Le Conseil africain du cancer du sein (ABCC), créé en 2024, œuvre en faveur des objectifs de l’OMS.

Il élabore et défend des politiques concrètes et évolutives qui améliorent la lutte contre le cancer du sein. En se connectant et en réunissant des dirigeant.e.s, des décideurs politiques et des expert.e.s du continent, le Conseil soutient les efforts des gouvernements pour faire du cancer du sein une priorité nationale de santé et s’efforce de soutenir la collaboration entre les parties prenantes.

Dr Kgothatso Motumi, Coprésidente de ce Conseil africain et directrice générale de Roche Products, expose ici la situation alarmante en Afrique et les perspectives de la lutte.

D’après l’analyse scientifique des données actuelles, quelles sont les principales causes du cancer du sein dans le monde ?

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent dans le monde. Il est la principale cause de décès par cancer chez les femmes, touchant de manière disproportionnée les pays à revenu faible et intermédiaire. Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), certains facteurs augmentent le risque de cancer du sein, notamment l’âge avancé, l’obésité, la consommation nocive d’alcool, les antécédents familiaux, l’exposition aux radiations, le tabagisme et les aspects reproductifs (comme l’âge du début des règles et l’âge de la première grossesse). Environ la moitié des cancers du sein se développent chez des femmes qui ne présentent aucun facteur de risque identifiable autre que le sexe (féminin) et l’âge (plus de 40 ans).

Pourquoi l’Afrique enregistre-t-elle des taux élevés de cancer du sein ?

L’Afrique détient le taux le plus élevé du cancer de sein dans le monde. En Afrique Subsaharienne, par exemple, l’incidence a augmenté de 247% entre 1990 et 2019. D’ici 2045, l’OMS prévoit que le nombre de cas doublera dans cette région pour atteindre 400 000. Cette tendance est due à l’augmentation de l’espérance de vie sur le continent, combinée à des changements de mode de vie, dont nous citons cinq facteurs principaux de risques : le tabagisme, la consommation d’alcool, un poids corporel élevé, une glycémie élevée et le manque d’exercice physique.

Comment expliquez-vous les faibles taux de survie des patientes en Afrique ?

 Le continent africain affiche aussi les taux de mortalité par cancer du sein les plus élevés au monde : seulement 50 % des femmes devraient survivre cinq ans après le diagnostic, contre 90% dans les pays à revenu élevé. Ces faibles taux de survie sont dus à un diagnostic tardif : 77 % des femmes ne sont diagnostiquées qu’au stade 3 ou 4 de la maladie, alors que le traitement est beaucoup plus difficile. Les systèmes de santé africains doivent investir davantage pour offrir à toutes les femmes une prise en charge complète du cancer du sein qui permettra d’enrayer cette hausse des taux. Nous devons mettre en place des programmes de sensibilisation de grande envergure pour apprendre aux femmes à identifier les symptômes du cancer du sein et à prendre les mesures nécessaires. Ensuite, nous devons bien sûr garantir l’accès à des soins de meilleure qualité là où elles se trouvent, afin qu’elles puissent être diagnostiquées rapidement et orientées vers les traitements appropriés. Les pays africains doivent donner la priorité au renforcement du personnel de santé spécialisé dans la cancérologie et au développement des infrastructures pour offrir les soins que toutes les femmes méritent.

Pourquoi le Conseil africain du cancer du sein a-t-il été créé ?

Le Conseil africain du cancer du sein Africa Breast Cancer Council a été créé l’année dernière (2024) en réponse à cette tendance alarmante et à l’aggravation des taux de mortalité due au cancer du sein. Ce Conseil rassemble des femmes africaines de premier plan – notamment des économistes, des professionnelles de la santé, des oncologues, des Premières dames et d’anciennes ministres – qui s’engagent à faire progresser la prise en charge du cancer du sein en Afrique. S’appuyant sur l’expérience et les connaissances de ses membres, le Conseil partage des données probantes avec les gouvernements africains et plaide en faveur de changements systémiques susceptibles d’accroître les taux de survie des femmes.

Quelles sont les principales initiatives de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et du Conseil africain du cancer du sein (ABCC) pour lutter contre le phénomène actuel des infections par le cancer du sein ?

L’Organisation mondiale de la Santé a lancé son Initiative mondiale contre le cancer du sein en 2021, qui a défini trois piliers pour la lutte ainsi que des objectifs régionaux à atteindre par les pays d’ici 2040.

Ces objectifs sont axés sur :

  • Le dépistage précoce : augmenter la proportion de cancers du sein détectés aux stades précoces (I et II) de 30% à 60%.
  • L’accélération du diagnostic : réduire le délai moyen entre la reconnaissance des symptômes et le traitement de 183 jours à 60 jours.
  • L’amélioration des résultats thérapeutiques : améliorer les taux de survie afin que huit femmes sur dix diagnostiquées avec un cancer du sein survivent, contre cinq sur dix actuellement.

