Archéologie : quand les technologies du virtuel arrêtent le temps

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ésente un scanner laser qui permet de réaliser des relevés 3D sur des sites archéologiques, le 9 avril 2014 au salon du virtuel de Laval (Photo : Jean-François Monier)

[11/04/2014 12:22:49] Laval (AFP) “Notre métier c’est d’essayer de trouver les techniques les plus adéquates pour conserver numériquement ce qu’on ne peut pas garder physiquement”, explique Yves Ubelmann, cofondateur avec Philippe Barthélémy d’Iconem, une start-up qui intervient sur des sites archéologiques menacés.

Le premier est architecte, spécialisé dans le patrimoine et l’archéologie; le second, ancien pilote d’hélicoptère, conçoit et pilote des drones pour la numérisation 3D.

Leur toute jeune société a été sélectionnée pour présenter son savoir-faire au Salon des Technologies et Usages du Virtuel, Laval Virtual, à Laval en Mayenne. Ses deux fondateurs ont fait leurs premières armes en Afghanistan, sur le site archéologique de Mes Aynak, au sud de Kaboul.

“C’est un site très riche, où on a retrouvé des monastères bouddhistes construits il y a 1.500 ans, mais qui est menacé de destruction parce qu’il est situé sur une mine de cuivre qui va être exploitée”, explique Yves Ubelmann à l’AFP.

Iconem utilise des drones spécialement conçus pour “l’acquisition photogrammétrique”: les images et les données (coordonnées GPS, hauteur) capturées par le drone sont traitées par des algorithmes développés par l’Institut de recherche en sciences du numérique (Inria). Le résultat restitue un modèle 3D très précis du site, “une espèce de copie virtuelle”.

Le drone permet de faire des relevés sur des zones inaccessibles. “Ca nous a servi en Afghanistan où on a travaillé sur des zones qui n’étaient pas encore déminées”, précise Yves Ubelmann.

Iconem développe également un projet sur le site de Pompéi, dont la fragilité se révèle jour après jour. “Le problème avec Pompéi, c’est que c’est tellement énorme qu’on a du mal à en avoir une vision précise”, souligne Yves Ubelmann.

La technologie a en outre l’avantage d’être rapide. “C’est appréciable quand on intervient dans des régions compliquées politiquement, avec des tensions sécuritaires”.

“Là où on est le plus utile aujourd’hui, c’est là où l’archéologie est menacée, pour au moins garder la mémoire”, résume le président d’Iconem.

– “Moulage numérique” –

Une technique différente est mise en oeuvre par Digitage, autre jeune pousse sélectionnée pour participer à la “Start-Up Area” de Laval Virtual, elle aussi au service de l’archéologie et du patrimoine culturel.

“Notre vraie valeur ajoutée c’est d’avoir la compréhension du besoin de l’archéologue et de faire l’interface entre ce besoin et la partie purement technique”, explique Alexis Dejoux, cofondateur de Digitage avec Orpheas Ladas. L’un est ingénieur en logistique et licencié en histoire, l’autre ingénieur en informatique.

Leurs outils: un scanner laser qui permet de réaliser des relevés 3D sur des sites archéologiques avec une précision de l’ordre du centimètre et un scanner optique de précision pour numériser des objets, sans contact.

“On archive, on moule, on enregistre. Ca c’est la première chose que permet la numérisation 3D”, décrit Alexis Dejoux.

“Ensuite, à partir de ce moulage numérique, on va pouvoir réaliser toutes sortes d’études, d’analyses, de mesures métrologiques, de manière beaucoup plus simple, plus interactive, et plus précise”, poursuit-il. “Un outil de travail” pour les archéologues.

Sur un chantier de fouilles, en particulier en archéologie préventive, où les archéologues interviennent sur des sites menacés par des travaux d’aménagement et où la contrainte de temps est très forte, cette technologie peut accélérer les relevés sur le terrain.

Digitage réalise également la scannérisation 3D d’objets du patrimoine culturel. “C’est quelque chose de très utile dans la diffusion pour la recherche scientifique”, commente Alexis Dejoux.

“On a été au Chili faire la numérisation d’un crâne de mastodonte, une pièce imposante”, raconte Orpheas Ladas. “Le paléontologue a ensuite mis le crâne numérisé dans sa poche pour aller le comparer à d’autres crânes trouvés aux Etats-Unis et au Brésil”. Une reproduction grandeur nature du crâne réalisé à partir de cette numérisation doit être exposée au Palais de l’univers et des sciences de Dunkerque.

Digitage a été créée fin 2011 et a démarré ses premiers chantiers importants en 2013. Elle développe également, à destination des musées, des applications pour mettre en valeur les modélisations 3D, en réalité virtuelle ou augmentée: sur des bornes interactives, les sites internet ou les smartphones et tablettes.