Election présidentielle française : Pour qui votent les enfants d’émigrés maghrébins?

election-france-050512.jpgLes Français d’origine maghrébine votent à gauche. Il s’agit là d’une idée bien reçue. On rencontre des enfants d’émigrés maghrébins qui font le choix du … Front national, le parti d’extrême droite de Marine Le Pen. Analyse

-«Il est irresponsable de proposer un vote communautariste (…), alors que nous sommes face à des tensions communautaires et identitaires extraordinairement fortes. On a eu une montée des tensions communautaires extravagante, on a eu une radicalisation et une pression, disons les choses comme elles sont, d’un islam de France, alors que nous voulons un islam en France» (Nicholas Sarkozy).

-«Pourquoi vous laissez supposer que les étrangers non communautaires, non européens, sont des musulmans? Pourquoi vous dites ça? Qu’est-ce qui vous permet de dire que ceux qui ne sont pas européens sont musulmans? Je vous fais d’ailleurs observer qu’il y a des Français qui sont de culte musulman aujourd’hui. Est-ce que ces Français-là font des pressions communautaires?» (François Hollande).

Echange aigre-doux entre les deux candidats à l’élection présidentielle française, dans leur débat télévisé, mercredi 2 mai 2012, sur l’émigration. Il fait suite à une polémique au sujet de l’appui qu’aurait apporté l’universitaire suisse d’origine égyptienne, Tarak Ramadan, au candidat socialiste, François Hollande, évoqué par le candidat de la droite, le président Nicholas Sarkozy, le 25 avril 2012.

«Ils ont pourri la société française»

Elle ne sera pas la seule polémique. Mercredi 27 avril, toujours Nicholas Sarkozy a affirmé un soutien de quelque 700 imams français à la candidature de François Hollande. Voilà donc, l’émigration invitée dans l’élection des 22 avril et 6 mai. Les Français issus de l’émigration maghrébine aussi. Mais pour qui ces derniers votent-ils?

Réponse: attention aux surprises. En effet, des Maghrébins de la deuxième et troisième générations votent… Front National. Et oui pour le parti d’extrême droite de Jean-Marie et Marine Le Pen. Farid Smahi, d’origine algérienne, un ancien membre du bureau politique du Front National, l’instance dirigeante du parti jusqu’en janvier 2011, et ancien conseiller régional d’Île-de-France de 1998 à 2004, l’a confirmé dans de nombreuses rencontres avec la presse.

Vous ne rêvez pas, lisez ce que dit l’une d’entre eux à la chaîne France24. Une certaine Karima, Française d’origine marocaine, mariée à un Français, naturalisée en 2002 et titulaire d’un diplôme français en informatique: “Mon vote exprime un rejet de certains Arabes musulmans, que je qualifie personnellement de ‘racailles’. Ils ont pourri la société française. Au moins avant, ils vivaient concentrés dans les banlieues, mais depuis quelques années, le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a tout fait pour les loger dans les quartiers chics, comme dans le 15e arrondissement où je vis actuellement» (source).

Notons qu’il y a quelques années, des correspondants de la presse internationale ont été estomaqués en apprenant que des Arabes israéliens votaient pour le Likoud, le parti de l’ancien Premier ministre de l’Etat hébreu, Menahem Begin, l’homme du massacre de quelque 250 Arabes à Deir Yassine, en avril 1948.

Aucune étude n’ayant été élaborée sur le vote des quelque 3,5 millions de Français d’origine maghrébine auxquels on ajoute les quelque 500.000 Harkis, des Algériens qui ont combattu dans les rangs de la France avant l’indépendance de l’Algérie en 1962.

Mais existe-t-il un vote «ethnique» en France? Aucune étude, aucun constat ne l’ont montré. En d’autre terme, il n’y pas de vote de Français d’origine maghrébine, ni de vote de Français d’origine sub-saharienne, encore moins de vote de Français d’origine arménienne.

On affirme, ici et là, que les Français d’origine maghrébine votent «généralement» à gauche. Une croyance sans doute largement partagée et qui s’expliquerait par deux facteurs: les Français d’origine maghrébine vivent essentiellement dans des zones ouvrières situées à la périphérie des grandes villes et qui votent à gauche, en région parisienne, en Provence-Alpes-Côte d’Azur (Sud de la France) ou encore dans le Rhône-Alpes (Est de la France), et ils sont généralement de condition modeste.

Pas aussi simples que cela

Un autre élément est souvent présenté pour expliquer une certaine propension des Français d’origine maghrébine à voter à gauche: la présence de nombreux Français d’origine maghrébine dans les instances des partis de gauche. Comme Najet Vallaud-Belkacem, d’origine marocaine, porte-parole du candidat socialiste François Hollande. Ou encore Malek Boutih, d’origine algérienne, secrétaire national du Parti socialiste chargé des questions sociales. Ou encore Mohamed Oussedik, d’origine marocaine, secrétaire confédéral de la CGT (Confédération Générale du Travail), la principale centrale syndicale française, chargé des questions industrielles, et que l’on dit pouvoir succéder, en mars 2013, à Bernard Thibault,le patron de la CGT.

