Dix jours de grève à la SNCM et le conflit s’envenime en Corse

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à la société La Meridionale, bloqué par des salariés en grève dde la SNCM à Marseille, le 2 juillet 2014 (Photo : Boris Horvat)

[04/07/2014 07:02:25] Marseille (AFP) La grève à la SNCM s’est envenimée ces derniers jours à Marseille, mais surtout en Corse, après 10 jours d’un conflit sans issue en vue, qui plombe plus sérieusement encore la situation financière de la compagnie maritime en difficulté.

Le mouvement entamé le 24 juin à l’initiative de tous les syndicats à l’exception du Syndicat des travailleurs corses (STC) n’a pas faibli: aucun des 8 navires de la société n’a transporté le moindre passager vers ou au départ de la Corse ou du Maghreb, et la CGT, qui a reconduit la grève jeudi, promet même de “nouvelles actions”.

Les marins CGT ont donné un tour spectaculaire à leur combat mardi, en bloquant à quai au port de Marseille un des trois navires de La Méridionale. Ce cargo mixte (fret-passagers) arrivait le matin de Bastia et devait repartir le soir-même pour le port corse. Il n’a pas bougé depuis.

La Méridionale, co-délégataire avec la SNCM du service public vers la Corse, a donc décidé mercredi de dérouter ses deux autres navires vers Toulon, “aucune garantie de sécurité n’étant établie sur le port de Marseille”, selon son directeur marketing Laurent D’Hoorne. Les compagnies de croisières, à l’origine d’une importante manne financière pour Marseille, ont elles aussi décidé de faire débarquer ailleurs leurs passagers.

En vertu d’un accord avec la SNCM, La Méridionale récupère en tout cas certains de ses clients empêchés d’embarquer par la grève. “Mais à cette époque de l’année, nos navires sont déjà extrêmement chargés, et nous ne pouvons prendre tout le monde. Nous tentons donc de multiplier les rotations”, explique M. D’hoorne, précisant que 3.000 passagers sont attendus d’ici ce week-end, qui marque le coup d’envoi de la haute saison d’été.

Jeudi soir, Ce sont les socioprofessionnels de Corse, excédés par le mouvement qui se sont violemment fait entendre. Quelques centaines d’entre eux ont tenté de prendre d’assaut à coups de pierre le Jean-Nicoli, stationné à Porto-Vecchio, le forçant à appareiller vers Marseille.

– 500.000 euros de pertes par jour –

La SNCM réalise traditionnellement sur cette période estivale plus de la moitié de son chiffre d’affaires annuel. La direction assure que “pratiquement personne n’a été laissé complètement en détresse grâce à un gros travail d’information, via l’envoi de plus de 7.000 SMS, et de recherche de solution”. Mais les réservations avaient déjà chuté de 10% avant la grève, et “nous perdons environ 500.000 EUR par jour et cela risque d’augmenter avec la pleine saison”, relève la direction.

“Il faut savoir arrêter une grève”, a donc mis en garde mardi le nouveau patron de la compagnie, Olivier Diehl, n’hésitant pas à évoquer une possible “liquidation” de la SNCM si le conflit devait perdurer.

Pas sûr qu’il soit entendu. Les salariés grévistes continuent en effet à dénoncer les “trahisons” de l’Etat, actionnaire à 25%, qui, après avoir donné au printemps son feu vert à un plan de relance industriel passant notamment par la commande de quatre nouveaux navires, y a finalement renoncé.

L’actionnaire principal, Transdev (60%), n’y a pour sa part jamais cru. Il le juge irréaliste, d’autant que l’entreprise est sous la menace du remboursement de deux fois 220 M EUR d’aides publiques jugées indûment perçues par Bruxelles. Sa prise de pouvoir dans la compagnie s’est renforcée jeudi avec la nomination en assemblée générale de Jérôme Nanty, un homme du sérail. Il doit être placé à la tête du conseil de surveillance, mais celui-ci ne s’est finalement pas tenu vendredi, faute de quorum selon les syndicats. “Alors que les salariés sont en demande de clarification, l’Etat et Transdev quittent le navire!”, a dénoncé Pierre Maupoint de Vandeul, représentant CFE-CGC des officiers

L’annonce lundi soir par le secrétaire d’Etat aux Transports Frédéric Cuvillier, venu rencontrer les salariés, de la nomination de Louis Gallois pour “établir un plan stratégique de soutien aux compagnies de transport maritime françaises” n’a en rien altéré la volonté des syndicats. Ils en appellent désormais à la médiation du Premier ministre Manuel Valls.

Le représentant CGT des marins, Frédéric Alpozzo, assure même qu’il entend “saisir un juge d’instruction”, affirmant que “les actionnaires ont déjà prévu de mettre la société au tribunal de commerce cet automne”.