Je suis un modèle à modules

 
 

model.jpgJe suis un
modèle à modules ne vous méprenez pas mes chers lecteurs, je ne suis ni chez
Dior ni chez L’Oréal, je suis tout simplement ce que les spécialistes
appellent un modèle mathématique utilisé dans les différents domaines pour
comprendre des mécanismes et dimensionner des ouvrages. Et il y a des gros,
des petits, des complexes, des simples, des chers, des pas chers, des
gratuits, mais il y a aussi des modèles que l’on vend par tranche comme si
on achetait par petit bout une maison que l’on construit.

Alors, ces temps-ci, je suis à la mode chez les concepteurs : dès qu’un
problème se pose, les experts vous diront on va modéliser ça, ensuite, après
quelques passages à la machine, ils vous apportent une solution en vous
disant c’est le modèle qui a dit, et quand le modèle a dit, il n’y a pas de
discussion, on applique et on paie.

Je
ne vais pas revenir sur les modèles importés de toutes pièces qui n’ont
aucune relation avec l’environnement local, ça c’est comme l’histoire des
chasses neiges dans un pays d’Afrique noire dans les années 60.

Revenons à ce pauvre modèle qui, un jour, s’est perdu dans les dédales de la
législation des marchés publics : une société nationale demandait à ce qu’on
lui conçoive un modèle dans un domaine technique bien précis pour lui
permettre d’évaluer ses avants métrés estimatifs des travaux en régie,
précédé d’une étude technique bien charpentée. Le concept était simple et
demandait l’intervention d’un expert du domaine, d’un bon informaticien et
d’un spécialiste en bases de données.

Une
bonne équipe m’a conçu et m’a proposé sa solution de base à 209.000 DT. Et là, mes ennuis commencèrent quant à la filière de
mon acquisition :


les uns s’appuyant sur la nouvelle législation et par précaution
considérèrent qu’il s’agissait d’une étude et donc devant franchir les
frontières des 4 commissions ;


les autres, considérant que c’était de l’informatique, insistèrent sur le
fait que la commission départementale était compétente, donc on ne passait
que par 3 commissions ;


les derniers considérant que le terme «avants métrés estimatifs des travaux
en régie» primait et qu’on pouvait traiter le problème au niveau de la
commission locale 3 mois de discussions et de réunions de commissions et on
transmit le dossier au patron qui demanda des explications à qui de droit.

Et
de bureau en bureau, je fus trimbalée durant 12 mois et pendant ce temps là,
la validité de l’offre fut dépassée et le client relança l’appel d’offres et
précisa qu’il s’agissait d’une étude informatique et le moins disant fut à
950.000 DT et tout le monde fut content, on restait au stade de la
commission départementale.

Le
temps que dura la confection de cette étude de 2 ans, on découvrit que les
Américains avaient fait le même travail en le poussant plus loin et que les
5 premiers modules étaient gratuits et le dernier téléchargeable pour 50
dollars ; le patron poussa un ouf de désespoir devant toute la paperasse
qu’il devait remplir pour virer 50 $ par Internet, car c’était plus facile
de payer 950.000 DT par les circuits classiques que de faire un virement de
50 $ sans avoir un justificatif sur support papier en 6 exemplaires.

 


Nb : Cette histoire
est purement fantaisiste et toute relation avec une situation vécue ou
réelle est une simple coïncidence.