Alcatel veut céder sa part dans Thales, concentration en vue dans la défense

[30/10/2008 18:07:05] PARIS (AFP)

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énéral du groupe franco-américain Alcatel-Lucent, Ben Verwaayen à Paris le 30 octobre 2008 (Photo : Eric Piermont)

L’équipementier en télécommunications Alcatel-Lucent envisage de céder sa part de 20,8% dans l’électronicien Thales convoitée par Dassault et EADS, une opération qui accélèrerait la concentration de l’industrie de la défense en France, souhaitée par le gouvernement.

Le groupe franco-américain a déclaré jeudi, pour la première fois, qu’il examinait “en ce moment toutes les options stratégiques possibles, y compris une éventuelle cession”.

“Nous pouvons collaborer avec Thales sans nécessairement avoir de lien capitalistique avec cette société”, a expliqué le nouveau directeur général Ben Verwaayen.

“A quoi bon” garder ces actifs ?, s’est-il interrogé, soulignant que la priorité numéro 1 désormais était de “faire du cash”.

“Si quelqu’un nous approche avec un bon prix, pourquoi pas?”, a-t-il ajouté, se refusant à commenter d’éventuelles offres de l’avionneur Dassault et du groupe EADS.

Ce désengagement s’inscrit dans le cadre d’une “revue stratégique complète” du groupe qui accumule les pertes depuis la fusion fin 2006 entre le français Alcatel et l’américain Lucent, a souligné M. Verwaayen, ajoutant qu’il donnerait plus de détails “début décembre”.

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ès Angénieux, le 17 octobre 2008 à Saint-Héand (Photo : Fred Dufour)

Portée par cette annonce, l’action Alcatel-Lucent s’envolait de 21,29% à 2,04 euros alors que Thales progressait de 2,49% à 32,13 euros dans un marché parisien en hausse de 0,96% vers 15H30 (14H30 GMT).

La cession de sa part dans Thales apporterait à Alcatel-Lucent “une flexibilité financière dans une conjoncture difficile, alors que le marché doute de la capacité du groupe à se redresser”, selon un analyste d’Exane BNP Paribas, Alexandre Peterc.

Pour Thales, l’arrivée d’un nouvel actionnaire pourrait s’avérer une bonne nouvelle: Alcatel “n’a jamais été très stable” et l’ambition de Thales est “de trouver un actionnaire qui soit stable et utile”, note Jean-Paul Hebert, universitaire spécialiste de l’industrie de défense.

Thales, dont l’Etat détient 27%, est aussi considéré comme un actif stratégique dans la concentration d’un secteur militaire français et européen encore trop éparpillé face à la concurrence américaine selon Paris. Une analyse consacrée par le Livre blanc sur la défense.

Ses systèmes sont présents aussi bien dans l’aéronautique civile et l’espace, la sécurité et la défense – depuis les avions de combat Rafale jusqu’aux satellites, en passant par les frégates.

Le groupe Dassault, qui possède déjà 5% de Thales, a fait savoir qu’il avait “l’intention d’étudier l’opportunité de l’achat” de la part d’Alcatel-Lucent. Avec une trésorerie disponible de 4,70 milliards d’euros fin juin, l’avionneur en aurait les moyens (1,29 milliard au cours de clôture de mercredi).

“L’intégration verticale autour du Rafale et de ses systèmes générerait sans doute des synergies, mais cela resterait secondaire compte tenu du poids réduit de ces activités chez Thales”, soulignait récemment Olivier Brochet, analyste chez Natixis Securities.

En se rapprochant de nouveaux métiers, Dassault poursuivrait en fait “une stratégie de diversification” de ses activités, à l’heure où les perspectives du programme Rafale ne sont pas bonnes, explique M. Hebert.

Reste l’hypothèse d’une offre du groupe européen EADS, dont les intentions demeurent floues. Sa position officielle reste qu’il n’a transmis “aucune offre engageante” pour le bloc d’actions Thales, alors qu’une source proche du dossier évoque une offre début octobre le valorisant à 1,81 milliard d’euros.

Mais “EADS forme déjà un tel conglomérat qu’il paraît difficile qu’il intègre aussi cette dimension d’électronique”, juge l’universitaire.