Depuis près d’une décennie, nos industriels toutes activités confondues souffrent des conséquences du soulèvement de janvier 2011, de la chute de l’ancien régime et de l’instabilité politique du pays. La désindustrialisation de la Tunisie a commencé il y a 10 ans, avec l’inondation de notre marché national de marchandises chinoises et turques. Résultat : des pans entiers en ont presque disparu à cause de la concurrence déloyale et des facilités accordées par les gouvernants et en prime l’appui inconditionnel de la  Nahdha aux exportateurs turcs ou aux importateurs tunisiens “amis » de Turquie et de Chine. Le pire c’est que nous ne voyons aucune réaction de l’UTICA comme si le malheur des entrepreneurs et des industriels nationaux l’indiffère! 

Les cris de protestation des professionnels et des médias n’ont pas trouvé échos auprès des décideurs indifférents au bien être de leur population et aux performances de leur économie.

Quand le ministère de la Défense ne prend pas le parti des industriels nationaux ! 

Dans un post publié ce matin Nafaa Ennaifer, vice président de la Fédération Tunisienne du Textile et de l’Habillement « FTTH », exprime sa colère et son indignation à propos de la dernière consultation lancée par notre ministère de la Défense !

Ci-après son réquisitoire :

“Les entreprises textiles tunisiennes souffrent, d’une part, des répercussions dangereuses de la crise sanitaire, et d’autre part, de l’inondation du marché national de produits et de marchandises de contrebande !

Ces entreprises ont une expérience et des compétences qui les ont rendues capables, depuis des décennies, de répondre à toutes les demandes de tous les corps de métiers en vêtements et en tenues. Ceci qu’il s’agisse de la police ou de l’armée nationale et ce dans le cadre des appels d’offres nationaux sur lesquels de nombreuses entreprises tunisiennes se font concurrence entre eux.

A l’heure où tous les pays du monde soutiennent leurs entreprises et préservent leurs emplois, à l’heure où tous les pays donnent la priorité aux entreprises nationales dans la conduite des marchés publics, nous avons été surpris, et dans un précédent qui ne se justifie par aucune logique, que le ministère de la Défense fasse une première consultation avec 2 entreprise chinoise, 2 entreprises turques et 1 entreprise tunisienne spécialisée dans le tissage seulement  (pour être automatiquement écartée) pour l’acquisition de 180.000 tenues de combat par an dans le cadre d’un contrat cadre de 3 ans !!!

Donc les entreprises tunisiennes seront privées d’un accord d’une valeur de 70 à 75 millions de dinars sur 3 ans, dont les usines de tissage, de teinture, de couture, de broderie et de fabrication de boutons et les entreprises chinoises et turques bénéficieront de l’argent des impôts tunisiens, sans oublier la destruction de l’industrie nationale parce que les entreprises tunisiennes vont inévitablement disparaître!

Et le plus dangereux, c’est que le ministère de la Défense n’a pas été satisfait de cette consultation mais a ensuite émis de nombreuses demandes d’offres internationales pour l’achat de grandes quantités d’autres vêtements militaires (dans le cadre de contrats-cadres de 3 ans) !!!!

S’il est impératif pour les fournisseurs tunisiens de fournir la preuve de leur solvabilité fiscale et du règlement de leurs cotisations sociales, alors qu’ils ne peuvent être payés en dinars tunisiens que dans les 4 à 6 mois suivant la livraison des marchandises, les fournisseurs étrangers seront payés en devises fortes, cash et avec le risque de change!

Les Tunisiens fabriquent des uniformes de police et d’armée et des vêtements administratifs pour de nombreux pays européens et africains et l’Etat tunisien a recours à l’importation des vêtements de son armée nationale de Turquie et de Chine.

Nafaa Ennaifer a le droit d’être outré car il y a effectivement de de quoi devenir fou! La souveraineté et la sécurité économiques sont aussi importantes que la défense des frontières nationales! Et lorsque nous voyons une puissance telle que les États-Unis d’Amérique livrer des guerres pour assurer sa sécurité commerciale, nous ne pouvons qu’être interloqués lorsque nous voyons un ministère de souveraineté comme celui de la Défense nationale en lequel nous avons toujours eu confiance céder des marchés à des étrangers alors que la souveraineté économique tunisienne est bafouée ! Nous ne sommes pas pour les guerres, tout ce que nous voulons est vivre dans un pays où nos hautes institutions nous protègent et sauvegardent nos intérêts !

Amel Belhadj Ali