Les participants à une conférence, vendredi, sur le contrôle du financement des partis politique en Tunisie ont souligné la nécessité d’améliorer les mécanismes de contrôle des fonds alloués aux partis politiques eu égard aux menaces qui pèsent aujourd’hui sur la jeune démocratie en Tunisie.

Chawki Tabib, président de l’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC), a mis en garde contre la “libanisation” de la réalité politique en cas de maintien de la législation actuelle et du décret-loi n°2011-87 du 24 septembre 2011, portant organisation des partis politiques.

“Plusieurs indicateurs montrent que la Tunisie connaît une guerre par procuration, menée par des parties régionales extérieures au pays comme en atteste, clairement, la situation au parlement”, a-t-il déploré.

La cadre juridique actuel est incomplet, a-t-il estimé, assumant que le contrôle du financement des partis politiques relève de la responsabilité des médias, de la société civile, de la Justice et de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE).

“Mais la plus grande responsabilité revient au gouvernement et aux partis essentiellement”, a-t-il encore estimé.

Selon Tabib, le premier bénéficiaire du décret-loi n°87 sont les partis politiques qui sont au nombre de 224, ce qui explique leur refus d’activer ou d’améliorer le texte actuel pour maintenir le flou concernant leurs sources de financement.

S’agissant de la polémique autour de l’éventuelle implication du chef du gouvernement, Elyès Fakhfakh, dans une affaire de conflit d’intérêts, le président de l’INLUCC a rappelé que le législateur a accordé à l’instance la mission de contrôler ce genre de situation et de transférer les dossiers à la justice.

De plus, l’article 90 de la Constitution, qui est, dans la hiérarchie des normes, supérieure à la loi n°2018-46 portant déclaration des biens et des intérêts, de la lutte contre l’enrichissement illicite et le conflit d’intérêt dans le secteur public, interdit au chef du gouvernement ou à aucun autre membre du gouvernement l’exercice d’une autre fonction.

De son côté, Abdessalem Grissiaâ, premier président du Tribunal administratif, a évoqué l’article 26 du décret-loi n°87 qui exige la présentation des rapports de contrôle du financement des partis à une commission conduite par le premier président du Tribunal administratif et avec la participation du premier président de la Cour d’appel de Tunis et le président de l’Ordre des experts-comptables de Tunisie. Il a fait remarquer que l’article 26 ne comporte pas, cependant, des textes d’application ou des moyens matériels régissant le travail de la commission.

Pour sa part, Mourad Mahjoubi, responsable de la direction générale des associations et des partis politiques, a estimé que parmi les principales lacunes du décret-loi n°87 est la non application du volet du financement public mentionné dans l’article 21 dudit décret.

Le nouveau projet de loi qui répond aux normes internationales (Commission de Venise) garantira le financement public pour tous les partis politiques sur toute l’année, a-t-il ajouté.

Le nouveau projet de loi dont l’examen a démarré en 2018 avait fait l’objet de 5 concertations avec les partis politiques, mais n’a jamais été soumis à l’Assemblée des représentants du peuple.

Organisée par le Centre Kawakibi pour les transitions démocratiques, en collaboration avec le ministère des droits de l’Homme et de la Relation avec les instances constitutionnelles et la société civile, cette conférence a pour objectif d’identifier les points faibles et les difficultés auxquelles sont confrontées les structures de contrôle.