ème, pour la deuxième fois consécutive, du classement général. Ouille, ça fait mal ! Ainsi donc, 2019 aura été une année blanche, au plan économique, “une année presque pour rien”, dira Taieb Bayahi, président de l’IACE.

La méthodologie de l’indice

En 2019, les piliers et les composants de l’indice, rappellera Mejdi Hassen, directeur exécutif de l’IACE, n’ont pas changé. Cela valide, par conséquent, la comparabilité des performances des pays.

Rappelons que les quatre piliers de l’indice portent sur la préparation à la IVème révolution industrielle, comprenez la digitalisation. Viennent ensuite le capital humain, l’environnement et le social.

Le calcul de l’indice comporte 130 points. Il faut savoir que 70% des renseignements qui servent à la préparation du rapport, dites “Hard Data“, émanent des institutions internationales, tels la BM ou le FMI, et que les autres 30% proviennent du pays concerné. Les informations qui émanent de Tunisie sont collectées auprès d’un groupe de 89 chefs d’entreprise, choisis parmi quatre secteurs différents, à savoir l’industrie manufacturière et l’industrie non manufacturière, l’agriculture, et enfin les services.

Rappelons également que le total des chefs d’entreprise consultés pour l’élaboration du rapport est de 30.000 pour l’année courante.

Deux nouveaux éléments sont entrés en jeu, pour avoir été pris en considération dans l’élaboration du rapport, à savoir la transparence budgétaire et les grands choix de l’orientation économique du gouvernement. Ce sont deux signaux qui renseignent sur les orientations économiques majeures du pays.

Le top 5 du classement est occupé par les mêmes pays pour la deuxième année de suite. Ce peloton d’élite a toutefois enregistré une modification du classement de certains pays. Singapour, une micro-géographie, bouscule tous ses suiveurs et se met en pole position. Elle est suivie, sans surprise, par les USA, puis une troisième exception géographique, Hong Kong. Enfin la Hollande est 4ème –qui est tout de même le premier investisseur aux Etats-Unis d’Amérique. La Suisse est à la cinquième place.

La Tunisie redresse, timidement, son score

Ce qu’il faut savoir, concernant l’approche du rapport, c’est que chaque pays est noté par un score. La Tunisie a à peine relevé le sien, passant de 55,6 en 2018 à 56,4 en 2019, soit une imperceptible augmentation de 0,8 point.

La Tunisie est deuxième du Maghreb, derrière le Maroc lequel se classe 75ème au niveau mondial. Elle est 9ème pour la deuxième année consécutive dans la région MENA et 4ème en Afrique, derrière l’Afrique du Sud, le Maroc et les Seychelles.

Tout en ayant fait du surplace sur le classement général, le pays a quand même bougé certaines variables. Mais les résultantes ont été les mêmes. Pour le rang, la Tunisie tout en conservant 9 composantes, a amélioré 29 autres et a vu les 60 autres baisser. Pour le score, 60 variables ont augmenté, 12 sont restées à l’identique et 36 ont baissé. Hélas les moyennes sont restées quasi inchangées.

Toutes nos contreperformances ont été épinglées

Ce rapport n’a épargné aucune de nos contreperformances. Naturellement elles nous ont toutes pénalisés. Ainsi en est-il pour la catégorie “Infrastructure“ de l’état des routes, de celle du transport aérien et maritime.

Nous avons été pénalisés pour le haut niveau d’inflation où l’on occupe la 127ème place. L’état de notre stabilité macroéconomique est sévèrement apprécié. La qualité de nos compétences est durement notée car nous régressons de 100%. Et en la matière, le décrochage scolaire avant la neuvième année, qui indique un seuil légal, nous a rudement desservis.

L’état des marchés des biens et services, autant que le marché de l’emploi nous renvoie également aux dernières places. Le retard des réformes du marché de l’emploi est perçu comme un bogue (francisation du mot anglais “bug“) social.

Nous avons régressé en matière de financement des PME, et le secteur financier est mal positionné. Nous reculons en matière de solidité financière des banques et pour le ratio de fonds propres des banques. Toutefois, l’exception vient du secteur IT et c’est le bon score de ce secteur qui a empêché que le pays dégringole. Nous tenons donc à un fil, celui des IT.

Une feuille de route, fortuite

Alors, tous ceux qui entretiennent un vague espoir d’une quelconque reprise économique seront déçus. Ce rapport, objectivement vient nous rappeler que nous vivons dans un état stationnaire de quasi immobilisme. Pour avancer, le pays a besoin de réformer et c’est bien ce que nous avons évité de faire depuis 8 ans.

Le temps nous est compté au regard de variables autrement plus menaçantes dont l’endettement et le déficit commercial lesquels atteignent de sommets insoutenables. Donc, mettre en avant la remontée du dinar comme seul indicateur de bonne santé de l’économie relève de la naïveté.

Cependant, ce rapport tombe à point nommé, car la Tunisie devra nommer un nouveau gouvernement, sous peu. Il disposera de ce fait d’une feuille de route tout à fait fortuite, pour guider son action.