C’est
    la caravane de l’entreprise conduite par le CJD à travers la Tunisie en 2006
    qui a inspiré l’idée de l’enquête sur l’environnement institutionnel des
    affaires dans notre pays. La tournée à travers tout le territoire national a
    attiré l’attention des jeunes dirigeants sur les difficultés vécues par
    certains d’entre eux au niveau de nombre de gouvernorats. Son but est
    d’élaborer un diagnostic sur les conditions qui entourent la création de
    l’entreprise et par la suite de son exercice et de proposer un plan
    d’action. 315 jeunes chefs d’entreprises représentant 11 gouvernorats et
    employant en moyenne 17 personnes ont donc constitué de base à cette enquête
    réalisée par Karim Ben Kahla, économiste et chercheur. 
    Pour les jeunes dirigeants, l’enquête est loin d’être finie. Cette
    première présentation, ses premières conclusions constituent de point de
    départ pour une série d’enquêtes touchant toutes les régions du pays. Elle
    se poursuivrait, par conséquent, pour couvrir plus que les 11 gouvernorats
    concernés à ce jour. C’est en tous cas, ce qu’ils ont recommandé à l’issue
    de l’exposition des premiers résultats en présence de M.Abdelhmid Triki,
    Secrétaire d’Etat auprès du ministre du développement et de la Coopération
    internationale chargé de la Coopération internationale et de
    l’Investissement, ainsi que des hauts responsables des administrations
    publiques. 
    
L’enquête a porté sur les appréciations des jeunes dirigeants sur
    l’exercice des institutions sur le territoire national parce que « nombreux
    sont les économistes et les gestionnaires qui s’accordent à dire que la
    qualité des institutions est déterminante pour le développement des affaires
    et des investissements et l’amélioration de la compétitivité des entreprises
    et pour l’optimisation de la gestion des ressources de l’Etat » écrit Karim
    Ben Kahla, parlant des enjeux de l’étude. Il est approuvé par Abdelhmid
    Triki qui a assuré les JD de tout son soutien et celui du gouvernement pour
    œuvrer à améliorer le climat des affaires. Le Secrétaire d’Etat a assuré
    qu’un climat d’affaires approprié est essentiel pour réussir à s’imposer
    dans un monde qui se transforme en une zone de libre échange. Il a appelé à
    une plus grande maîtrise des circuits de distribution et une forte expansion
    du marché financier. M.Triki a également exprimé ses souhaits pour que les
    rivalités entre les entreprises se transforment en alliances pour qu’elles
    soient plus compétitives et renforcent leur intégration à l’économie
    mondiale. Le but étant d’arriver à s’ajuster à la grande vitesse à laquelle
    évoluent les entreprises à l’échelle planétaire. Dans d’autres pays, affirme
    t-il, des mesures sont prises de manière ininterrompue pour améliorer
    l’environnement institutionnel et faciliter la vie aux entrepreneurs, d’où
    l’importance des enquêtes semblables à celle réalisée par le CJD qui
    permettent aux pouvoirs publics d’évaluer les situations d’une région à
    l’autre, de pallier aux insuffisances et d’apporter les réponses qu’il faut
    aux problèmes existant sur terrain. « Tous les pays reconnaissent
    l’importance des classements de « Doing business », Davos et autres de
    dimension internationale. Ce qui ne nous empêche pas, d’accorder
    l’importance qu’elles méritent aux enquêtes réalisées à l’échelle nationale
    sur le climat des affaires» a t-il déclaré. Le Secrétaire d’Etat a, à ce
    propos, exprimé ses encouragements au CJD et sa prédisposition à coopérer
    avec le Centre pour développer des études et enquêtes sur des thématiques
    concernant l’entreprise dans notre pays. Il a rappelé que l’Institut
    tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives a lancé une enquête
    pour évaluer l’environnement des Affaires publiée sur le site de l’UTICA. «
    Pour qu’une entreprise puisse être compétitive, forte, solide et qu’elle
    aide à l’intégration d’un pays dans l’économie mondiale, il faut qu’elle
    puisse évoluer dans un bon environnement » a assuré Abdelhamid Triki. Ce
    qui, sans occulter les efforts du gouvernement pour améliorer le climat des
    affaires en Tunisie, n’est pas le cas à ce jour. Le diagnostic de l’enquête
    est clair : tout n’est pas rose pour les jeunes dirigeants. Ils n’ont pas
    manqué de le mentionner.
