Suite à son classement par le Parlement européen parmi les pays les plus exposés aux dangers de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme, la Tunisie a exprimé sa consternation de cette décision qu’elle qualifie d'”injuste, précipitée et unilatérale”.

La Tunisie affirme s’être soumise, volontairement, au suivi du groupe de travail financier pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord et avoir convenu d’établir un plan de travail et franchi d’importants pas sur la voie de sa concrétisation. Ce plan de travail comporte une série d’engagements visant à développer le dispositif juridique et financier de la Tunisie avant la fin 2018.

La décision du Parlement européen intervient moins de trois mois après le classement de la Tunisie par l’UE dans la liste des pays jugés non coopératifs en matière domaine fiscal a soulevé des interrogations sur le rendement de la diplomatie tunisienne et les relations extérieures multipartites de la Tunisie, en particulier avec l’UE, le premier partenaire économique du pays.

L’ancien ministre des Affaires étrangères, Ahmed Ounaies, estime dans ce sens que ce sont les partis de l’extrême gauche qui portent un jugement négatif sur l’Islam qui ont voté contre la Tunisie. Surtout que durant les dernières années, le pays est vu comme un exportateur de terroristes”.

Selon lui, les partis qui forment les gouvernements en Europe, conscients des efforts déployés par la Tunisie en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, ont voté pour la Tunisie.

Malgré les efforts diplomatiques, le journal britannique “The Guardian” écrit dans sa publication du 3 février que 50 terroristes tunisiens sont arrivés en Italie en provenance de la Syrie. Une information qui, selon l’ancien diplomate, a secoué le Parlement européen malgré les efforts des gouvernements pour convaincre que la situation est sous contrôle en coordination avec la partie tunisienne.

Ounaies tient le gouvernement de la Troïka responsable de la situation que vit aujourd’hui la Tunisie qui subit les conséquences de la décision de faciliter le départ de milliers de jeunes vers la Syrie dont le nombre a atteint, selon les statistiques des Nations unies, les 5 500 combattants.

Le diplomate a également pointé les associations caritatives, citant la déclaration de l’ancien membre sécuritaire Issam Dardouri devant la Commission d’enquête parlementaires lorsqu’il a parlé de l’existence de 200 associations, en plus des écoles coraniques et les mosquées actives dans le blanchiment d’argent et l’envoi des jeunes vers les zones de conflit.

Il a ajouté que le contrôle sur les frontières a été levé sur instructions du gouvernement, “ce qui a rendu la circulation des personnes et de l’argent permise”.

De son côté, l’ancien diplomate aux Nations unies, Taoufik Wannas, accuse le gouvernement et notamment les ministères des Finances et des Affaires étrangères, affirmant que la Banque centrale aurait dû fournir les réponses et les informations nécessaires pour éviter un tel classement.

Il met en garde contre les répercussions néfastes de ce classement sur l’image de la Tunisie au niveau politique, économique et de l’investissement, soulignant que la diplomatie doit multiplier les contacts pour que la Tunisie quitte cette liste.

Commentant le communiqué publié la veille par le ministère des Affaires étrangères, Wannas considère qu’imputer l’entière responsabilité à l’UE ne résout pas le problème, la Tunisie aurait mieux fait de s’auto-juger et de s’engager à fournir les précisions nécessaires.

L’ancien diplomate Abdallah Abidi considère, de son côté, que l’échec diplomatique est dû à l’absence de cellules de vigilance au sein du ministère des Affaires étrangères qui avaient un rôle important dans le suivi des relations extérieures de la Tunisie.