Force est, toutefois, de constater que les choses ne sont pas de ce côté aussi simples que cela. Les Français d’origine maghrébine ce n’est plus des gens modestes qui votent à gauche. Certains ont réussi grâce à leurs diplômes, à leur travail et à leur mérite de prendre l’ascenseur social pour se propulser très haut, habitant les beaux quartiers de Paris et fréquentant les lambris de la République.

Le président Sarkozy a intégré des Français d’origine maghrébine dans ses gouvernements. Comme la très médiatique Rachida Dati, d’origine maghrébine, aujourd’hui députée européenne de l’UMP (Union pour un Mouvement Populaire), le parti de Sarkozy, et qui a occupé, de 2007 à 2009, le fauteuil de ministre de la Justice. Et Fadela Amara, militante associative, d’origine algérienne, qui a occupé le poste de secrétaire d’État chargée de la Politique de la Ville (2007-2010). Elle est, depuis 2010, inspectrice générale des affaires sociales.

Et la droite, qui a intégré de nombreux Français d’origine maghrébine, continue de brouiller les cartes. Sur la liste des candidats à la députation des législatives de juin 2012, qui succèdent à la présidentielle des 22 avril et 6 mai, nous trouvons une certaine Salima Saa. D’origine algérienne et fille de Harki, Salima Saa se présente au nom de l’UMP dans une circonscription des plus difficiles, acquise depuis des années à la gauche, à Roubaix, dans le Nord-Est de la France. Appréciée de Nicholas Sarkozy, Salima Saa a failli, si l’on croit des indiscrétions de la presse française, être la porte-parole de ce dernier, en lieu et place de Nathalie Kosciusko-Morizet.

Certes, mais le candidat Sarkozy s’est peut-être mis à dos les Maghrébins en stigmatisant les musulmans entre les deux tours de la présidentielle et avec certaines de ses initiatives comme le débat, en 2010, sur l’identité nationale. Certes, répondent certains commentateurs, mais Sarkozy a gagné à sa cause 500.000 Harkis en reconnaissant, le 14 avril 2012, et pour la première fois, la responsabilité de son pays dans leur «abandon». La France, selon lui, n’a pas protégé ces Algériens qui ont pris fait et cause pour elle. Certaines indications font état de la mort de quelque 70.000 Harkis après l’indépendance de l’Algérie.-«Il est irresponsable de proposer un vote communautariste (…), alors que nous sommes face à des tensions communautaires et identitaires extraordinairement fortes. On a eu une montée des tensions communautaires extravagante, on a eu une radicalisation et une pression, disons les choses comme elles sont, d’un islam de France, alors que nous voulons un islam en France» (Nicholas Sarkozy).

-«Pourquoi vous laissez supposer que les étrangers non communautaires, non européens, sont des musulmans? Pourquoi vous dites ça? Qu’est-ce qui vous permet de dire que ceux qui ne sont pas européens sont musulmans? Je vous fais d’ailleurs observer qu’il y a des Français qui sont de culte musulman aujourd’hui. Est-ce que ces Français-là font des pressions communautaires?» (François Hollande).

Echange aigre-doux entre les deux candidats à l’élection présidentielle française, dans leur débat télévisé, mercredi 2 mai 2012, sur l’émigration. Il fait suite à une polémique au sujet de l’appui qu’aurait apporté l’universitaire suisse d’origine égyptienne, Tarak Ramadan, au candidat socialiste, François Hollande, évoqué par le candidat de la droite, le président Nicholas Sarkozy, le 25 avril 2012.

«Ils ont pourri la société française»

Elle ne sera pas la seule polémique. Mercredi 27 avril, toujours Nicholas Sarkozy a affirmé un soutien de quelque 700 imams français à la candidature de François Hollande. Voilà donc, l’émigration invitée dans l’élection des 22 avril et 6 mai. Les Français issus de l’émigration maghrébine aussi. Mais pour qui ces derniers votent-ils?

Réponse: attention aux surprises. En effet, des Maghrébins de la deuxième et troisième générations votent… Front National. Et oui pour le parti d’extrême droite de Jean-Marie et Marine Le Pen. Farid Smahi, d’origine algérienne, un ancien membre du bureau politique du Front National, l’instance dirigeante du parti jusqu’en janvier 2011, et ancien conseiller régional d’Île-de-France de 1998 à 2004, l’a confirmé dans de nombreuses rencontres avec la presse.