    Les réponses nuancées d’un gouvernorat à un autre et soumises à un barème
    de 1 à 5 restent au dessous de 3 soit inférieures au seuil de satisfaction
    préconisé pour ce qui est de la qualité des prestations administratives.
    Pourtant, peut-on nier le fait qu’une série de réformes administratives a
    été lancée depuis le début des années 90 pour la simplification des
    procédures, la modification des comportements et appelant à une meilleure
    gouvernance ? Depuis près de 20 ans, les pouvoirs publics n’ont pas cessé de
    mettre en place des mécanismes visant à encourager les PME et à simplifier
    les formalités pour la création des entreprises et l’élargissement des
    secteurs d’activités pour lesquels on n’exige pas d’autorisations. Au vu des
    résultats de l’enquête, les JD reprochent à l’administration un manque
    d’éthique et un déficit au niveau de la communication. Selon eux, la machine
    administrative reste relativement lourde, lente et imprévisible.
Le budget formation pour les jours de vaches maigres
    Si les lois et les réglementations évoluent, qu’est ce qui bloque dans ce
    cas ? Leur application ? Et dans ce cas, pourquoi seraient-elles mal
    appliquées ? Manque de volonté ? Mauvaises interprétations ? Ou ignorance
    tout simplement ?
    Un intervenant au débat sur le climat des affaires en Tunisie, a juré ses
    grands dieux qu’un représentant de l’administration lui a assuré que le
    décret d’application qu’il citait était erroné !!! Ce manque d’information
    ou plutôt de formation expliquerait-il la défaillance de notre
    administration malgré toute la bonne volonté des autorités publiques ?
    Possible. Car la formation est le parent pauvre de l’Administration en
    Tunisie. Selon un haut responsable administratif, dans certains ministères,
    les DAF* (Directions administratives et financières) garderaient le budget
    alloué à la formation aux jours de vaches maigres pour pallier aux
    insuffisances financières touchant d’autres services ! Allons donc, nous
    parlons de mise à niveau et nous critiquons une Administration qui n’est pas
    à jour par rapport aux avancées vécues à d’autres niveaux ! L’Administration
    ne suit pas parce qu’elle n’est simplement pas assez outillée! Cela rappelle
    un peu certaines banques qui emploient aux back office et aux affaires
    internationales, des cadres qui n’ont jamais voyagé et qui ne maîtrisent
    même pas la langue anglaise, sans jamais penser à les former ! Comment
    peut-on accompagner le développement d’un pays et renforcer son économie,
    lorsque ceux qui doivent veiller à l’application des règles, des lois et des
    nouveaux mécanismes ne les maîtrisent même pas ? Allons donc chers «
    Daffeurs » (Directeurs administratifs et financiers) les termes formation,
    recyclage, stage, ne sont pas faits pour les cancres et les imbéciles. Ils
    ont été conçus par des esprits éclairés, des planificateurs qui croient que
    pour accompagner le développement d’un pays, il faut être à jour et pour
    être à jour, il faut se former en alternance continuellement et
    régulièrement. L’économie de bouts de chandelles pourrait être nocive,
    jamais bénéfique. Parler de la mise à niveau dans le secteur privé lorsque
    le public ne suit pas relèverait presque de l’absurde. C’est comme organiser
    une course entre une Porche et un OM 40…Imaginez le résultat !
