La crise du coronavirus a montré, de manière claire, que la Tunisie ne fait partie ni du monde arabe, ni islamique, ni maghrébin, encore moins européen en tout cas dans le domaine économique. En effet, avec la fermeture des frontières (européennes, arabes et maghrébines…), la seule ouverture pour la Tunisie c’était la Libye et l’espace sahélien au sud du Sahara.

Il s’agit d’une grande zone géoéconomique s’étendant de la Mauritanie au Tchad, en passant par le Mali, le Burkina Faso et le Niger qui est presque restée ouverte, avec un fonctionnement de certaines lignes aériennes, non seulement rentables mais aussi accessibles sans visa (à l’exception du Tchad).

Coopération économique tous azimuts

De ce fait, nous pensons que la Tunisie aurait intérêt à redéfinir sa stratégie économique et commerciale, en la réorientant le Sahel… D’ailleurs, tous ces pays regardent la Tunisie avec un grand intérêt, car il y a une complémentarité avec leurs économies, que ce soit en termes de ressources humaines, de services de santé, d’études, du numérique ou en produits industriels.

Sans oublier la Libye, qui peut absorber plus de 200 000 chômeurs tunisiens sur son marché en pleine restructuration et avec plus de 2 millions de touristes et visiteurs libyens. Il faut y ajouter la Mauritanie qui va multiplier son PIB par 4 (selon certaines prévisions) avec le démarrage de l’exploitation du gisement pétrolier et gazier de la Grande Tortue, qu’elle partage avec le Sénégal.

Des opportunités à saisir…

Idem pour la Guinée (qui ne fait partie des pays sahéliens mais qui partage avec eux de longues frontières), dont la croissance devrait dépasser les 7% en 2021, portée par ses ressources forestières et minières, et par la mise en place d’un grand chantier d’infrastructures et de digital.

Le Tchad et le Mali ne sont pas en reste, ils retrouvent progressivement le chemin de la croissance et sont des marchés importants où les entreprises tunisiennes sont fortement implantées.

Mais le pays qui connaît le meilleur essor économique est le Niger, porté par une transition politique douce et démocratique. Il consolide ses acquis et continue à surfer sur une croissance de 7% par an pour les prochaines années. Avec une économie portée par de nouvelles découvertes pétrolières, et surtout une production agricole importante et des exportations sur l’ensemble des pays de l’Ouest.

En effet, le Niger est le premier pays exportateur en produits agricoles (notamment pommes de terre, oignons, ail, tomates et piments) vers le Ghana, le Sénégal, le Mali, la Guinée et le Burkina Faso.

Rappelons au passage que le Niger vient de connaître une transition politique, suite à des élections jugées par la communauté internationale de “transparente“. C’est un pays francophone avec une minorité arabophone et qui partage avec la Tunisie un symbole culturel très fort : le port de la chechia.

Autant dire que la Tunisie a tout intérêt à s’intéresser davantage à ces pays, en ouvrant des ambassades ou des consulats au Niger, en Guinée et au Tchad, mais également en ouvrant une nouvelle ligne aérienne vers le Tchad et en renforçant la fréquence des lignes actuelles servies par Tunisair.

Le président de la République, Kaïs SAIED, qui se veut un « président de la rupture et du renouveau », a l’occasion unique d’ouvrir une nouvelle page dans la diplomatie tunisienne et celle de l’Afrique.

Liens particuliers entre la Tunisie et le Niger

Rappelons au passage que le président Bourguiba fut le premier à s’intéresser à ces pays, en inaugurant sa diplomatie africaine par des visites au Niger, au Sénégal, en Guinée et en Mauritanie dès 1963. Malheureusement, depuis cette date, la roue de l’histoire s’est figée.

Le président SAIED a aujourd’hui une occasion en or d’assister à l’intronisation du nouveau président élu du Niger, Mohamed BAZOUM.

Il faudra même noter que le Niger et la Tunisie disposent d’alliances familiales puisqu’une nièce du nouveau président (Mohamed BAZOUM) est mariée à un Tunisien.

Une nouvelle ère s’ouvre à la Tunisie diplomatique et économique, il ne faudrait pas la rater. Kaïs Saïed est, pensons-nous, le bon profil, car il se place dans une démarche nouvelle et innovatrice. On souhaite juste qu’il saisisse cette chance historique.

Maarouf