En Colombie, la police manie l’arme de l’humour sur internet

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éseaux sociaux grâce à son humour (Photo : Lionel Bonaventure)

[31/01/2015 13:38:44] Bogota (AFP) Si tu veux gagner du pognon, laisse tomber l’extorsion”, “Tu peux conduire si tu es ivre, mais seulement d’amour”: en maniant l’arme de l’humour, la police de Colombie est devenue l’une des plus suivies au monde sur les réseaux sociaux.

Dernier exemple en date, la destruction d’un laboratoire de drogue clandestin dans une localité à 600 kilomètres de Bogota se traduit par cette conclusion sur son compte Twitter (@PoliciaColombia) : “Ils étaient en train de préparer une mauvaise salade à Puerto Santander, mais ils n’ont pas pu la servir”.

En charge des médias numériques au sein de la police nationale, le lieutenant Dorian Vanegas assure que ces interventions détonantes sur internet vont améliorer la sécurité dans les villes d’un pays encore marqué par des taux élevés de délinquance.

“Nous avons recours à une communication qui permet d’établir un lien avec la population grâce au média numérique”, affirme-t-il dans un entretien à l’AFP.

Depuis le mois de décembre, une équipe spéciale de la police colombienne s’emploie à ciseler les annonces diffusées sur Facebook, Instagram, Youtube et surtout sur son compte Twitter, qui compte plus de 640.000 abonnés.

En peu de temps, l’institution s’est taillée un énorme succès sur le site de microblogging, où elle s’est imposée comme l’un des corps policiers les plus suivis de la planète, derrière celui de l’Espagne (1,37 million d’abonnés) ou du FBI (1,08 million), se félicite M. Vanegas.

D’une moyenne de 15 retweets à l’origine, ses messages en comptent désormais jusqu’à 300, souligne-t-il.

Mettre en valeur le travail de la police est un des objectifs de cette stratégie qui mise aussi sur la prévention avec des tweets en forme de pastiches ou de commentaires ironiques.

– Des ‘cours contre le vol’ –

Le trafic de cocaïne, dont la Colombie est l’un des principaux producteurs, constitue l’un des thèmes de prédilection.

“Des fois, je voudrais me lancer dans le microtrafic et puis je me rappelle que @PoliciaColombia est sur mon dos et l’idée me sort de la tête” ou encore “La mode allait consister à cacher de la drogue dans les sandales. On leur a gâché l’idée”.

La police n’hésite pas à revisiter le champ artistique à travers ses messages: “Ne force pas sur les boissons” reprend ainsi le refrain d’une chanson de salsa très populaire en Colombie.

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ût 2014 (Photo : Jose Miguel Palencia)

Il existe sur les réseaux sociaux un “phénomène de pouvoir” auquel la police comme les organes gouvernementaux ne pouvaient demeurer indifférents, explique à l’AFP le philosophe colombien Mauricio Vasquez, professeur à l’Université Eafit de Medellin.

“La toile leur permet d’avoir une carte qui colle davantage à la réalité des territoires, où la vigilance et l’information ne sont pas tant l’apanage des institutions mais des citoyens eux-mêmes”, poursuit ce spécialiste de la cyber-culture, qui voit dans internet une “forme de contrôle social”.

Ironie de la situation, ce sont parfois des délinquants purgeant leur peine en prison qui sont mis à contribution par la police pour offrir sur internet des “cours contre le vol”.

Les internautes peuvent ainsi apprendre par exemple les différentes modalités d’action des pickpockets et autres escrocs ou bandits sévissant dans les rues.

“Nous avons compris que les réseaux sociaux peuvent déplacer les foules. Nous pouvons informer et rendre service à la communauté”, résume le lieutenant Vanegas.

La police colombienne a fait des émules puisque l’armée du pays compte désormais plus 370.000 abonnés sur Twitter, plus d’un dixième du nombre de ceux suivant le compte du chef de l?État.