[20/10/2008 22:28:39] PARIS (AFP)
ésident de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, le 20 octobre 2008 à Washington (Photo : Tim Sloan) |
Les grands pays industrialisés s’acheminaient lundi vers des mesures de relance économique afin de combattre le spectre de la récession et du chômage, redonnant des couleurs à des marchés boursiers en franche hausse.
Le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, s’est prononcé lundi en faveur d’un nouveau plan de relance de l’économie aux Etats-Unis. Une idée à laquelle la Maison Blanche s’est déclarée ouverte.
Devant “un certain risque de ralentissement prolongé, l’examen d’un plan budgétaire par le Congrès dans le contexte actuel semble approprié”, a affirmé M. Bernanke, tout en recommandant des mesures pour faciliter l’accès au crédit.
Les démocrates, qui contrôlent le Congrès, sont en faveur d’un plan de relance de 150 milliards de dollars.
En France, le Premier ministre français François Fillon a annoncé des mesures de stimulation, avec un plan de soutien de 5 milliards d’euros pour les collectivités locales et une augmentation de 3 à 4% des crédits accordés par les banques.
En Europe, les Bourses ont clôturé en forte hausse: Londres a gagné 5,41%, Paris 3,56% et Francfort 1,12%, Milan 2,48% et Madrid 2,99%.
Cependant, Jimmy Yates, courtier chez CMC Markets à Londres, a jugé ce rebond fragile: “Ce ne sont pas les craintes d’un nouveau plongeon à court terme qui manquent”, a-t-il averti.
Les places asiatiques avaient montré la voie: Tokyo a terminé en hausse de 3,59%, Hong Kong de 5,3% et Shanghai de 2,25%.
La Bourse de New York évoluait dans le vert, le Dow Jones gagnant 2,23% et le Nasdaq 1,50% vers 17H45 GMT.
Les marchés ont visiblement apprécié l’accord entre Européens et Américains sur une série de sommets internationaux afin de réformer le système financier, dont le premier pourrait avoir lieu en novembre à New York, juste après l’élection présidentielle américaine.
Des mesures de relance sont en préparation à travers le monde pour éviter une contagion de la crise financière à l’économie “réelle”.
En effet, le nombre de chômeurs dans le monde “pourrait passer de 190 millions en 2007 à 210 millions fin 2009”, a estimé le directeur général du Bureau international du travail (BIT), Juan Somavia.
à la Bourse de New York, le 13 octobre 2008 (Photo : Spencer Platt) |
“Ce n’est pas seulement une crise de Wall Street, c’est aussi une crise de toute la rue”, appelant à “une action rapide et coordonnée des gouvernements pour prévenir une crise sociale qui “pourrait s’avérer sévère, longue et globale” a résumé M. Somavia.
Pour l’heure, l’Union européenne exclut un grand plan coordonné de relance économique, à l’instar du sauvetage du secteur bancaire.
Le gouvernement allemand envisage cependant “des mesures ponctuelles ciblées” d’aide à la conjoncture, alors que l’Allemagne frôle la récession.
L’économie allemande a probablement stagné au troisième trimestre, après avoir reculé de 0,5% au deuxième, selon la Bundesbank.
La Grande-Bretagne va augmenter ses dépenses publiques pour tirer l’économie hors de la récession qui la menace, selon le ministre des Finances britannique Alistair Darling.
Les marchés restent suspendus aux indicateurs économiques, en attendant cette semaine une salve de résultats d’entreprises aux Etats-Unis et en Europe, permettant de mesurer l’impact de la crise financière.
Ils ont été quelque peu rassérénés par l’indice composite des indicateurs économiques américains, censé préfigurer la conjoncture des six prochains mois, qui a rebondi de 0,3% en septembre, après des reculs de 0,9% en août et 0,7% en juillet.
Le marché des prêts interbancaires, dont la paralysie était au coeur de la crise financière, connaissait pour le septième jour consécutif une forte détente de ses taux.
“Si la crise financière est proche de son pic, les difficultés sur le front de l’économie réelle sont au contraire de plus en plus frappantes”, estimaient à Paris les analystes de BNP Paribas.
Selon le BIT, le nombre de “travailleurs pauvres” qui vivent avec moins de un dollar par jour pourrait croître de 40 millions tandis que celui des personnes gagnant moins de deux dollars pourrait augmenter de 100 millions entre 2007 et 2009.
L’ONU a d’ailleurs exhorté les pays riches à ne pas diminuer l’aide au développement et l’assistance humanitaire, en dépit de la crise financière.
ège de l’OIT à Genève (Photo : Fabrice Coffrini) |
“Cette crise est appelée à durer”, a déclaré la ministre française de l’Economie Christine Lagarde, jugeant “très probable que la croissance n’atteigne pas 1%” comme prévu par le budget 2009.
Au Japon, le gouverneur de la Banque centrale a affirmé que l’économie continuerait à stagner, après le pire recul depuis sept ans au deuxième trimestre (-0,7%). Pour de nombreux analystes, la deuxième économie mondiale est déjà entrée en récession.
Les pays émergents qui se croyaient blindés contre la crise financière accusent à leur tour le coup, après des années de boom économique.
La croissance de la Chine est ainsi passée pour la première fois depuis 2005 sous la barre des 10% sur les trois premiers trimestres de 2008.
En Inde, la croissance va ralentir sous l’effet de la crise mondiale, a reconnu le chef du gouvernement Manmohan Singh. Pour 2008-2009, elle n’atteindrait que 7% à 7,5%, contre 9% en 2007-2008.
Seul le Premier ministre russe Vladimir Poutine a estimé que l’économie russe “était assez bien préparée contre les chocs extérieurs de longue durée”.
Le secteur bancaire restait sous pression, après l’annonce d’un renflouement du capital d’ING par l’Etat néerlandais et d’une perte de 600 millions d’euros par la banque mutualiste française Caisse d’Epargne, qui a contraint sa direction à la démission.
A Paris, le titre de la banque Société Générale a été fortement chahuté, avant de clôturer en baisse de 3%, victime de rumeurs de marché sur une éventuelle augmentation de capital.
La Suède prévoit 152,2 milliards d’euros pour aider son secteur financier et la Finlande est prête à mobiliser 54 milliards d’euros pour ses banques en cas de besoin. Le Parlement autrichien a approuvé un plan de 100 milliards pour le secteur bancaire.
Et en dépit de l’optimisme officiel, les banques russes ont reçu plus de 11 milliards d’euros de l’Etat.
En Ukraine, les législatives anticipées ont été reportées du 7 au 14 décembre pour permettre l’adoption de lois contre la crise financière.
Quant aux cours du pétrole, ils continuaient à remonter lundi au-dessus de 70 dollars le baril, très en-dessous des sommets de 147 dollars atteints en juillet.
L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) devrait décider vendredi de baisser sa production afin de soutenir les prix, lors d’une réunion extraordinaire.
Une décision qui risque de mettre “encore davantage en danger l’économie mondiale”, selon le cabinet londonien Centre for Global Energy Studies (CGES).