Tunisie : Sous les pavés…La plage ?

utica_tunisie-24122012.jpgLes
transformations qui traversent la centrale patronale tunisienne, l’UTICA, qui
vient de clore son congrès exceptionnel cette semaine, en disent long sur les
affres et les difficultés de la période transitoire qui dure encore!

L’UTICA est l’exemple même des institutions dévoyées par les régimes précédents
et qui ont souffert de la mainmise de l’Etat et du Parti Unique sur elles.
D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si le congrès de l‘UTICA vient juste une
semaine après le dénouement de l‘autre crise avec l’UGTT et qui traîne elle
aussi des casseroles de son concubinage forcé avec Ben Ali et son régime.

Tout cet héritage qui mine plusieurs pans de nos institutions mérite d’être mis
sur la place publique, pour l’analyser, le décortiquer, en tirer les leçons
adéquates, trouver les clés et les mécanismes qui ont conduit à cet état et
inventer des nouvelles règles à même de nous protéger dans l’avenir du retour de
la dictature.

La dictature est encore en nous. Beaucoup de citoyens craignent aujourd’hui
d’une dictature religieuse rampante même si elle n’est pas ouvertement
revendiquée par Ennahdha. Les soubassements du vécu politique tunisien laissent
croire à cette possibilité car les acquis de la République, que nous avons vécus
depuis 60 ans, ont été, malgré leur importance, incapables de nous défendre du
discours totalitaire de Ben Ali, par exemple. Les acquis de la République ont
été bafoués par Bourguiba dès le départ et il nous faut l’avouer, une frange de
nos élites -même de gauche- a participé des fois à ce travail de sape surtout
sous Ben Ali qui a souvent utilisé les rhétoriques de gauche pour mieux
installer sa mainmise sur l’Etat et sur la nation.

La vigilance dont fait preuve une large frange de la société aujourd’hui est,
bien que positive, non suffisante. A l’intérieur du pays, les démocrates et les
associations n’ont pas le même public ni les mêmes relais médiatiques et souvent
un discours teinté de religiosité et de particularisme locaux afin de séduire
les populations en attente.

Nous sommes face à un travail de sape très profond basé sur l’utilisation des
sentiments de piété des gens et véhiculant une culture d’exclusion et de
méfiance envers tout avis opposant. Ceci se vérifie à travers les trop célèbres
Ligues de protection de la révolution mais aussi à travers les groupes divers
qui montent partout à l’assaut des municipalités, des écoles, des universités,
des associations culturelles, et j’en passe.

Ici il y a danger. L’élite est trop concentrée sur 3 ou 4 plateaux télé et ne se
rend que rarement compte que les murailles vacillent ailleurs!

Même dans ces groupes souvent en accointance soit avec Ennahdha, soit avec les
salafistes ou autres, sont perméables aux risques de retour de la dictature.
Souvent des sbires de l’ancien régime et du RCD arrivent, parés des maquillages
divers à se faire blanchir et s’acheter une nouvelle virginité. Mais très vite
ils distilleront leur venin et leur culture de soumission aux autorités et de
bannissement de toute opposition.

Ainsi la boucle sera vite bouclée!