Tunisie : Dépenses des ménages en hausse, épargne en chute

Les dépenses de consommation finale des ménages tunisiens en dollar courant
seraient en très forte croissance depuis 47 ans d’après des études réalisées par
l’Université canadienne de Sherbrooke.

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Pour l’ensemble de la période 1961-2008, on a enregistré une moyenne annuelle de
7 milliards de dollars. Le plus haut niveau de dépenses de

consommation
des
ménages aurait été enregistré en 2008 avec 25,9 milliards de $, le niveau le
plus bas a été relevé en 1962 avec 472 millions de $. Pour l’année 2010, on
prévoit un montant de 18 milliards de dollars.

Par ailleurs et d’après une étude intitulée les «Ressources pécuniaires du
couple et gestion des ménages» et éditée récemment par le Centre de Recherches,
de Documentation et d’information sur la femme (CREDIF), la croissance du
pouvoir d’achat en Tunisie est de 2% en moyenne par an, avec une moyenne de
dépenses de 8.211 DT en 2005 et une
consommation individuelle de l’ordre de
1.820 DT; cette consommation était de l’ordre de 1.329 DT en 2000 et de 970 DT
en 1995.

Rappelons à l’occasion que la population active en Tunisie en 2004 s’élève à
3,328 millions de personnes. Le revenu individuel moyen a atteint les 4.389 DT
en 2007.

D’après la même étude, les dépenses en alimentation des ménages tunisiens ont
baissé de 38% en 2000 et sont tombées à 34,8% en 2005. Les dépenses du budget de
la famille tunisienne se répartissent comme suit : 22,8% pour l’habitat, 1,7%
pour le transport et 10,5% pour les soins. «Il ne faut pas prendre cela pour un
signe d’appauvrissement, assure Faiçal Derbel, économiste, c’est tout simplement
la conséquence de l’augmentation des revenus, lorsqu’une personne consacre 50%
de son salaire à l’alimentation, et que ce même salaire augmente de 40%,
forcément les besoins en alimentations ne vont pas doubler, tout juste augmenter
un petit peu».

75% des couples tunisiens sont des salariés de la fonction publique ou du
secteur privé, 6,5% exercent des activités libérales ou commercialisent des
produits maison, 0,4% ont des rentrées d’argents en provenance des propriétés,
3,6% vivent de leur retraite et 0,5% d’autres ressources. C’est sur le Grand
Tunis qu’on enregistre les plus grands indices de consommation par individu avec
2.390 dinars par an, suivi par le centre-est où on relève 2.080 dinars par
individu, le centre-ouest affiche par contre le taux le plus bas avec 1.130
dinars par an. 52,2% des Tunisiens interviewés pour les besoins de l’étude ont
déclaré que leurs revenus sont insuffisants et ne satisfont pas aux besoins de
leurs familles, 28,4% considèrent que leurs revenus sont satisfaisants et 19,4%
les déclarent suffisants si on sait les gérer et si on se restreint au
nécessaire uniquement.

Précisons, à l’occasion, que la consommation individuelle regroupe tous les
biens et services acquis par les ménages pour les besoins de la famille. On y
ajoute les différentes dépenses des ménages: aliments, boissons, vêtements, les
factures d’eau, d’électricité et de chauffage mais aussi tout ce qui se rapporte
à l’ameublement, l’équipement ménager et l’entretien courant de la maison y
compris les services de communication, à savoir Internet, téléphone, télévision
et autres dépenses touchant à la santé comme les médicaments. On y retrouve
également les dépenses en matière de loisir. En sont exclus les dépenses de
santé assumées par l’État, les investissements réalisés par les ménages tel
l’achat d’une maison.

Une chute des indices des prix à la consommation (IPC)

D’un autre côté, on a relevé, d’après l’université canadienne, une chute des
indices des prix à la consommation de 45% en 24 ans. Pour l’ensemble de la
période 1984-2008, on enregistre une moyenne annuelle de
4,9%. Et c’est en 1984
qu’on a relevé le plus haut niveau avec 8,9%, le plus bas niveau, lui, est
affiché par l’année 2005 durant laquelle il n’a pas dépassé les 2%. Entre 1984
et 2008, la chute est donc de 45%. Ceci, face à une évolution moyenne des prix
des biens et services couramment utilisés de 73,6%. Le plus haut pavé des prix à
la consommation a été atteint en 2008 avec 113,1%, son plus bas niveau a été
réalisé en 1983 avec 34,3%. Évidemment, le panier de biens et services sur
lequel sont basés les calculs évolue parallèlement aux changements des habitudes
de consommation. D’après les experts, si dans un pays,
l’IPC connaît de fortes
variations positives et que les salaires sont inchangés, le pouvoir d’achat
diminue. Inversement, si les salaires augmentent plus que les prix, le pouvoir
d’achat connaît une augmentation.

L’épargne en chute

L’épargne domestique brute des ménages tunisiens a chuté de 10% en 47 ans,
d’après l’université de Sherbrooke. «Ceci est la conséquence du style de vie du
Tunisien devenu plus exigeant pour ce qui est de la qualité de vie. Il y a 30 ou
40 ans, rares sont les familles qui disposaient de deux voitures tout comme il
n’était pas fréquent que les Tunisiens aient des résidences secondaires dans
d’autres villes, aujourd’hui, les choses ont évolué et l’on puise les fonds
évidemment dans l’épargne
», explique Faiçal Derbel.

D’après l’étude de terrain réalisée par le CREDIF, 47% des Tunisiens épargnent
des petites sommes prélevées dans leurs salaires pour les cas d’urgence, 53%
reconnaissent ne pas pouvoir le faire car ils n’en ont pas les moyens. 38% de
ceux qui épargnent sont les maris seuls, 26% les femmes seules et 36% des
couples épargnent ensemble. L’épargne, rappelons-le, est un indicateur qui
renseigne sur la capacité d’un pays à débloquer ses propres capitaux pour les
investissements sans aucune dépendance vis-à-vis des capitaux étrangers.

Le recul de l’épargne serait dû également au glissement du dinar et il a été
relevé que dans notre pays, il y a eu chute de 35% en 28 ans de la conversion
pour la parité du
pouvoir d’achat. Précisons que ce principe* a été proposé par
un économiste suédois qui se demandait à quel taux on peut stabiliser une
monnaie touchée par l’inflation. La réponse était que la valeur d’une monnaie
était déterminée par le montant des biens et des services qu’elle permet
d’acquérir, c’est-à-dire par son pouvoir d’achat interne qui évolue en sens
inverse du niveau général des prix domestiques.

Dans notre pays, devons-nous continuer à ne parler que de glissement de dinar ou
devons-nous commencer à parler de dévaluation ?