Les grands acteurs du tourisme en France en pleines turbulences

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és à Deauville, le 10 juillet 2012 (Photo : Charly Triballeau)

[13/07/2012 06:21:27] PARIS (AFP) Une montée en puissance fulgurante d’internet, des crises économiques et géopolitiques à répétition, des clients devenus experts en voyages etc, les grands acteurs du tourisme en France traversent des zones de fortes turbulences, selon les professionnels interrogés par l’AFP.

“C’est la pire période j’ai connu”, résume Georges Colson, le patron du Syndicat national des agents de voyage (Snav) qui estime à 5.000 le nombre d’emplois perdus dans la profession depuis trois ans.

Même constat chez les tours-opérateurs: “on s’est adapté aux crises mais l’espoir de croissance entrevu en 2011 ne s’est pas transformé. 2012, c’est l’année du couperet”, lâche René-Marc Chikli, le président de l’association des tour-opérateurs français (Ceto).

Tui France (Nouvelles Frontières, Marmara…), géant du tourisme qui, comme Thomas Cook, a affiché des pertes record l’an dernier, a déjà annoncé 484 suppressions d’emploi. Fram, dont M. Colson est un des actionnaires principaux, réunit un nouveau comité d’entreprise extraordinaire ce vendredi avec à la clé 70 possibles suppressions d’emplois.

Les voyagistes ont l’habitude des crises dans un métier où pas une année ne se passe sans tsunamis, troubles politiques, crises sanitaires, et même nuage de cendres islandais qui bloque le ciel européen.

Un problème de demande

Aux phénomènes conjoncturels se sont cette fois ajoutés des phénomènes structurels avec une crise économique qui a obéré le pouvoir d’achat des vacanciers, entrainant moins de départs ou plus de système “D”.

“Il y a clairement un problème de demande par rapport aux deux principaux marchés européens que sont la Grande-Bretagne et l’Allemagne, grands pourvoyeurs de vacanciers à l’étranger. “80% des gens restent en France”, relève Bruno Despujol, partner du cabinet Oliver Wyman, pointant la baisse des ventes de “packages” (vol+séjour).

Mais surtout selon M. Despujol, la “vraie révolution digitale se déroule aujourd’hui”.

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ège de TUI à Hanovre (Allemagne), le 14 décembre 2010 (Photo : Jochen Luebke)

Le canal internet “dépasse à présent les 20% des ventes de packages, seuil à partir duquel les acteurs historiques sont mis à mal”. Schématiquement, les pure-players, contrairement aux voyagistes, n’ont pas d’hôtels en propre à remplir ou pris d’engagements aériens fermes pour telle ou telle destination. De fait, ils sont plus libres de vendre d’autres pays quand intervient une révolution dans un pays par exemple.

“L’autre vague de fond depuis 2000, c’est l’avènement de l’autopackaging”, a-t-il ajouté. A la recherche des prix les plus bas, ses adeptes traquent surtout les bonnes affaires en suivant les dessertes des compagnies low-cost donc l’Europe en premier lieu.

Autrement dit, grâce à l’internet, les touristes sont devenus des experts en voyage qui réservent sans pousser la porte des agences de voyage, pour les offres les plus simples.

Le consommateur “a l’impression d’acheter moins cher quand il achète en direct même si ce n’est pas toujours le cas car il ne bénéficie plus alors de prix négociés”, souligne Guy Raffour, du cabinet Raffour Interactif.

L’an dernier 58% des Français partis en vacances ont préparé leur séjour en ligne et 42% ont réservé sur la toile en 2011 contre 8% en 2003, selon son baromètre annuel.

Face à une demande plus mature, les grands acteurs généralistes “souffrent”, dit M. Despujol “parce que les gens ne savent plus ce qu’ils viennent chercher chez eux”, tant l’offre est importante.

En revanche, les clubs de vacances, les spécialistes d’un segment (bas ou haut de gamme par exemple) ou ceux qui proposent des forfaits flexibles pour mieux répondre à la demande des clients s’en sortent mieux, constate Raoul Nabet, président de l’association professionnelle de solidarité du tourisme (APST), caisse de garantie des agences de voyages.

Pour M. Raffour justement, “la valeur ajoutée” est la clé de l’avenir pour les voyagistes, celle “du cousu main, de la meilleure offre en qualité/prix d’expert d’une destination”.