TRIBUNE Tunisie : Promoteurs immobliers-acheteurs, des rapports plus souvent conflictuels

Par : Autres


immobilier-25052011-art.jpgAprès avoir analysé, dans une première partie, la réforme du droit de la
promotion immobilière, maître Taoufik Chabchoub consacre cette deuxième et
dernière partie aux risques qui peuvent exister dans la relation entre le
promoteur immobilier et l’acheteur.

Relation du
promoteur immobilier avec l’acheteur


La loi interdit de disposer par la vente ou autrement d’un bien immeuble qui
n’existe pas. La seule dérogation est celle accordée au profit du secteur de la
promotion immobilière (la vente sur plan).

Vendre un bien qui n’existe pas encore suscite la méfiance. Cette méfiance est
justifiée par le fait que ledit bien pourrait ne jamais exister, ou bien exister
tardivement ou encore exister non-conforme au descriptif conventionnel (soit en
termes de matériaux, soit en termes de finition).

La méfiance peut également résulter du risque d’insolvabilité de l’acheteur.

1- Le risque de l’acheteur face à un promoteur immobilier défaillant:


Le promoteur immobilier peut devenir insolvable en cours de réalisation de son
projet. Le souci du législateur est de prévoir des mesures de sauvegarde des
droits de l’acheteur. A cet effet, différentes mesures ont été prévues:

– l’octroi de pénalités de retard plafonnées à 15% du montant des avances;

– l’obligation de délivrer une caution bancaire ou une assurance en contrepartie
des avances consenties pour couvrir le risque d’insolvabilité.

Les promoteurs immobiliers prennent soin pour restreindre le droit aux pénalités
de retard et refusent l’octroi de la caution ou de l’assurance. Ce comportement
est commun aux promoteurs immobiliers publics et privés.

La caution ou l’assurance couvrent la responsabilité du promoteur pour non
respect des délais contractuels à l’exception du retard dû pour cause de force
majeure. Elles couvrent également les conséquences de la résiliation amiable ou
judiciaire de la promesse de vente ainsi que le cas de cessation de paiement ou
de faillite du promoteur.

L’intention du législateur est louable mais restée inefficace depuis des
décennies. Peut-être à cause du coût supplémentaire que doit supporter
l’acheteur ou bien parce qu’il n’existe pas d’institutions de garantie ou
d’assurance qui acceptent de couvrir le risque d’insolvabilité.

Ne faudrait-il pas penser instituer un fonds de garantie de la promotion
immobilière?

2- Le risque du promoteur immobilier face à un acheteur récalcitrant:


Le promoteur immobilier, en établissant une promesse de vente, accepte
d’immobiliser le local exclusivement au profit de l’acheteur. Ce dernier peut
s’abstenir de régler les échéances du prix. La loi oblige le promoteur à lui
adresser une sommation par voie d’huissier de justice qui doit rester sans
réponse pendant soixante jours.

Cette mesure ne protège le promoteur immobilier qu’en apparence. En effet et
pour se délier de la promesse de vente, le promoteur immobilier doit demander la
résiliation judiciaire de la promesse de vente. La procédure au fond peut
s’avérer préjudiciable au promoteur en ce qui concerne le temps et les coûts de
procédures. Sa seule consolation c’est la possibilité d’obtenir la réparation de
son préjudice dans la limite de 10% du montant des avances consenties.

Le promoteur immobilier se trouve généralement dans l’obligation de renoncer à
la retenue des 10% pour espérer résilier à l’amiable la promesse de vente pour
pouvoir disposer immédiatement du local.

Il faudrait, a notre avis, entrevoir une solution qui consisterait à confier la
mission de prononcer la résiliation de la promesse de vente à la juridiction de
fond mais conformément à la procédure des référés.

La discordance qui prévaut depuis des décennies entre les textes régissant la
promotion immobilière et la réalité du secteur appelle à une réforme en
profondeur de cette activité dont la mission est à la fois économique, sociale
et politique.

Il faudrait rompre avec les pratiques du passé quant à la manière de réformer
les textes. La réforme, si elle sera encore une fois conçue dans l’enceinte de
l’administration, ne débouchera que sur des textes qui à peine promulgués
tomberont en désuétude.

La consultation de tous les professionnels de l’immobilier est le seul gage
d’une réforme durable de nature à contribuer à l’évolution du secteur. Toute
autre démarche sera vouée à l’échec. A bon entendeur…

* Avocat à la Cour de Cassation
Source: www.bourseimmo.com.tn