Le Conseil africain du cancer du sein (ABCC) œuvre en faveur des objectifs de l’OMS en élaborant et en défendant des politiques concrètes et évolutives qui améliorent les résultats de lutte. En se connectant et en réunissant des dirigeant.e.s, des décideurs politiques et des expert.e.s, le Conseil soutient les efforts des gouvernements pour faire du cancer du sein une priorité nationale de santé et s’efforce de soutenir la collaboration entre les différentes parties prenantes.

Comment le Conseil africain du cancer du sein compte-t-il collaborer avec les institutions de santé publique des pays africains pour lutter contre le cancer du sein ?

Un aspect essentiel du travail du Conseil africain du cancer du sein consiste à réunir des acteurs des secteurs public et privé. Notre rôle n’est pas de mettre en œuvre la lutte, mais de servir de canal de collecte et de partage d’idées et de données probantes sur les solutions efficaces sur le continent. Les institutions de santé publique ont un rôle essentiel à jouer dans ces discussions, et les partenariats public-privé s’avèrent précieux dans de nombreux pays africains, où ils ont permis la création de centres de cancérologie plus spécialisés.

Comment le Conseil travaille-t-il pour développer et promouvoir des initiatives visant à atteindre les objectifs fixés ?

Le Conseil (ABCC) s’efforce d’identifier et de mettre en lumière les lacunes critiques que les pays africains doivent combler pour accélérer le diagnostic et le traitement efficace du cancer du sein, en sensibilisant à cette maladie en tant que priorité nationale de santé. Nous œuvrons à favoriser le dialogue politique et à soutenir les changements de politiques dans les pays prioritaires, en mettant l’accent sur le financement public et l’allocation de ressources pour l’éducation, le traitement et les soins liés au cancer du sein. Nous plaidons également en faveur des ressources nécessaires pour améliorer l’accès aux soins et explorer des solutions innovantes pour la lutte, en mettant l’accent sur la création de partenariats stratégiques et en facilitant la collaboration entre les secteurs public et privé.

Qui sont les personnes et les partenaires clés du Conseil africain du cancer du sein ?

Je suis très fière de coprésider un groupe de femmes pionnières venues de tout le continent africain. Au Ghana, nous accueillons Dr Verna Vanderpuye, consultante principale au Centre national ghanéen de radiothérapie, d’oncologie et de médecine nucléaire. Verna a reçu le Prix international de mentorat « Femmes qui conquièrent le cancer » en 2019 et est également trésorière de l’Organisation africaine pour la recherche et le traitement du cancer. Parmi nos autres membres ouest-africains, on compte, du Nigéria, S.E. Dr Zainab Shinkafi-Bagudu, présidente de l’Initiative des Premières dames contre le cancer et présidente élue de l’Union internationale contre le cancer (UICC). De Guinée-Bissau, nous accueillons Dr Magda Robalo, ancienne ministre de la Santé, actuellement présidente et cofondatrice de l’Institut pour la santé mondiale et le développement.

Le Conseil bénéficie aussi du soutien de Roche. Pour plus d’informations, visitez le site : https://africa.roche.com/stories/africa-breast-cancer-council.

La dernière conférence du Conseil africain du cancer du sein à Kigali en mars 2025 a été un succès. Comment de tels événements peuvent rassembler les meilleur.e.s expert.e.s pour trouver des solutions au problème en Afrique ?

L’événement que nous avons organisé à Kigali (Rwanda), en mars 2025, portait sur le thème « Combler les disparités : faire progresser la prise en charge du cancer du sein chez les femmes africaines ». Il s’est tenu dans le cadre de la Conférence internationale de l’Agenda africain pour la santé, un important rassemblement biennal de leaders de la santé. Nous avons eu le plaisir d’accueillir des ministres et de hauts fonctionnaires de plusieurs pays africains qui ont échangé des idées, des témoignages et des expériences réussies. Nous avons aussi l’intention d’organiser davantage d’événements de ce type en partageant des preuves d’impact et en amplifiant les exemples de réussite.

Quelles sont les principales attentes du Conseil africain en matière de prévention et de prise en charge du cancer du sein au cours de la prochaine décennie ?

Les membres du Conseil africain du cancer du sein sont animé.e.s par une vision commune : un avenir où chaque femme africaine aura accès à des soins rapides, équitables et vitaux. Dans un premier temps, nous intervenons dans dix pays identifiés comme étant à l’origine de progrès transformateurs dans la prise en charge du cancer du sein et inspirant des actions sur tout le continent. Ces pays prioritaires sont : l’Algérie, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, le Ghana, le Kenya, le Maroc, le Nigéria, le Rwanda, l’Afrique du Sud et la Tunisie. Le Conseil ne met pas en œuvre ni ne finance les soins contre le cancer. Mais en nous réunissant, en nous connectant, en recueillant des informations et en les partageant, nous offrons des orientations politiques pour soutenir les gouvernements dans leur démarche visant à transformer la prise en charge du cancer du sein pour les femmes. En travaillant à la réalisation des objectifs de l’OMS, nous sommes convaincus que le Conseil peut impulser des changements politiques significatifs et coordonnés, alignés sur les objectifs régionaux existants.