Espagne : les marchés pressent Madrid de demander de l’aide aux Européens

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La Bourse de Madrid (Photo : Cristina Quicler)

[08/06/2012 12:48:51] MADRID (AFP) L’Espagne, lourdement sanctionnée par l’agence Fitch, était vendredi sous une forte pression des marchés, ce qui pourrait la pousser à demander plus tôt que prévu, peut-être dès samedi, un sauvetage européen pour ses banques.

Sans surprise, la Bourse de Madrid a ouvert dans le rouge, tandis que sur le marché obligataire, la prime de risque (surcoût payé par l’Espagne pour emprunter, par rapport à l’Allemagne) repartait à la hausse, se rapprochant de la barre symbolique des 500 points.

Cette tension rejaillissait sur l’ensemble des Bourses européennes, qui ont toutes débuté en baisse, confirmant que le pays, quatrième économie de la zone euro, en est aussi devenu la principale inquiétude.

– Les marchés européens sous pression –

Mais le marché madrilène est repassé dans le vert en fin de matinée, à la faveur d’informations de presse selon lesquelles Madrid pourrait demander dès samedi une aide européenne pour ses banques, dont les détails seraient définis lors d’une conférence téléphonique de l’Eurogroupe.

“Moi je ne suis pas au courant d’une telle conférence”, a réagi la porte-parole du ministère espagnol de l’Economie, assurant qu’elle ne faisait “aucun commentaire” sur l’imminence d’un tel sauvetage: “le chef du gouvernement a dit clairement hier (jeudi) qu’on n’allait pas alimenter les commentaires”.

La Commission européenne a de son côté assuré qu’elle n’avait “pas de nouvelles d’une demande d’aide financière de la part de l’Espagne”.

Les marchés semblent s’impatienter, espérant sans doute voir cette question régler avant les élections grecques du 17 juin.

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à Madrid (Photo : Dominique Faget)

– Rajoy attend les chiffres de l’audit –

Mais Madrid reste inflexible: “j’attendrai que le FMI et les experts indépendants fassent connaître leur opinion sur les nécessités de recapitalisation du système financier espagnol et à partir de là, je donnerai mon chiffre et le gouvernement dira de quoi a besoin le système pour se recapitaliser”, a déclaré jeudi le chef du gouvernement, Mariano Rajoy.

Le rapport du FMI, qui chiffrera, selon les médias, autour de 40 milliards d’euros les besoins des banques, est attendu lundi, celui des cabinets d’audit Roland Berger et Oliver Wyman, à partir du 18 juin.

Mais les choses pourraient bouger avant: comme le rappelait jeudi M. Rajoy, “le FMI a une réunion, je crois (ce vendredi), où il donnera son opinion”.

“Il semble que cela va être ce week-end, c’est ce qu’intègre déjà le marché, que (le sauvetage) sera demandé dès ce week-end”, assure David Navarro, analyste de la maison de courtage Inversis.

“La forme du sauvetage semble quasiment définie, cela passerait par une émission obligataire du (fonds de secours européen) FESF, qui paierait ensuite le (fonds public espagnol d’aide au secteur bancaire) Frob; le Frob donnerait ces bons aux banques, qui les échangeraient contre des euros”, explique-t-il.

L’Espagne obtiendrait ainsi, comme elle le souhaitait, une aide “sur mesure” pour ses banques et non un sauvetage global du pays, qui irait de pair avec des conditions strictes dictées par ses bailleurs de fonds internationaux.

“Au final, c’est un sauvetage, même si on l’appelle +light+, doux… On peut dire que ce n’est pas un sauvetage à la portugaise, à l’irlandaise, c’est clair”, dit David Navarro.

Mais “au final l’argent est donné au Frob, pas aux banques, et le Frob, c’est l’Etat” espagnol: “un sauvetage, ce n’est pas bon, quelle que soit la manière employée”, relève l’analyste.

Reste à savoir le montant de cette aide: Fitch, qui a abaissé jeudi la note souveraine espagnole de trois crans, à “BBB”, évalue les besoins du secteur bancaire entre 60 et 100 milliards d’euros. Standard & Poor’s les chiffre entre 50 à 82 milliards.

Vendredi, la presse espagnole rapportait que deux caisses d’épargne en difficulté auront besoin de 9 milliards d’euros pour se redresser.

En y ajoutant le sauvetage de Bankia, ces trois banques représentent une facture publique de plus de 30 milliards, de quoi renforcer les craintes des investisseurs vis-à-vis du secteur, fragilisé depuis l’éclatement de la bulle immobilière en 2008.