Tunisie : La survie des microentreprises à l’épreuve des dynamiques structurelles territoriales… (3)

Par : Autres

Un dualisme intra-tissu productif local ou le poids surdimensionné et anomalique
des microentreprises dans les gouvernorats du groupe 2.

L’analyse statistique menée dans ce cadre fait ressortir un constat de taille
pour l’analyse des déterminants territoriaux de la survie des micros et petites
entreprises.

Deux modèles de structuration des tissus productifs locaux se dégagent et
concernent effectivement les deux groupes de gouvernorats étudiés précédemment.

La composition des tissus productifs locaux au sein du groupe 1 de gouvernorats
est dominée relativement par les
microentrepise à hauteur de 96% alors que les
petites et les moyennes et grandes entreprises représentent respectivement 2,3%
et 0,8% du nombre total d’entreprises au sein des gouvernorats en question.

Toutefois, il y a lieu de mentionner que les 96% de microentreprises ne
contribuent qu’à raison de 10% dans l’emploi total contre 23% pour les petites
entreprises et surtout 67% pour
les moyennes et grandes entreprises (MGE).

Il apparaît clairement à partir de ces chiffres que l’activité économique au
sein des territoires étudiés repose fondamentalement sur le dynamisme des MGE
qui semblent bénéficier concomitamment d’économies de localisation et
d’économies d’urbanisation.

Quant au groupe 2, la situation se présente différemment dans la mesure où le
mode de structuration du tissu productif se situe nettement à l’opposé de celui
caractérisant le groupe 1. En effet, les tissus productifs locaux au sein des
gouvernorats du groupe 2 sont fortement et doublement dominés par les
microentreprises au niveau du poids qui se situe à une moyenne de 99% des
entreprises répertoriées et aussi de la part des effectifs salariés qui est
portée à hauteur de 30%, soit un écart de 20% par rapport au groupe 1.

Tableau 1 : Structure des tissus productifs locaux par catégories d’entreprises

tableau-26042012_1.jpg

Cette différence est très significative et des renseignements très utiles
pourraient en être tirés quant aux propriétés de l’emploi dans les territoires
en question.

Ensuite, les petites entreprises qui ne représentent que 1% du tissu productif
emploient 36% des effectifs salariés. La situation se présente comme étant plus
problématique pour les MGE qui ne représentent que 0,1% du tissu productif et
dont la contribution à l’emploi se ramène seulement à 33% soit exactement la
moitié des réalisations observées au groupe 1.

tableau-26042012_2.jpg

Poids des Grandes entreprises (plus de 200 salariés) au sein des tissus
productifs locaux

Les tissus productifs locaux des gouvernorats du groupe 2 accusent une très
faible densité en moyennes et grandes entreprises tout en étant démesurément
dominés par les microentreprises, ce qui limite sérieusement leurs capacités de
développement territorial autonome et entretient le cercle vicieux de la
précarité et le chômage de masse au sein de la population active. Le graphique
suivant illustre clairement l’ampleur du fossé abyssal qui sépare les
gouvernorats nantis en tissus productifs locaux structurants et les autres
gouvernorats dont les tissus productifs sont complètement désarticulés :

tableau-26042012_3.jpg

En effet, le déficit impressionnant de certains gouvernorats (Tataouine, Le Kef,
Tozeur, Sidi Bouzid, Kébili…) en moyennes et grandes entreprises démontre sans
doute la faillite des politiques de localisation et d’incitation aux
investissements à réduire les écarts entre les régions et à inverser le
processus de littoralisation industrielle.

Le mode de structuration des tissus productifs dans les gouvernorats les plus
défavorisés risque de perpétuer les inégalités régionales et de fragiliser
davantage les économies locales, qui à défaut d’une amélioration de la
productivité induite par de grandes unités industrielles, s’enliseront davantage
dans l’informalité et la précarisation de franges entières des populations
occupées.

(A suivre : III- Demande solvable et dynamiques structurelles territoriales en
tant que facteurs déterminants de la démographie des microentreprises)