Déshabiller Pierre pour habiller Paul. C’est ce que les banques tunisiennes font déjà et ce qu’elles vont continuer à faire, pour Dieu seul sait combien de temps.

L’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a adopté, mercredi 24 avril 2019, le projet de loi portant approbation du prêt syndiqué signé le 27 mars 2019 par le ministère des Finances et douze banques de la place au profit du budget de l’Etat, pour un montant de 356 millions d’euros (1,2 milliard de dinars).

C’est le deuxième «coup de pouce» que les banques tunisiennes accordent à l’Etat en moins de deux ans. En effet, en juillet 2017, treize établissements de la place avaient mis la main à la caisse pour prêter aux pouvoirs publics 250 millions d’euros.

D’ailleurs, Jalloul Ayed n’est pas tendre avec le système financier en général quant à sa défaillance dans le financement de l’économie. Et encore plus avec les banques tunisiennes. «Elles ne financement pas tellement les petites et moyennes entreprises qui ne reçoivent que 20% des crédits bancaires alors qu’elles représentent 95% du tissu économique», constate l’ancien ministre des Finances, lors du premier forum annuel du développement en Tunisie, organisé par le Centre des études et des recherches économiques et sociales (CERES, 24-25 avril 2019).

«Choqué par les résultats des banques», M. Ayed estime que celles-ci «sont devenues des rentiers. Elles achètent les bons du Trésor émis par l’Etat avec des marges très intéressantes. Ce qui a pour conséquence d’assécher la liquidité bancaire».

Treize banques, c’est-à-dire près des deux tiers, ont participé aux deux opérations réalisées au profit de l’Etat. La BIAT a mis sur la table un peu plus du tiers du montant total récolté par l’Etat, c’est-à-dire 210 millions d’euros (150 millions d’euros en mars 2019 et 60 millions d’euros en juillet 2017) sur un total de 606 millions d’euros.

Loin derrière arrivent l’Union internationale de banques (90 millions d’euros, soit 50 plus 40), Attijari bank (85 millions d’euros, soit 25 plus 60), la Banque nationale agricole (51 millions d’euros, soit 30 plus 21) ; la Banque de l’habitat (30 plus 5), l’Arab Tunisian Bank (35 millions d’euros, soit 30 plus 5), la Société Tunisienne de Banque (30 millions d’euros, soit 20 plus 10), l’Amen Bank (30 millions d’euros, soit 20 plus 10), la Banque de Tunisie (17 millions d’euros, soit 7 plus 10), la North Africa International (10 millions d’euros, soit 5 plus 5), Tunis International Bank (6 millions d’euros, soit 3 plus 3), l’Arab Banking Corporation (l’unique établissement à avoir participé à une seule opération, celle de juillet 2017, soit 5 millions d’euros), la Banque de Tunisie et des Emirats (2 millions d’euros, soit 1 plus 1).

Et ce n’est peut-être pas la dernière fois que les banques voleront au secours de l’Etat. Car les difficultés auxquelles il est confronté avec le Fonds monétaire international –qui, d’après nos sources, n’exclut pas de suspendre le restant du crédit accordé en 2016, soit 1,5 milliard de dollars sur un total de 2,9 milliards- et pour sortir de nouveau sur le marché international pour lever de l’argent, ne lui laissent pas d’autre choix que de continuer à traire la nouvelle vache à devises.

M.M.