Une urgence : la confiance
    Pour résister aux aléas de l’économie qu’ils soient internes ou externes,
    il faut s’intégrer et s’adapter. Pour s’adapter, il faut investir, pour
    investir, il faut un cadre institutionnel adéquat et propice et il faut
    surtout être patriote et confiant. Pas uniquement en la justesse et le
    succès de l’activité économique que l’on a choisie mais également et surtout
    en nos propres institutions, qu’elles soient des administrations, des
    organismes d’encadrement, des banques ou des fonds de développement.
    Or, le capital confiance des jeunes entrepreneurs en leurs institutions
    laisse à désirer. Il est même soumis à rude épreuve d’après les résultats de
    l’enquête. Ils déplorent l’absence de transparence et de professionnalisme
    des agents administratifs.
    L’administration fiscale est la plus faiblement notée, on la juge
    sévèrement à Gabes, au Kef, à Siliana et à Sfax. Elle est mieux perçue à
    Nabeul. C’est pareil pour les prestations rendues par les agents de douanes
    ou ceux représentant les collectivités locales. Quant aux partenaires
    publics et parapublics, ils sont notés différemment selon qu’on soit «
    Nabeuliens », « Sfaxiens » ou originaire de la région de Gabes ou de Siliana.
    Les collectivités publiques* diffèrent dans leurs pratiques et leur
    prévisibilité d’une région à une autre, ce qui, conjugué à d’autres
    facteurs, expliquerait éventuellement la pauvreté du tissus entrepreneurial
    dans certaines zones du pays.
    L’enquête qui se voulait un outil d’analyse de la Tunisie profonde a,
    entre autres, attiré l’attention sur les disparités entre les différentes
    régions non seulement sur le plan institutionnel ce qui pourrait trouver des
    remèdes grâce à de bonnes doses de volonté, de vigilance et de rigueur de la
    part des pouvoirs publics mais à des différences d’ordre culturel cette
    fois-ci. A-t-on la même capacité d’entreprendre et d’encourager
    l’entreprenariat sur tout le territoire national ? Non. L’enquête nous le
    dit. A Gabes, on n’a pas les mêmes réflexes pour ce qui est de faciliter la
    vie du jeune entrepreneur qu’à Nabeul ou à Sfax où la culture
    entrepreneuriale est plus développée par rapport aux autres régions du pays.
    Le manque de la culture d’entreprise chez les représentants des
    administrations est manifeste dans certains gouvernorats à l’exception des
    deux gouvernorats cités plus haut.
    L’enquête a exprimé par ailleurs la satisfaction des jeunes entrepreneurs
    par rapport aux avantages accordés aux entreprises même si elle reste
    variable. 
    Parce que nous faisons partie du même camp, un camp appelé Tunisie, le
    but est de réussir à établir un climat de confiance et des relations de
    complémentarité entre les administrations et les entreprises. Les JD ont
    appelé à mettre en place un «Baromètre Régional des Affaires» et des plans
    d’action spécifiques susceptibles d’améliorer la qualité et la perception
    des prestations fournies au niveau de chaque région et ont invité les
    administrations à plus de rencontres et de concertations.
    Car si tout n’est pas rose pour l’entreprise tunisienne, tout n’est pas
    gris non plus. Et d’après le visuel de l’enquêté présenté par Jalel
    Belkhoudja, chargé de la communication au CJD, le gris se dégraderait plutôt
    vers la couleur blanche symbole de clarté et de transparence. Les
    représentants des différentes administrations tunisiennes se sont montrés
    prêts à soutenir les jeunes dirigeants à tous les niveaux pour les aider à
    exercer leurs activités sans trop de heurts et en bonne intelligence.
    * Il est regrettable que le représentant du ministère de l’Intérieur
    n’ait pas pu assister au débat sur l’environnement institutionnel, il aurait
    pu éclairer l’assistance sur certains points se rapportant aux collectivités
    locales.
Lire aussi :
– «Pour qu’il y est des corrompus, il faut qu’il y ait des corrupteurs»
		


