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    Les peuples heureux n’ont pas 
    d’histoire, prétendait le philosophe allemand Friedrich Hegel. Pas plus 
    qu’ils ne font d’histoires. Non. Les peuples heureux, optimistes et 
    enthousiastes travaillent avec engagement, produisent les employés les plus 
    motivés, rétorquent les théoriciens de l’idéologie néolibérale, en vogue à 
    l’échelle planétaire après le démembrement du projet socialiste dans la 
    patrie du bolchévisme et la déconfiture de l’idéal égalitariste un peu 
    partout dans le monde. 
      
    «En fait, il faut examiner, en dépit des 
    tendances globalisantes inhérentes à la mondialisation des échanges 
    économiques, la question de l’implication professionnelle sous l’angle 
    culturel et non plus seulement individuel», nous dit M. Aissa Baccouche, 
    sociologue et figure notoire de l’intelligentsia tunisienne pour qui le 
    degré d’engagement entrepreneurial d’une population varie fortement d’un 
    pays à un autre et dépend, insiste-il, de facteurs comme le caractère 
    national et les valeurs culturelles irriguées depuis des générations. Le 
    désir de se surpasser au travail est palpable, insiste notre interlocuteur, 
    dans les pays où la population est douée pour voir la face riante des 
    événements, se dit heureuse, développe un tempérament extraverti et 
    s’investit plus fortement dans une tâche dont elle perçoit la face positive 
    ; par contre, la nonchalance dans les lieux de travail est manifeste dans 
    les régions où les habitants ont développé des tendances négatives telles 
    que l’anxiété ou le cynisme. 
      
    Et la Tunisie dans tout cela ? Il s’agit 
    d’un pays, conclut notre vis-à-vis, où les émotions négatives et positives 
    s’avèrent également fortes au niveau de l’implication professionnelle. La 
    raison ? Les Tunisiens, dans leur majorité, dit-il, possèdent généralement 
    des attentes très élevées à l’égard de leur travail. Ils exigent sécurité de 
    l’emploi, bonnes rémunérations et considération, ce qui explique, parfois, 
    le caractère émotionnel de leur engagement et la grande capacité de 
    résilience développée pendant les moments de crise socio-économique. 
      
    «Nos compatriotes sont des éternels 
    râleurs. Dès lors que les attentes ne sont pas remplies, la déception 
    guette. En revanche, si ces espoirs sont réalisés, c’est la satisfaction qui 
    domine instantanément. Alors, moins on en attend, plus on est comblé», clame 
    Hadj El Fehri, président du Conseil d’affaires tuniso-marocain et figure 
    légendaire du patronat du Cap-bon, qui appelle la jeune génération montante 
    des managers tunisiens à favoriser une bonne communication interne dans les 
    entreprises, à promouvoir une gestion participative à même de neutraliser le 
    vieil antagonisme capital-travail et à prendre en compte le facteur des 
    attentes afin de stimuler la productivité et renforcer, chez les 
    collaborateurs, la sensation de constituer une seconde famille avec les 
    collègues dans les différents lieux du travail. 
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