La mer Méditerranée se transforme en un dangereux piège en plastique, avec des niveaux record de pollution par les micro-plastiques menaçant les espèces marines et la santé humaine, selon le nouveau rapport du WWF (Fonds mondial pour la nature) publié, vendredi sous le titre “Pollution plastique en Méditerranée, sortons du piège”.

Aujourd’hui, le plastique représente 95% des déchets flottant en Méditerranée et reposant sur ses plages. La plupart de ces plastiques sont rejetés dans la mer par la Turquie et l’Espagne, suivis par l’Italie, l’Egypte et la France.

Le bassin méditerranéen abrite 150 millions de personnes, qui font partie des plus gros producteurs de déchets urbains solides, entre 208 et 760 kg par an et par habitant et les touristes visitant la Méditerranée (plus de 200 millions de personnes chaque année), génèrent une augmentation de 40% des déchets marins en été, ajoute le rapport qui coïncide avec la Journée mondiale des océans.

Après la Chine, l’Europe est le deuxième producteur de plastique au monde, déversant entre 150 mille et 500 mille tonnes de macro-déchets en plastique et entre 70 mille et 130 mille tonnes de micro-plastiques dans la mer chaque année. La majorité de ces matières plastiques envahissent la mer Méditerranée et constituent une menace majeure pour la vie marine.

La plupart des matériaux plastiques n’étant pas biodégradables, ces derniers y resteront pendant des centaines ou des milliers d’années. Utilisées en moyenne pendant quatre ans, mais souvent une seule fois, les matières plastiques restent en mer pendant des périodes allant de cinq ans pour un mégot de cigarette, 20 ans pour un sac, 50 ans pour un gobelet en plastique et jusqu’à 600 ans pour une ligne de pêche.

Le rapport du WWF s’inquiète des conséquences dramatiques d’une utilisation excessive de plastique, d’une mauvaise gestion des déchets et du tourisme de masse dans l’une des régions les plus visitées dans le monde et présente une feuille de route détaillée des actions urgentes que les institutions, les entreprises et les citoyens doivent entreprendre pour empêcher les déchets plastiques d’atteindre la mer.

De grandes pièces de plastique blessent, étouffent et tuent des animaux marins, y compris des espèces protégées et en voie de disparition, telles que les tortues de mer et les phoques moines. Mais ce sont les microplastiques -fragments plus petits et plus insidieux- qui ont atteint des niveaux records de concentration de 1,25 million de fragments par km2 en Méditerranée, presque quatre fois plus que dans “l’île de plastique” du Pacifique Nord et qui, entrant dans la chaîne alimentaire, menacent aussi bien les espèces animales que les personnes.

Selon le rapport, les retards et les lacunes dans la gestion des déchets plastiques dans la plupart des pays méditerranéens sont parmi les causes profondes de la pollution plastique.

Par exemple, sur les 27 millions de tonnes de déchets plastiques produits chaque année en Europe, seul un tiers est recyclé et la moitié des déchets plastiques en Italie, en France et en Espagne se retrouvent dans les décharges. Les plastiques recyclés ne représentent actuellement que 6% de la demande en plastique en Europe.

Le WWF a appelé les gouvernements, les entreprises et les particuliers à adopter un certain nombre de mesures visant à réduire la pollution par les plastiques dans les environnements urbains, côtiers et marins en Méditerranée et dans le monde.

Le fonds a appelé à l’adoption d’un accord international juridiquement contraignant pour éliminer les rejets de plastique dans les océans, soutenu par de solides objectifs nationaux visant à obtenir 100% de déchets plastiques recyclés et réutilisables d’ici 2030 et des interdictions nationales pour les articles en plastique à usage unique et exhorté les entreprises à investir dans l’innovation pour une utilisation plus efficace et durable du plastique.

La pollution plastique peut affecter les secteurs économiques clés de la Méditerranée, en particulier la pêche et le tourisme. Selon les estimations, les déchets marins coûteraient 61,7 millions d’euros chaque année à la flotte de pêche de l’UE, en raison de la réduction des captures de poissons, des dommages aux navires ou de la réduction de la demande de produits de la mer.

Selon le WWF, 134 espèces (poissons, tortues de mer, mammifères et oiseaux de mer) sont victimes de l’ingestion de plastique et 18% du thon et de l’espadon contiennent des débris de plastique dans leur estomac et 90% des oiseaux de mer dans le monde ont des fragments de plastique dans leur estomac.