Le vernissage de l’exposition photographique ” Le Piazze [In]visibili ” (Les Places Invisibles), projet de l’Italien Marco Delogu, a eu lieu mardi 1er juin 2021, à la salle de l’Institut Culturel Italien à Tunis (IIC).

Organisée à l’occasion de la Fête de la République italienne, l’exposition a été marquée par la présence du ministre tunisien des Affaires Etrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, Othman Jerandi, de l’ambassadeur italien à Tunis, Lorenzo Fanara, et de la directrice de l’IIC, Maria Vittoria Longhi.

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Marco Delogu, concepteur et curateur de cette exposition a pu être joint en ligne par l’agence TAP depuis sa résidence en Italie. Ce photographe, curateur, éditeur et auteur de plus de 25 livres, vit à cheval entre la Maremme (Toscane) et Londres.

Muni d’une grande expérience dans le secteur culturel, il a parlé de la philosophie qui se cache derrière les photographies exposées et sa conception du monde post-Covid.

” Le Piazze [In]visibili ” qui sera visible jusqu’au 20 juin 2021 met en œuvre le travail de 40 artistes photographes. Réalisées durant les premiers jours du confinement sanitaire en 2020, les photographies sont prises dans différentes villes italiennes.

Leurs auteurs immortalisent le temps dans 100 Places italiennes à des moments où il y a beaucoup de soleil. Cet élément de la lumière coïncide avec le contraste sur les lieux et dans des horaires qui sont habituellement de grande fréquentation.

Comme partout ailleurs, en période de confinement sanitaire général, les déplacements entre les villes italiennes était interdit. Le pays rappelle-t-on avait connu une première vague dévastatrice du Covid ayant suscité la sympathie du monde entier alors sous le choc d’une pandémie jusque là méconnue.

Pour chaque Place photographiée, le curateur choisit un photographe et un écrivain de la même ville pour écrire les textes qui accompagnent les photos. Les légendes sont un moyen implicite qui traduit cet attachement identitaire et le sentiment d’appartenance aux lieux.

Des changements multiformes…

Entre les grandes et les petites villes, le poids du temps, avant et sous confinement, n’est évidement pas le même. C’est ce que confirme le curateur selon lequel il existe “beaucoup de différences, car les Places des grandes villes font habituellement partie du tourisme international”.

Ces lieux emblématiques ne désemplissaient pas et constituaient un point de repère et d’attraction pour les foules de visiteurs. “Pour ma génération et toutes celles avant ou après nous, il était impensable d’imaginer ” Piazza San Marco ” à Venise, ou ” Piazza del Duomo ” à Milan complètement vides à 13h”, explique Delogu.

Le confinement a été le moment inimaginable qui a permis l’expérimentation d’une nouvelle routine quotidienne et un mode de vie assez inhabituel. Dans la pratique culturelle et artistique, la crise sanitaire a eu un impact assez visible.

Du point de vue de l’artiste, ce qui a changé dans le monde depuis le début de la pandémie a permis de créer un nouveau mode de pensée. Il explique cette orientation de la pensée vers l’essence même de la vie et la dimension identitaire et non plus vers cet aspect basé sur le gain, l’argent et le succès.

La nouvelle orientation de l’intérêt humain

Le monde des arts a lui aussi coupé avec ces habitudes d’avant. Le curateur est lui-même touché par ce contexte sachant que ses photographies figurent dans les collections des grands musées internationaux.

“Voyager d’un musée à l’autre aux Etats-Unis, ou se retrouver dans une galerie privée à Londres, à Hong Kong ou à Sydney…”, n’est plus un souci qui se pose quand on est obligé de rester chez soi. “L’intérêt humain est devenu orienté vers toute une autre dimension, beaucoup plus privée et profonde à la fois”.

La vie en temps du Covid a eu des répercussions et un impact psychologique aussi bien que dans la relation entre les humains et la nature. Cette conjoncture a encore renforcé l’intérêt pour les causes environnementales notamment chez cet artiste qui vit au cœur de la nature de sa petite région de Maremme, ce qui constitue un élément important pour lui.

Les journées, assez longues ou courtes, qu’il fasse chaud ou froid, son rapport avec la nature est fort. Il voit omniprésent ce lien éternel entre la vie et la mort dans un cadre qui accentue la conviction que la nature est un tout.

Il faut stopper le capitalisme stupide

Toutes les photos exposées sont, en quelque sorte, le récit d’un monde sans touristes, ce qui signifie moins de voyages, moins de pollution et moins de dommages pour la qualité de l’air qu’on respire et la nature en général.

Le curateur du projet est complètement investi par cette option d’un monde meilleur. Il adopte ” cette idée géniale que l’Humanité puisse stopper un capitalisme stupide et suivre la voie de la nature et de la philosophie “.

Quoique “personne ne sait vraiment comment serait le monde post-Covid-19”, il demeure confiant en l’avenir du monde qui “aura beaucoup plus d’intérêt pour la culture et moins pour le business. La paix et la réflexion prendra la relève sur un monde en guerre et en compétition.”

Il garde espoir en une humanité et une planète débarrassées de leurs maux où règne une véritable “coexistence entre les cultures, les religions et les genres”.