Violations d’embargos : le ton baisse entre BNP et les autorités américaines

089058daba1e46f6345a836b7a24e91ea2d629de.jpg
Le logo de la BNP Paribas devant une agence (Photo : Michel Gangne)

[14/06/2014 11:48:04] New York (AFP) Les négociations aux Etats-Unis sur les violations d’embargo dont est accusée BNP Paribas sont en train de se détendre après que la banque a accepté de se séparer de certains cadres, a appris l’AFP vendredi.

Les discussions serrées entre le département de la Justice (DoJ), le régulateur bancaire de New York Benjamin Lawsky et BNP achoppaient depuis plusieurs semaines sur le refus de l’établissement de licencier une douzaine de banquiers associés aux opérations jugées litigieuses par les Américains.

M. Lawsky en avait même fait un point d’honneur, selon une source proche du dossier, allant jusqu’à brandir la menace ultime: retirer à l’établissement financier sa licence bancaire aux Etats-Unis.

Selon cette source, M. Lawsky a apprécié que BNP Paribas fasse des concessions après plusieurs mois de résistance.

Sollicités par l’AFP, les services de M. Lawsky et une porte-parole de la BNP à New York n’ont pas fait de commentaires.

Le régulateur bancaire de l’Etat de New York avait communiqué à BNP Paribas il y a plusieurs mois une liste d’une douzaine de banquiers comprenant des noms de hauts dirigeants, dont il demandait le licenciement.

La banque avait résisté à ces pressions jusqu’à l’annonce récente des départs de George Chodron de Courcel, 64 ans, directeur général délégué et de Dominique Remy, 60 ans, responsable de la banque de financement et d’investissement de la filiale belge BNP Paribas Fortis et par ailleurs responsable monde des financements structurés.

Un autre dirigeant, Vivien Lévy-Garboua, conseiller de la direction, est aussi sur le départ.

– Tensions exacerbées –

Les négociations vont pouvoir progresser, a indiqué vendredi la source.

Les deux parties qui discutent quasi quotidiennement, selon elle, vont désormais aborder les autres points nécessaires à un éventuel accord: l’amende, qui devrait se situer entre 5 et 10 milliards de dollars, et les transferts d’argent en dollars pour le compte de clients vers ou depuis les Etats-Unis (les activités dites de compensation).

La presse américaine évoque, elle, une amende de plus de 10 milliards de dollars.

Un accord peut encore prendre des semaines, une autre question restant en suspens: BNP va-t-elle être forcée de plaider coupable ?

Les autorités américaines reprochent à BNP d’avoir enfreint des embargos américains en réalisant des opérations en dollars avec des pays comme l’Iran, Cuba et le Soudan entre 2002 et 2009.

Une enquête interne de la banque avait recensé au début d’année un “volume significatif d’opérations qui pourraient être considérées comme non autorisées au regard des lois” aux Etats-Unis.

Aucune poursuite judiciaire n’a été engagée outre-Atlantique contre la banque ou l’un de ses responsables, le litige faisant, comme il est de mise habituellement aux Etats-Unis, l’objet d’intenses négociations pour éviter d’en arriver devant les tribunaux.

Cette affaire a exacerbé les relations déjà tendues entre les deux hommes forts de la banque: Baudouin Prot, le président du conseil d’administration, et le directeur général Jean-Laurent Bonnafé, selon des sources internes ayant requis l’anonymat.

Au sein de la filiale new-yorkaise, la colère des banquiers d’affaires et des traders, dont l’avenir est suspendu à un accord, est à son comble.

Le dossier a aussi pris une tournure diplomatique, le président français François Hollande dénonçant une sanction “disproportionnée” et “injuste”.

Interpellé à ce sujet, son homologue américain Barack Obama a répondu qu’il ne se “mêlait pas” des affaires de justice.

La banque française n’est pas le seul établissement bancaire à être dans le viseur des enquêteurs américains qui s’intéressent notamment aux pratiques passées en matière de crédit immobilier de Bank of America et de Citigroup. Celles-ci pourraient devoir payer jusqu’à 17 milliards de dollars de pénalités pour la première et 10 milliards pour la seconde.

Plus d’une dizaine de banques américaines ont d’ailleurs payé depuis 2012 plus de 80 milliards de dollars en pénalités diverses.