Vous ne rêvez pas, lisez ce que dit l’une d’entre eux à la chaîne France24. Une certaine Karima, Française d’origine marocaine, mariée à un Français, naturalisée en 2002 et titulaire d’un diplôme français en informatique: “Mon vote exprime un rejet de certains Arabes musulmans, que je qualifie personnellement de ‘racailles’. Ils ont pourri la société française. Au moins avant, ils vivaient concentrés dans les banlieues, mais depuis quelques années, le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a tout fait pour les loger dans les quartiers chics, comme dans le 15e arrondissement où je vis actuellement» (source).

Notons qu’il y a quelques années, des correspondants de la presse internationale ont été estomaqués en apprenant que des Arabes israéliens votaient pour le Likoud, le parti de l’ancien Premier ministre de l’Etat hébreu, Menahem Begin, l’homme du massacre de quelque 250 Arabes à Deir Yassine, en avril 1948.

Aucune étude n’ayant été élaborée sur le vote des quelque 3,5 millions de Français d’origine maghrébine auxquels on ajoute les quelque 500.000 Harkis, des Algériens qui ont combattu dans les rangs de la France avant l’indépendance de l’Algérie en 1962.

Mais existe-t-il un vote «ethnique» en France? Aucune étude, aucun constat ne l’ont montré. En d’autre terme, il n’y pas de vote de Français d’origine maghrébine, ni de vote de Français d’origine sub-saharienne, encore moins de vote de Français d’origine arménienne.

On affirme, ici et là, que les Français d’origine maghrébine votent «généralement» à gauche. Une croyance sans doute largement partagée et qui s’expliquerait par deux facteurs: les Français d’origine maghrébine vivent essentiellement dans des zones ouvrières situées à la périphérie des grandes villes et qui votent à gauche, en région parisienne, en Provence-Alpes-Côte d’Azur (Sud de la France) ou encore dans le Rhône-Alpes (Est de la France), et ils sont généralement de condition modeste.

Pas aussi simples que cela

Un autre élément est souvent présenté pour expliquer une certaine propension des Français d’origine maghrébine à voter à gauche: la présence de nombreux Français d’origine maghrébine dans les instances des partis de gauche. Comme Najet Vallaud-Belkacem, d’origine marocaine, porte-parole du candidat socialiste François Hollande. Ou encore Malek Boutih, d’origine algérienne, secrétaire national du Parti socialiste chargé des questions sociales. Ou encore Mohamed Oussedik, d’origine marocaine, secrétaire confédéral de la CGT (Confédération Générale du Travail), la principale centrale syndicale française, chargé des questions industrielles, et que l’on dit pouvoir succéder, en mars 2013, à Bernard Thibault,le patron de la CGT.

Force est, toutefois, de constater que les choses ne sont pas de ce côté aussi simples que cela. Les Français d’origine maghrébine ce n’est plus des gens modestes qui votent à gauche. Certains ont réussi grâce à leurs diplômes, à leur travail et à leur mérite de prendre l’ascenseur social pour se propulser très haut, habitant les beaux quartiers de Paris et fréquentant les lambris de la République.

Le président Sarkozy a intégré des Français d’origine maghrébine dans ses gouvernements. Comme la très médiatique Rachida Dati, d’origine maghrébine, aujourd’hui députée européenne de l’UMP (Union pour un Mouvement Populaire), le parti de Sarkozy, et qui a occupé, de 2007 à 2009, le fauteuil de ministre de la Justice. Et Fadela Amara, militante associative, d’origine algérienne, qui a occupé le poste de secrétaire d’État chargée de la Politique de la Ville (2007-2010). Elle est, depuis 2010, inspectrice générale des affaires sociales.

Et la droite, qui a intégré de nombreux Français d’origine maghrébine, continue de brouiller les cartes. Sur la liste des candidats à la députation des législatives de juin 2012, qui succèdent à la présidentielle des 22 avril et 6 mai, nous trouvons une certaine Salima Saa. D’origine algérienne et fille de Harki, Salima Saa se présente au nom de l’UMP dans une circonscription des plus difficiles, acquise depuis des années à la gauche, à Roubaix, dans le Nord-Est de la France. Appréciée de Nicholas Sarkozy, Salima Saa a failli, si l’on croit des indiscrétions de la presse française, être la porte-parole de ce dernier, en lieu et place de Nathalie Kosciusko-Morizet.

Certes, mais le candidat Sarkozy s’est peut-être mis à dos les Maghrébins en stigmatisant les musulmans entre les deux tours de la présidentielle et avec certaines de ses initiatives comme le débat, en 2010, sur l’identité nationale. Certes, répondent certains commentateurs, mais Sarkozy a gagné à sa cause 500.000 Harkis en reconnaissant, le 14 avril 2012, et pour la première fois, la responsabilité de son pays dans leur «abandon». La France, selon lui, n’a pas protégé ces Algériens qui ont pris fait et cause pour elle. Certaines indications font état de la mort de quelque 70.000 Harkis après l’indépendance de l’Algérie.